ORGANISATION TÉLÉTRAVAIL ET DÉCONFINEMENT, QUELLES RÈGLES ?
Le recours massif au travail à distance s’est imposé au plus fort de la crise sanitaire liée au Covid-19. Mais qu’en est-il au moment où nombre d’employeurs invitent leurs salariés à reprendre le chemin du bureau ? Retour sur les droits et les obligations
Le télétravail reste « souhaitable » mais il « ne doit pas devenir la norme » : c’est, en substance, le mot d’ordre lancé, le 15 juin dernier, par le ministre de l’économie et des Finances Bruno Le Maire. Alors que la pandémie de coronavirus a précipité dans de nombreuses entreprises la mise en place du travail à distance (cinq millions de salariés du privé y ont eu recours au mois de mai, soit un employé sur quatre), la nouvelle version du protocole sanitaire - assoupli pour accélérer le retour des employés sur leurs lieux de travail -, rendue publique fin juin, précise qu’il s’agit d’une « solution à privilégier dans le cadre d’un retour progressif à une activité présentielle, y compris alternée ». Désormais, cette possibilité est réservée en priorité aux travailleurs à risque de forme grave de Covid-19 (diabétiques, asthmatiques, hypertendus...) ou à ceux qui vivent sous le même toit que ces personnes vulnérables. Certes, le déconfinement semble mettre fin au télétravail de masse. Reste que si l’expérimentation brutale et forcée de ce mode d’organisation a bouleversé les pratiques professionnelles ces derniers mois, elle a clairement fait de nouveaux adeptes (même parmi les managers les plus réfractaires). À tel point qu’une grande majorité de salariés disent souhaiter faire davantage usage du travail à distance après la crise, de manière ponctuelle ou régulière.
PRÉSENCE SUR SITE INDISPENSABLE… OU PAS Dans les circonstances actuelles, le gouvernement laisse finalement aux entreprises le soin de décider d’organiser le cadre du télétravail. Aussi, conformément aux dispositions de l’article L1222-11 du
Code du travail, l’employeur peut imposer - notamment en cas de menace épidémique, telle que nous la vivons - le travail à distance à tout ou partie de ses effectifs (sans leur accord, donc). C’est le cas s’il juge que leur présence physique n’est pas indispensable sur leur de travail, ou qu’il n’est pas en mesure de mettre en place les mesures de protection sanitaire (mise à disposition de gel hydroalcoolique et de masques aux travailleurs, gestion des flux de circulation...). Dans cette situation, un salarié qui refuse de télétravailler est passible de sanctions disciplinaires, qui peuvent aller jusqu’à la rupture du contrat de travail. Qu’en est-il si l’employeur exige un retour en présentiel alors que l’employé rechigne ? Là, c’est à lui de démontrer que les conditions de reprise d’activité sur le lieu habituel de travail sont conformes aux consignes sanitaires, mais également que, compte tenu de la nature de ses fonctions, la présence du salarié sur site s’avère incontournable pour le bon fonctionnement de l’entreprise. Dès lors, le salarié n’a d’autre choix que de venir travailler. Si celui-ci n’obtempère pas, il prend le risque d’être licencié.
HORAIRES DE TRAVAIL À RESPECTER
Si la mise en place du télétravail (à temps plein ou partiel) relève d’un souhait de l’une ou de l’autre des parties, elle doit se faire dans le respect des conditions réglementaires et conventionnelles. Traditionnellement, le travail à distance repose (hors contexte exceptionnel, donc) sur un double volontariat. D’abord, celui de l’employeur, qui conserve la possibilité de s’opposer à la demande formulée par un salarié dont le poste est pourtant éligible, à la condition sine qua non de motiver son refus (et en
core, si l’entreprise a signé un accord ou une charte sur le télétravail). Ensuite, celui de l’employé, pour qui le refus du télétravail n’est pas fautif et ne constitue pas un motif de rupture du contrat de travail. Concernant l’organisation du travail, c’est en revanche l’employeur qui a généralement la main. Il fixe les horaires de travail au salarié, lequel se doit d’être opérationnel et disponible pendant des créneaux préalablement déterminés. En revanche, au nom du respect de la vie privée du travailleur - notamment grâce au droit à la déconnexion -, le manager ne peut pas le contacter en dehors de ces heures.
QUEL REMBOURSEMENT DES FRAIS ?
Qu’en est-il des remboursements liés au télétravail ? Depuis les ordonnances Macron de 2017, l’employeur n’est plus contraint d’assumer les coûts liés au télétravail (connexion Internet, chauffage, électricité.́..). Toutefois, l’accord ou la charte d’entreprise peut prévoir que le salarié perçoive une allocation forfaitaire globale. En revanche, le dirigeant doit fournir le matériel informatique adéquat (par exemple un ordinateur, si le salarié refuse d’utiliser le sien). Quant aux consommables (ramettes de papier, cartouches d’encre...), ils sont remboursés sur justificatifs. Dernier point réglementaire très important : un employeur ne peut pas demander à un salarié placé en activité partielle de travailler à distance durant ses périodes de chômage technique. Le chef d’entreprise qui se risquerait à frauder encourt jusqu’à deux ans de prison et 30.000 euros d’amende.