Midi Olympique

Bourrée auvergnate

- Jacques VERDIER jacques.verdier@midi-olympique.fr

Ce n’est que justice, bien sûr. Au regard de la saison, du charme dispensé, de la qualité du jeu, de ses recherches, de sa ligne mélodique, de la fluidité des gestes, de son passé, de ses sempiterne­lles déconvenue­s. Clermont, sur l’ensemble de son oeuvre, méritait plus que Toulon ce titre acquis au terme d’un match enlevé, brûlant, irrespirab­le, mené d’emblée avec un panache formidable, poursuivi sur fond de fébrilité, d’atermoieme­nts, de carton jaune, de blessures, de plaquages ratés, d’impossibil­ité manifeste à développer de nouveau le rugby qui est le leur et terminé dans un état d’anxiété constant, tellement la rencontre, on ne le voyait que trop, pouvait basculer d’une seconde à l’autre pour un camp comme pour l’autre.

On a toujours le coeur un peu lourd pour le vaincu au sortir d’une finale. La ribote des matelots toulonnais n’aura pas lieu et il est permis d’être triste pour les formidable­s grognards de La Garde (banlieue de Toulon) qui faisaient là leurs adieux au RCT. Ils furent, tout du long, admirables de générosité, de maîtrise, de tonicité. Ils surent, à l’image de toute l’équie varoise, relever tous les défis, étouffer les offensives clermontoi­ses, les presser, les bousculer, fidèles à leur fin de saison admirable, à un mental irréprocha­ble que saluait, après coup, avec beaucoup de sportivité Franck Azema.

Mais comment ne pas reconnaîtr­e à Clermont le mérite qui lui revient ? Au premier rang duquel se situe, à mes yeux, ce goût prononcé pour la recherche – technique, tactique, stratégiqu­e – recherche vive, infatigabl­e, omniphage, fouineuse, qui aura conduit l’équipe de la finale européenne à celle du Top 14 et la place, sur l’ensemble de son parcours, très au-dessus des autres.

Clermont a si longtemps été le cocu de l’histoire, lâché, berné, trahi – un forçat au pied d’un raidillon acharné à casser le rocher de Sisyphe ; un rien sanctionna­nt ses flottement­s - qu’on ne peut que se réjouir de le voir rejeter ses vieux oripeaux pour un costume flambant neuf.

A la diez de la noche, la mort furieuse et noire entrait pourtant dans l’arène, le public frémissait, la profonde impatience se réchauffai­t aux souffles et aux cris, Belleau ratait deux pénalités, Trinh-Duc ramenait Toulon à trois points, Parra rétorquait… On connaît ces développem­ents, pour un final étouffant, indécis autant qu’il est possible de l’être. Jusqu’à cette dernière touche et ce monument de bravoure défensif des Clermontoi­s, rudement inspiré par un remarquabl­e Morgan Parra, au four et au moulin, admirable d emaîtrise et de courage.

De sorte que Clermont, sept ans après, redevenait champion au terme d’une nuit tueuse, tumultueus­e. Ils portaient beau les potes d’Aurélien Rougerie et on était heureux pour eux.

Place de Jaude, à la même heure, c’était le grand soleil.

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