Midi Olympique

SUR LES CENDRES D’ÉDIMBOURG

DEUX SEMAINES APRÈS S’ÊTRE INCLINÉS EN FINALE DE CHAMPIONS CUP FACE AUX SARACENS, LES CLERMONTOI­S ONT REBONDI. ET DE QUELLE MANIÈRE ! SUPERBES VAINQUEURS D’UN RACING SURCLASSÉ, LES AUVERGNATS ONT TROUVÉ DES RESSOURCES DANS UNE FRANCHE EXPLICATIO­N DE TEXTE

- Par Léo FAURE, envoyé spécial leo.faure@midi-olympique.fr

Il fallait tout de même oser. Faire basculer Aurélien Rougerie sur le banc, Scott Spedding en tribunes, Lapandry en costume et balancer sous ce soleil de flamme qui assommait Marseille les gamins d’aujourd’hui, aussi bons soient-ils. Que Iturria, Cancoriet, Penaud ou Raka soient immensémen­t talentueux, on le savait déjà. Qu’ils soient capables de le démontrer dans une demi-finale, face à la colonie All Black du Racing, c’était une autre affaire. Mais le savoir-faire des Clermontoi­s, c’est aussi celui de l’optimisati­on des potentiels. Quand ils recrutent un jeune, ils prennent le gratin du rugby hexagonal. Mais ils savent, ensuite, faire bien les choses pour l’amener au sommet.

Samedi, c’est donc cette jeune garde qui a surclassé le Racing, champion de France soudaineme­nt trop âgé pour suivre le rugby de feu des Auvergnats. « Ce n’était pas non plus un grand pari. Ces jeunes ont du talent et du tempéramen­t. Ils ont effectivem­ent répondu présent », tempérait Franck Azéma après la rencontre. Cette victoire est aussi celle de son management, où il était assumé dès le début de la saison que ces jeunes compteraie­nt désormais pour un. Un discours suivi d’effets. C’est aussi celle d’une force de résilience unique. Clermont est peut-être l’équipe qui perd le plus de finales de la planète. Mais c’est aussi celle qui, plus qu’aucune autre, démontre sa capacité à toujours se relever. Et pour ça, il en faut du mental ! « LE GROUPE ÉTAIT EN TRAIN D’IMPLOSER »

Ce rebond, cette fois, est né dans la colère. Celle qui a suivi immédiatem­ent la finale perdue de Champions Cup, il y a deux semaines dans les vestiaires d’Édimbourg. Loin du discours fataliste qui a été très vite été proposé après le match - « on est tombé sur meilleurs que nous et aujourd’hui, on est certaineme­nt à notre place en finissant deuxième équipe d’Europe », admettait Azéma - les Clermontoi­s ont haussé le ton, dans le secret des vestiaires de

Murrayfiel­d. « Il y avait des choses à se dire et parfois, quand c’est douloureux, ça se fait avec des éclats de voix », confie un joueur. Concrèteme­nt, beaucoup de tensions ont émergé à ce moment. Sans en venir en mains, tout de même, mais l’explicatio­n de texte, entre joueurs, a été musclée. « Il fallait que chacun se responsabi­lise, qu’on soit enfin des grands garçons pour arrêter d’être les perdants sympathiqu­es. Si on perd des finales, ce n’est pas seulement un problème de chance ou de malédictio­n. C’est peut-être qu’on ne les mérite pas. Il faut que ça cesse. » À ce moment précis, les cadres du groupe ont tapé fort sur leurs camarades. Assumant leur rôle et leurs ambitions. « Ils sont exigeants avec eux-mêmes mais, surtout, ils ont appris à imposer la même exigence à ceux qui les entourent », appréciait Azéma au début du mois. Ce dimanche, il jugeait positiveme­nt l’épisode d’Édimbourg : « C’est toujours une bonne chose quand des vérités ressortent. Dans un groupe, il faut savoir se les dire. À l’inverse, j’aurais trouvé anormal qu’il n’y ait pas de rébellion, que personne ne soit touché. Cet épisode ne m’a pas du tout choqué. Il m’a plutôt rassuré. » Et tant pis si les mots ont été

durs. « Pour moi le groupe était en train d’imploser. C’était la défaite de trop et l’engueulade allait laisser des traces. En fait, c’est l’inverse qui s’est passé. On est reparti de l’avant », concluait un joueur. Parce que la colère a parfois du bon et les Clermontoi­s, habitués des longs fleuves tranquille­s, en ont parfois trop manqué. Passé l’orage, les joueurs ont soldé les comptes le lendemain dimanche, au cours d’une soirée arrosée. « On a pris le temps de sortir ensemble. Ce sont des moments importants, pour rester soudés et apprécier la vie de groupe. Surtout, on a évité de parler de rugby,

racontait Abendanon en début de semaine. Ça fait du bien de sortir de ces préoccupat­ions, de parler de tout autre chose. Cette soirée a fait du bien à tout le monde. » IL RESTE UN « SI »

Cette colère s’est finalement exprimée, samedi à Marseille. Clermont n’avait plus peur. « On n’a plus peur de savoir gagner », affirmait Davit Zirakashvi­li après la rencontre. En livrant une phrase qui peut sembler anodine, Judicaël Cancoriet donnait une

indication sur la recette du succès clermontoi­s : « On n’a pas joué une

demi-finale, on a juste joué un match de rugby. » La vérité est là : Clermont a joué. Vite, bien et à outrance. Clermont a joué son rugby, celui qu’il pratique toute la saison régulière, qui fait de lui la meilleure équipe de France depuis une dizaine d’années mais qu’il oublie généraleme­nt en phases finales. Cette fois, Clermont a joué, jusqu’à faire exploser le Racing. Et si Clermont réussit la même démarche, positive, dimanche soir au Stade de France, il sera champion. Mais encore une fois, il y a un « si ». ■

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Ambitieux dans le jeu, les Clermontoi­s ont fait exploser le Racing et inscrit quatre essais. Dont deux par le seul Lopez, auteur d’une grande prestation sur la pelouse du Vélodrome. Photos Midi Olympique - Bernard Garcia
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