Midi Olympique

« Farrell, c’est Kobe Bryant »

ÉLU HOMME DU MATCH, LE KID DE PONTYPOOL EST LE MEILLEUR 8 DE LA PLANÈTE ET, ACCESSOIRE­MENT, UN SUPER CLIENT. BILLY SE MARRE, SOUVENT. MAIS SUR LE TERRAIN, IL NE FAIT RIRE PERSONNE.

- Propos recueillis par Léo FAURE leo.faure@midi-olympique.fr

Vous décrochez votre deuxième titre européen consécutif. Quel sentiment vous habite ?

C’est chouette, non ? Mais ça a été tellement dur. Clermont est une super équipe. Les joueurs se sont accrochés, ils sont revenus au score. Il a fallu être fort pour les faire définitive­ment lâcher. Mais on l’a fait, on est resté solides. J’imagine donc qu’on est une équipe pas trop mauvaise et un groupe de mecs qui ne s’entend pas trop mal…

Votre entame de match est un modèle du genre…

Disons que notre plan a bien fonctionné. Tout était en place et sur une situation extérieur, Richie (Wiggleswor­th, N.D.L.R.) dépose un amour de coup de pied dans le dos. Ça aurait dû être facile mais Ash (Ashton) ne court pas très vite (il rigole). Donc j’ai eu peur. Plus sérieuseme­nt, cette entame nous a donné du confort. Derrière, on a pu construire un rugby sérieux. Nous avons été hyper-discipliné­s, très efficaces et renforcés par une bonne conquête. Tous les éléments de la victoire étaient en place.

Un mot sur votre match ?

Déjà, je me fais battre par Lamerat sur son essai. Je savais qu’ils allaient le chercher pour sa puissance donc je m’étais préparé. Mais celui-là, c’est du gaillard. Il m’a battu. Pour le reste, j’ai fait ce que je sais faire.

Quand Clermont revient à un point, doutez-vous ?

Une finale, il faut que ce soit serré. C’est mieux ainsi, si vous luttez pour aller la chercher plutôt que de surclasser l’adversaire. Là, effectivem­ent, il a fallu se battre. Tant mieux, ça nous a permis de prouver à tout le monde quelle équipe on est. Là, on savait que Clermont allait marqué. On s’y était préparé. Ils ont des joueurs fabuleux dans toutes les lignes, il y a forcément un moment où ça paye. Il fallait juste s’y attendre et, donc, ne pas s’affoler.

Vous êtes champion d’Europe pour la deuxième année consécutiv­e. Avez-vous conscience de faire entrer votre club chez les très grands, avec Toulon, Leinster ou Toulouse ?

Je n’aime pas trop cette question. Je ne pense pas qu’on soit encore une grande équipe. Simplement une bonne équipe. Ce week-end, on a juste bien fait notre boulot, rien d’exceptionn­el.

Si vous n’êtes pas une grande équipe, alors qui l’est ?

Le FC Barcelone. Ça, c’est une grande équipe. Nous, on n’est que les Saracens. Eux, ils ont vraiment tout gagné et pendant plusieurs années. On n’est qu’au début de ce chemin. Si on travaille bien et qu’on va jusqu’au bout du chemin, je serai plus à l’aise pour me présenter face aux médias en affirmant qu’on est une grande équipe.

Vous êtes tellement jeune et déjà titré à de multiples reprises. Avez-vous encore faim ?

Sérieuseme­nt ? J’ai 24 ans et vous pensez que j’en aurais déjà marre ? Vous êtes fou ? On avance. On a encore tellement de choses à accomplir. Imaginez : Owen Farrell n’a que 25 ans. Mais ce mec est habité. Il a un destin, un truc en lui qui en fait une personne différente des autres. Il a une ambition incroyable et il se donne les moyens de la satisfaire. Les champions, c’est ça. Les autres, autour, on le suit. On fait notre boulot discrèteme­nt, pour l’aider dans sa mission. Mais si ça vous inquiète franchemen­t : oui, on a encore très faim.

Farrell est-il la clé de votre équipe ?

C’est incroyable d’être si jeune et si focalisé sur ses objectifs de vie. Ce mec, je l’admire. Vraiment. Il a un côté insupporta­ble, mais vous ne pouvez pas faire autrement que de l’aimer. Owen, c’est Kobe Bryant. Sur un terrain, tout le monde sait exactement ce qu’il va faire. Tout le monde l’anticipe. Et pourtant, il arrive quand même à le faire. Les grands joueurs, c’est ça. Owen en est un immense.

Allez-vous célébrer ce titre ou vous tournez-vous déjà vers les demi-finales de championna­t ?

Vous êtes fous ou quoi ? On va faire une énorme fête ! Ça a fait marrer tout le monde tout à l’heure, quand je l’ai dit à la télé, mais je suis sérieux : je remercie Dieu pour le titre de champions d’Europe, et je m’excuse d’avance pour l’immense cuite que l’on va prendre pendant quelques jours ! On joue aussi au rugby pour ça : gagner des grands matchs et, ensuite, les fêter ! Se faire plein de souvenirs avec les copains, c’est ça le véritable intérêt du rugby.

Le secret des Saracens, est-ce cette amitié ?

Oui, parce que ça crée de la solidarité sur le terrain. Je ne joue pas avec des grands joueurs, je joue avec des grands mecs. La différence est importante, parce qu’elle vous fait gagner des titres.

Vous êtes, en plus, un groupe très jeune : où allezvous vous arrêter ?

Tout le monde dit ça : ils sont jeunes, ils ont déjà du succès donc ils vont tout gagner pendant dix ans. Ceux qui disent cela ne savent rien des sacrifices qui permettent ces victoires. C’est facile de commenter, de dire : « Ils sont trop forts, ils gagnent facilement et donc ils gagneront pendant dix ans. » Mais ça ne tombe pas du ciel. On travaille pour ça. On se fait vraiment violence.

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