Midi Olympique

LES MÈTRES ÉTALONS

ENCORE TROP INOFFENSIF­S DANS LES CINQ DERNIERS MÈTRES, LES BLEUS SAVENT DEVOIR FRANCHIR UN CAP POUR RIVALISER AVEC LES MEILLEURS. MAIS COMMENT Y PARVENIR DÈS SAMEDI ? PREMIÈRES PISTES…

- Par Nicolas ZANARDI, envoyé spécial nicolas.zanardi@midi-olympique.fr

Ce n’est pas un scoop, loin s’en faut. Plutôt une étrange réalité dont le XV de France, après sa fin de Tournoi épique face au pays de Galles, pensait s’être affranchie : son manque de maîtrise dans les zones de marque. Certes, l’essai de Damien Chouly, inscrit après deux minutes d’arrêts de jeu, pouvait être perçu comme la marque d’une équipe enfin capable de garder ses nerfs dans une situation brûlante. Mais une autre analyse, moins partisane, pouvait consister à penser que si les Bleus avaient eu besoin de vingt minutes pour franchir la ligne, c’est précisémen­t parce que leur maîtrise technique n’est pas encore franchemen­t au point… Et que hormis un Baptiste Serin souvent décisif dans cette portion du terrain (remember sa chistera face aux Blacks, ou sa judicieuse feinte de passe samedi dernier) les Français manquent cruellemen­t d’inspiratio­n et, pour tout dire, de technique

individuel­le pour effectuer ce dernier mètre… « Nous sommes peut-être l’équipe qui franchit le plus au niveau mondial, mais aussi une de celles qui marque le moins d’essais, râlait la semaine dernière Gaël Fickou. C’est ce qui nous sépare des meilleurs, et c’est en premier lieu une question de mental. On doit parvenir à être à la fois plus concentré et relâché près de la ligne adverse. Parce que dans les cinq mètres, on doit être encore plus organisé et précis que dans n’importe quelle zone du terrain. Ici, la défense monte beaucoup plus vite, de manière beaucoup plus agressive. » « La semaine dernière contre les Springboks, nous sommes retombés dans nos travers quasiment à chaque fois que nous sommes arrivés près de la ligne d’en-but, prolongeai­t Jefferson Poirot. Sur l’action où Gaël Fickou arrive à deux mètres de l’en-but, on gère mal la situation. Au lieu d’être fois et précis, on balance une mauvaise passe, un mauvais coup de pied… C’est exactement sur ce type d’actions-là que l’on doit gagner en précision, notamment au niveau des avants. »

LA CLÉ DES « BUMP PASS »

En effet, aujourd’hui, la clé du rugby moderne réside dans la maîtrise technique des avants, leur capacité à se passer le ballon sous pression au sein des sacro-saintes « cellules », désormais universell­es, censées permettre de digérer la pression imposée par la défense sur les bordures des rucks. Un secteur dans lequel les avants tricolores n’ont pas été capables de hisser leur niveau face aux Springboks, préférant se rassurer par des percussion­s frontales plutôt que de passer par une passe supplément­aire. « La grosse

différence entre les Springboks et les Bleus samedi dernier, c’est que les avants sud-africains se sont montrés plus efficaces dans ce qu’on appelle les « bump pass », cette capacité à donner soit le ballon à hauteur, soit dans le dos pour un trois-quarts, nous confiait le responsabl­e des skills des Natal Sharks AB Zondagh. C’est lorsque vos avants sont parvenus à créer du lien avec les trois-quarts que vous nous avez posé le plus de danger. Le problème, c’est que vous avez trop peu utilisé cette option. » Et pourtant, cela était prévu…

« Il y a eu des approximat­ions, des maladresse­s, de l’impatience près des lignes, constatait le responsabl­e du secteur offensif Jeff Dubois.

C’est d’ailleurs quelque chose qui me chagrine, car nous avons travaillé dans la semaine certaines choses que nous n’avons pas vues sur le terrain. » Probableme­nt, tout simplement, parce que les avants bleus n’ont pas tous la dextérité pour les mettre en place en situation de match…

UN JEU AU PIED À MIEUX MAÎTRISER

Toutefois, il serait injuste de faire peser sur les seuls avants le manque d’efficacité offensive. Car les trois-quarts, évidemment, ne sont pas exempts de reproches. Notamment de par la tendance de la charnière à privilégie­r le large-large, quand un jeu plus direct

aurait parfois été préférable. « Nous ne sommes pas tombés sur une défense très agressive comme nous nous y attendions. Face à ce mur qui cherchait surtout à combler les décalages, nous avons fait beaucoup de large-large un peu stérile. D’ailleurs, la seule bonne action que nous avons réussie en première mi-temps, c’est comme par hasard celle où nous avons réussi à alterner les formes de jeu, à agresser la ligne d’avantage avant d’envoyer le ballon plus au large. Je regrette qu’on ne l’ait pas fait plus souvent, car j’ai l’impression que l’on s’est parfois fait des passes pour faire des passes. » En exploitant mal, qui plus est, les solutions qui existaient dans le dos du premier rideau springbok, point faible d’une défense au sein de laquelle l’arrière n’hésite jamais à monter dans la ligne, laissant au seul ailier côté fermé la responsabi­lité de couvrir le champ profond. « On a essayé à plusieurs reprises de déposer le ballon dans leur dos, soulignait Dubois. Mais pour que cela soit efficace, il faut le réaliser dans de bonnes conditions, viser les bonnes zones, avec de la vitesse et de la précision. Maintenant que nous avons l’expérience de ce match, nous allons travailler pour gagner en précision et essayer d’exploiter ces espaces. » À charge, notamment pour François Trinh-Duc, de trouver les bonnes options, comme Camille Lopez y était d’ailleurs parvenu contre le pays de Galles en clôture du Tournoi, sur l’essai de Rémi Lamerat...

 ?? Photo Icon Sport ?? Gaël Fickou et les Tricolores ont du mal à finir leurs actions, une fois arrivés dans la zone des 5 mètres adverse.
Photo Icon Sport Gaël Fickou et les Tricolores ont du mal à finir leurs actions, une fois arrivés dans la zone des 5 mètres adverse.

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