« Les montagnes russes »

ANTHONY BELLEAU - Ouvreur de Toulon À 21 ANS, IL A ÉTÉ PROPULSÉ TITULAIRE EN DEMI-FINALE ET EN FINALE DE TOP 14. L’UN DES ESPOIRS AU POSTE D’OUVREUR FAIT LE POINT SUR SA SAISON, JUSTE AVANT DE S’ENVOLER VERS L’AFRIQUE DU SUD AVEC LES BARBARIANS FRANÇAIS.

Que reste-t-il de la finale perdue de dimanche soir ?

Un sentiment de frustration. L’impression de ne pas être passé loin d’un superbe truc. Il nous faut clôturer cette saison, mais garder dans un coin de notre tête cette défaite. Quand tu évolues à Toulon, tu ne peux pas te satisfaire d’une participation en finale. Tu veux remporter des titres. C’est la première saison que je joue autant. J’ai fait 15 ou 16 feuilles de matchs. J’ai vite perçu qu’ici, il faut gagner.

Comment avez-vous vécu personnellement ces phases finales ?

J’ai pris énormément de plaisir. J’en ressors plus grand et plus fort. J’ai beaucoup appris durant ce dernier mois.

Cela va me servir pour la suite de ma carrière. Je travaille pour jouer en première et vivre ce genre d’émotion. Je me dois d’être ambitieux. C’est arrivé très vite, mais j’étais, je pense, préparé à ce qui m’attendait. De toutes les façons, vu le pedigree de mes partenaires, je n’avais pas de pression négative à avoir sur mes épaules.

Comment avez-vous su que vous alliez être l’ouvreur titulaire pour les demi-finales du RCT ?

En fait, quand tu es joueur, tu devines très rapidement la composition d’équipe du week-end d’après. Il suffit de voir comment on travaille aux entraînements. Donc, dès le début de la semaine d’avant Marseille, j’ai senti que j’étais du bon côté. Après, il y a toujours certains aléas ou changements de dernière minute pour des questions stratégiques. Richard Cockerill ne me l’a pas annoncé personnellement mais naturellement lorsqu’il a communiqué à l’équipe le XV de départ. Je le répète, mais je n’avais rien à perdre. Cela fait maintenant trois saisons que je côtoie régulièrement pour ne pas dire au quotidien le groupe professionnel. Je n’avais rien à perdre, tout à gagner. J’allais être titulaire pour une demi-finale de Top 14 au Vélodrome de Marseille. Ce qui m’arrivait, ce n’était que du positif !

Votre maturité et votre sang-froid, notamment lors de la demie face à La Rochelle ont surpris…

… (il coupe) C’est quelque chose que je travaille avec l’ancien boxeur Faisal Arrami, qui m’aide beaucoup sur l’approche de ce genre d’événements. Il a été très présent à mes côtés, durant ces dernières semaines. Il a aidé Frédéric Michalak et travaille aussi avec Sébastien Tillous-Borde et Mathieu Bastareaud.

Nous avons commencé à échanger à partir de la deuxième partie de saison. Il m’aide à appréhender mes matchs mentalement. Se servir positivement du stress que génère le sport de haut niveau. Cela se passe sous forme d’entretien au téléphone ou en direct. Il m’apporte beaucoup, il m’aide à avoir confiance en mes moyens. Couplé au travail quotidien des entraînements, cela crée une belle alchimie.

Cela vous a-t-il permis de ne pas cogiter lorsque Mike Ford vous avez mis à l’écart du groupe ?

J’ai fait les montagnes russes cette saison. Diego Dominguez comptait sur moi, Mike Ford moins, et Cockerill m’a relancé. Je n’ai jamais douté, ni relâché mes efforts. Il y a eu beaucoup de changements et de perturbation au niveau de l’équipe. C’était aussi difficile pour Mike Ford, qui est arrivé en cours de route, de faire confiance à un jeune, surtout à ce poste-là. Je ne lui en ai pas voulu, j’ai continué à bosser dans mon coin en espérant que cela s’ouvre à nouveau pour moi.

Le RCT est-il une bonne école pour un jeune joueur ?

À Toulon, j’ai énormément appris au contact des pros. J’ai perçu vite, qu’à mon poste, il faut savoir se prendre en main. Ne pas se contenter du travail collectif, mais se rajouter des séances individuelles techniques et tactiques. Collaborer avec Jonny Wilkinson m’a été bénéfique. À Toulon, j’ai la chance de m’entraîner depuis trois ans, avec les plus grands joueurs. Je bosse mon jeu au pied avec Halfpenny, mes passes avec Trinh-Duc, Bastareaud ou Nonu. J’avais Giteau comme coach ! Tu te dois d’apprendre à leurs côtés ! Je tiens aussi à citer Guilhem Guirado. Après le drop victorieux à Marseille, il est venu me voir dans les vestiaires pour me féliciter mais aussi m’apporter son expérience. Il m’a dit de savourer l’instant mais de garder la tête sur les épaules. Que des finales, on n’en vit pas tous les jours. Il m’a conseillé de rester concentré dans ma bulle, de ne pas trop regarder ou lire ce qui se disait sur moi.

La saison prochaine vous évoluerez où finalement ?

À Toulon. C’était mon premier choix. À un moment donné, je me suis posé la question de partir pour grappiller du temps de jeu. Finalement, les circonstances ont fait que je ne vais pas être prêté, et je vais rester à Toulon. Il y aura une grosse concurrence, mais cela va me tirer vers le haut. Mon challenge, c’est d’être régulier sur une saison. Être capable de maintenir un certain niveau de performance.

Appréhendez-vous le fait d’être entraîné par Fabien Galthié, entraîneur réputé exigeant pour les joueurs de la charnière ?

Je ne le connais pas du tout. Il s’est dit beaucoup de choses sur lui, mais je vais attendre de faire sa connaissance avant de donner une éventuelle opinion. Une chose est sûre, partout où il est passé il a eu d’excellents résultats et les joueurs qu’il a coachés ont progressé ; j’espère que ce sera aussi le cas pour nous.

Qu’avez-vous appris cette année ?

Qu’au très haut niveau, tout va très, très vite. Dans un sens comme dans l’autre et notamment en dehors du terrain. Malgré une saison difficile, nous avons prouvé que sur les deux derniers mois, nous avions une grosse force de caractère qui nous a envoyés en finale.

« À Toulon, j’ai la chance de m’entraîner depuis trois ans, avec les plus grands joueurs. Je bosse mon jeu au pied avec Halfpenny, mes passes avec TrinhDuc, Bastareaud ou Nonu. J’avais Giteau comme coach ! »