MORT D’UN CHIC TYPE
ÉRIC MELVILLE, L’ANCIEN FORMIDABLE NUMÉRO 8 D’HAGETMAU, MONT-DE-MARSAN ET TOULON A SUCCOMBÉ, DANS LA NUIT DE DIMANCHE À LUNDI DERNIER, À UN INFARCTUS FOUDROYANT. IL N’AVAIT QUE 55 ANS.
Comme beaucoup de Sud-Africains, il avait un nom bien français qui fleurait bon la littérature et le cinéma. On a beaucoup dit, depuis l’annonce, lundi dernier, de son décès, à l’âge de 55 ans, combien Éric Melville était un homme attachant, souriant, affable, généreux. Il me semblait la tendresse même sous cette écorce de guerrier au long cours, cette gueule de boucanier sentimental aux yeux d’un bleu de lait. Je crois ne l’avoir jamais entendu dire du mal de quiconque et se départir, en toutes circonstances, des polémiques et des excès en tous genres que notre sport ne manque jamais d’entretenir. Il y avait en lui une pente spirituelle qui faisait son charme. On a moins dit, me semble-t-il, à quel point Éric était un formidable joueur, passé par Hagetmau et Mont-de-Marsan, avant de se rendre à Toulon, où, sous la férule de Daniel Herrero d’abord, de JeanClaude Ballatore ensuite, il allait devenir deux fois champion de France, en 1987 et 1992. La puissance dévastatrice de ses charges, l’abattage qu’il manifestait en tout, ses qualités de sauteur même, son courage infini, en firent l’un des plus beaux troisième lignes qu’ait pu compter le rugby français. International à six reprises seulement, sous l’ère de Jacques Fouroux, puis de Daniel Dubroca et de Jean Trillo, il aurait dû l’être plus souvent sans une naturalisation française tardive et sans une double hernie cervicale qui le freina dans ses ambitions. Il devint entraîneur plus tard, à Oyonnax, d’abord, à Grasse en 2007, à Dijon en 2010 et enfin à la tête de l’équipe nationale Suisse depuis octobre 2016, comme on espère prolonger un tant soit peu une passion de jeunesse.
Mais tout cela compte pour si peu aujourd’hui et semble même si parfaitement dérisoire au regard de cet infarctus qui vient de la faucher, contre toute attente, contre toute justice. Un arbre qu’on abat. Un chic type qui nous quitte. Et nous voilà atterrés, incrédules.
Toutes nos pensées vont aujourd’hui, vers sa femme Renée et ses enfants, Karine, Candice et Daniel, pareillement privés d’un mari et d’un père exemplaire. Il arrive que la vie, parfois, soit aussi incompréhensible que désespérante.