Midi Olympique

Premier défi face aux « Blacks »

POUR VAINCRE LES CHAMPIONS DU MONDE, LES « TOURISTES » ONT FOMENTÉ UNE ÉTONNANTE STRATÉGIE. LA VOICI…

- Par Marc DUZAN, envoyé spécial marc.duzan@midi-olympique.fr

L’un crée, l’autre détruit. La Nouvelle-Zélande porte le rugby d’attaque vers des sphères nouvelles quand les Lions souhaitent simplement piétiner la poésie qui se dégage du jeu de ligne des All Blacks. Et à chaque pas en avant que font les « touristes » vers leur ambition de gagner cette série de Tests, le rugby fait deux pas en arrière. C’est un fait : la plupart d’entre-nous préfère la balle ovale lorsqu’elle est pratiquée par la Nouvelle-Zélande mais, au printemps 2017, la belle n’a jamais semblé autant en danger. Parce que les Lions ont un plan, messieurs dames. Et de ce que l’on en sait, il ne fera grimper aux rideaux que les puristes. « Quand j’entraînais le Japon, se souvient le sélectionn­eur anglais Eddie Jones, nous avons affronté les Maoris à deux reprises. Au premier match, j’ai dit : « ok les gars, on va jouer tous les ballons et leur faire tourner la tête ». Ils nous ont battus 60 à 15. La semaine suivante, j’ai dit aux joueurs : « on oublie les longues séquences et, dès le premier temps de jeu, on joue au pied et on chasse ». Nous n’avons perdu que d’un point (19-18). » Victime de son propre succès, la Nouvelle-Zélande a maintes fois été copiée, plagiée, pompée par ses concurrent­s les plus sérieux. Les Springboks ont abandonné le culte de la force qui faisait leur gloire et tenté de défier les All Blacks sur leur terrain. Ce fut un échec retentissa­nt. Gatland ? Il est l’an passé tombé dans le même piège que Heyneke Meyer en son temps et, la seule fois où les Gallois ont essayé de déborder les champions du monde plutôt que de les écraser dans l’axe, ils se sont lourdement inclinés. Trois fois de suite, pour être clair… La vérité reste que personne ne peut battre les All Blacks lorsque le jeu est rapide, pire, lorsqu’il est déstructur­é. Et si Rob Howley a cette année moins de poids dans le staff des Lions, c’est avant tout parce que les rêves de « chaos rugbystiqu­e » de l’ancien demi de mêlée gallois ne sont pas compatible­s pas avec l’ambition minimalist­e de l’équipe multi-ethnique menée par SamWarburt­on, en Nouvelle-Zélande.

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Steve Hansen et Wayne Smith ont donc créé l’une des plus grandes équipes de l’histoire du rugby et dans le but de bat- tre les champions du monde, les Lions doivent en atteindre l’extrême opposée, via des mauls pénétrants censés percer le coeur de la défense des All Blacks, la surutilisa­tion des 114 kg de Ben Te’o dans la zone du fluet Beauden Barrett ou l’abus assumé, par le prisme d’une charnière aux pompes d’argent (Owen Farrell et Conor Murray), du jeu au pied d’occupation. À l’aune du premier test et à la lumière des sept premiers matchs de cette tournée, on est en droit d’affirmer qu’aucun des Lions de Gatland ne possède ainsi tant de talent que dans le défi individuel, le duel défensif, le coup de pompe et la conquête directe. Qu’on le veuille ou non, les touches et les mêlées restent le coeur du jeu. Celui qui les maîtrise contrôle aussi le tempo du match. Celui qui contrôle le tempo de la rencontre se met à l’abri du feu d’artifice néo-zélandais.

En somme, il n’y a qu’un seul salut possible pour les Lions britanniqu­es : prendre les Tout Noir à l’européenne, à la sauvage ou même en mode Top 14, serait-on tenté de dire. « Tape loin et chasse en meute », souriait même à ce sujet Gatland, lorsqu’on lui demandait jeudi matin quel était son idéal de jeu. Et pourquoi pas, après tout ? Les Lions de 1971 vainqueurs de leurs trois tests en Nouvelle-Zélande n’avaient-ils pas marché sur leur ancienne colonie par la grâce d’un pack de golgoths et du coup de pied de Barry John ? Plusieurs décennies plus tard, les petits-enfants de Gareth Edwards et Carwyn James se raccrochen­t à une évidente appétence pour l’art de la guerre afin de tenter de réussir où ils échouent depuis quarante-cinq ans. Rien ne dit qu’ils parviendro­nt à leurs fins. Rien ne dit non plus qu’ils passeront à l’Eden Park, comme les malheureux Samoans avant eux (73-10), pour une brave équipe de pub…

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Photo Icon Sport Les Lions, à l’instar de Liam Williams, devront grâce à des mauls pénétrants percer le coeur de la défense des All Blacks pour espérer vaincre les champions du monde.

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