• Pour les créatifs
La productivité et la bureautique sont devenues accessibles et faciles sur toutes les plateformes. Il n’en va pas forcément de même pour les activités créatives, plus élitistes et plus ciblées, surtout si on les pratique à un niveau avancé.
Àune exception près, les éditeurs des solutions logicielles disponibles ne sont pas ceux des systèmes d’exploitation. À ceci il faut rajouter le fait que ces tâches, souvent assez exigeantes en termes de ressources, sollicitent énormément le matériel de l’ordinateur: gestion de la RAM, optimisation des transferts, utilisation des coeurs du CPU, et surtout accélération GPU… La création est un processus complexe sur le fond, et sur la forme.
Windows: le plus de logiciels…
Windows profite à plein de son âge et de sa grande popularité: tous les grands noms de l’édition audio, photo, dessin ou vidéo sont disponibles pour votre PC et ont pour la plupart accompagné les différentes versions de Windows depuis la nuit des temps… Photoshop, par exemple, a été lancé en 1990 sur Macintosh, avant d’arriver sur PC en 1993, sous Windows 3.1. Cela fait donc près de 30 ans, une éternité en informatique. Et tous les grands noms de la création multimédia ont leur version Windows : outre Adobe, on y trouvera les grands noms du secteur comme DaVinci (Blackmagic), Avid, Phase One, DXO, Serif, etc. Sans compter la pléthore d’éditeurs moins connus proposant des solutions gratuites ou payantes à foison.
... qu’il faut marier au bon hardware
Mais cette profusion pose également plusieurs problèmes, à commencer par celui de l’optimisation. Un problème ô combien épineux, surtout lorsqu’on parle de vidéo, et de photo dans une moindre mesure. Par exemple, certains éditeurs vidéo utilisent peu de cores de CPU (inutile dans ce cas d’avoir un CPU à plus de 10 coeurs), et utilisent des optimisations propres à certaines puces comme le Quick Sync d’Intel. Certains utilisent un GPU au mieux, d’autres peuvent en gérer plusieurs. Certains privilégient le GPU et la VRAM, alors que d’autres sollicitent surtout le CPU. Certains préfèrent les API nVidia (CUDA) alors que d’autres sont optimisés pour AMD (OpenCL ou Metal)... Avoir un PC surpuissant et un logiciel pas ou mal optimisé pour cette configuration est du gaspillage pur. Il est impératif de choisir l’application la mieux adaptée à son hardware, ou de construire son PC en fonction de son logiciel de prédilection. C’est là toute la difficulté induite par la profusion de solutions existant sous Windows.
MacOS : au top avec les (rares) logiciels Apple
Apple a longtemps vécu sur un postulat: les Mac sont faits pour les créatifs, les PC pour les bureaux ou les joueurs. Vrai pendant les années 1990 et une partie des années 2000, ce postulat s’est depuis bien vite érodé et le monde du PC, plus évolutif, plus puissant et moins cher, a largement rééquilibré la donne. Apple dominait sur la colorimétrie ou sur les polices par exemple… aujourd’hui les PC font aussi bien. Mais à l’inverse du monde PC, Apple a toujours proposé un environnement matériel bien plus simple. Prenez le catalogue actuel par exemple: on n’y trouve que des
processeurs Intel et des GPU AMD. Développer pour Mac est donc a priori bien plus simple: on optimise pour l’architecture Core et on passe par l’API Metal pour le GPU. Et ça peut très bien fonctionner. Si on reste sur l’exemple de la vidéo, puisque c’est le segment le plus exigeant pour un créateur, il est facile de désigner Final Cut Pro comme l’exemple absolu d’optimisation parfaite entre logiciel et matériel. Développé par Apple pour ses seuls Mac, ce logiciel est bluffant d’efficacité. Vous pourrez ainsi monter plus facilement des vidéos très lourdes sur un MacBook que sur un PC plus puissant avec Premiere ou Resolve par exemple. Et la différence est flagrante. Mais si vous utilisez autre chose que Final Cut Pro, votre Mac perd de son intérêt. En effet, ne pouvant optimiser leurs codes pour toutes les configurations du marché, la plupart des grands éditeurs se sont focalisés sur le marché PC, plus significatif en termes de volumes et, au fil des mises à jour, les outils Adobe (ou autres) se sont mis à mieux fonctionner sur des PC puissants et bon marché, que sur des Mac bien plus onéreux.
Reste qu’Apple dispose encore de quelques jokers, à commencer par des écrans utilisant majoritairement un rétro-éclairage RG Phosphor produisant un spectre colorimétrique plus harmonieux que le WLED tirant souvent sur le bleu. Et surtout, Apple propose une implémentation parfaite du port Thunderbolt depuis le départ. Technologie très appréciée des créateurs, elle permet de chaîner les périphériques (moniteurs, disques externes, GPU externes) et de profiter d’une interface de transfert ultra-rapide, à 40 Gbps en Thunderbolt 3. Le comble étant que le Thunderbolt est une technologie Intel, horriblement mal implémentée dans un monde PC encore bloqué sur des interfaces USB aux noms et aux spécifications sans cesse changeants, atteignant au mieux 20 Gbps aujourd’hui, et avec un nombre de périphériques compatibles encore assez limité. Et ce « monopole » Apple sur le Thunderbolt 3 devrait durer au moins jusqu’à l’arrivée de l’USB 4 sur PC, à condition que l’implémentation y soit bien faite.
Linux, ChromeOS… les parents pauvres de la création?
Sur Linux ou ChromeOS, les choix sont plus restreints. On trouve des solutions pour faire de la musique, éditer des photos ou des vidéos, mais à des niveaux bien moins avancés que sur PC ou Mac. Sur Linux, on retrouve la même base d’applications pivot depuis des années, le logiciel phare étant l’excellent Gimp. Et sous Linux, il y a de quoi tout faire en termes de création: de la photo avec Darktable par exemple, du dessin vectoriel avec Karbon ou Vectr, de l’édition vidéo avec KDenLive ou OpenShot, du dessin avec Krita ou Inkscape… Difficile de citer tous les logiciels tant ils sont nombreux. Le seul vrai problème de Linux est que peu de grands noms y déclinent leurs solutions, à commencer par Adobe. La seule exception notable de ces dernières années restera DaVinci qui publie également une version Linux de son excellent Resolve, nouvelle pépite de l’édition vidéo pro. On peut donc en faire beaucoup sous Linux, mais il n’est pas toujours évident de trouver des applications aussi pointues dans leurs prises en charge de formats ou dans leurs qualités de rendu que sur PC ou Mac. Il manque surtout à Linux un appel d’air provoqué par le support d’un ou plusieurs grands éditeurs du secteur.
Chromebook convertibles: idéaux pour les dessinateurs
ChromeOS enfin est un cas encore plus particulier. L’OS de Google peut faire fonctionner les applis présentes sur le
Play Store et on y retrouvera quelques classiques comme Adobe Lightroom qui est assez bon en version mobile. Mais la plupart des applications restent orientées « mobile » et souvent plus adaptées à un écran de smartphone qu’à celui d’un notebook. Avec quelques exceptions notoires, comme l’excellent Krita, ou Inkscape, des logiciels de dessin professionnel pour mangakas en herbe, disponibles sur le Playstore et parfaitement adaptés aux grands écrans, les Chromebook convertibles ou les tablettes sous ChromeOS avec leur écran tactile et leur stylet se transforment instantanément en tablettes graphiques de très bon calibre ! Une utilisation sans doute pas prévue à l’origine, mais pour laquelle les Chromebook brillent vraiment.
De plus, ChromeOS a un bel atout dans sa manche puisque via Crostini, il est possible d’installer un environnement Linux et les applications Linux classiques, comme Darktable ou KDenLive par exemple. Il faudra s’habituer à la ligne de commandes : sudo apt-get install “nom du programme”-y, ou encore aux commandes pour les mises à jour, et à celle de désinstallation (sudo aptget remove “nom du programme”-y). Pour la création, l’avantage est assez clairement au duo Windows-Mac OS, disposant tous deux d’une offre logicielle très vaste et d’excellent niveau. Linux et ChromeOS ne sont pas ridicules mais ont encore beaucoup de retard à combler pour devenir crédibles dans ce domaine. ■