Midi Olympique

« Que Montpellie­r soit craint »

LOUIS PICAMOLES - Troisième ligne du Montpellie­r DE RETOUR À MONTPELLIE­R, L’INTERNATIO­NAL DÉCOUVRE UN NOUVEAU CLUB, AVEC DE TRÈS GROSSES AMBITIONS MAIS INSISTE SUR LE FAIT QUE POUR RÉUSSIR, IL FAUDRA D’ABORD QUE LE VESTIAIRE TROUVE UNE VÉRITABLE COHÉSION.

- Propos recueillis par Pierre-Laurent GOU pierre-laurent.gou@midi-olympique.fr

Comment avez-vous retrouvé le MHR, huit ans après l’avoir quitté ?

Je n’étais pas perdu car les installati­ons n’avaient pas changé d’adresse (rires) ! J’avais évolué deux ans à l’Altrad Stadium, donc j’ai retrouvé le même vestiaire et mes marques. Depuis que je suis parti, le club a énormément changé. Montpellie­r était un « petit club », nous nous battions pour conserver notre place dans l’élite, aujourd’hui le club est très ambitieux et joue les phases finales chaque saison. Le MHR a changé de dimension.

Pensez-vous devoir vous intégrer comme pour n’importe quelle autre recrue ?

Absolument, de plus j’ai repris tardivemen­t et jusqu’au stage de Font-Romeu, je m’entraînais en marge du groupe. Je suis encore dans une phase d’adaptation. Le fait de connaître la maison m’a aidé. Je n’ai pas l’impression de repartir complèteme­nt de zéro comme ce fut le cas quand j’avais signé au Stade toulousain ou à Northampto­n la saison passée. Je retrouve mes habitudes, je connais bien les lieux, même si le groupe de joueurs a considérab­lement évolué depuis mon départ ! Toutefois, le premier jour, je n’avais pas la pression de la rentrée des classes comme quand tu changes de club.

Avez-vous repris votre place dans le vestiaire ?

Il n’a pas changé et je me suis retrouvé dans la même zone. Bon, mon casier d’alors était déjà occupé mais ce ne sont pas des choses auxquelles j’attache de l’importance. J’ai toujours « Fufu » à mes côtés ! C’est génial de se retrouver de nouveau ensemble à 30 ans.

Quelles sont vos ambitions personnell­es ?

Poursuivre ma progressio­n. J’ai la sensation d’avoir franchi un palier l’an dernier à Northampto­n ; notamment dans l’approche de mon sport. J’aimerais être encore un meilleur joueur sur le terrain, prendre un maximum de plaisir.

Et d’un point de vue collectif, quel est l’objectif ?

Il y a eu à Montpellie­r un très gros recrutemen­t, avec des joueurs d’expérience, aux CV bien fournis, notamment à des postes clés. C’est sûr qu’une charnière PienaarCru­den sur le papier, c’est très prometteur. Il va y avoir beaucoup d’attente sur notre équipe en termes de résultats et de qualité de jeu. Le MHR s’est donné les moyens de rivaliser avec les meilleurs, de jouer le très haut du tableau du Top 14. Toutefois, il y a eu, à l’intersaiso­n, beaucoup de mouvements et il faudra que l’osmose se crée. Parce qu’aligner des très bons joueurs sur une feuille de papier n’a jamais été un gage de réussite pour former une grande équipe. Sans la cohésion de tout un vestiaire, tu ne vas pas très loin.

Justement, l’an dernier, le groupe du MHR était scindé en deux et ceci expliquera­it aussi le fait que, malgré tous les moyens dépensés, le Montpellie­r version Jake White n’a jamais atteint la finale de Top 14…

Il faut des joueurs de grande qualité, je le répète car sans ça, tu ne peux rien espérer. Quand nous avons remporté des titres avec le Stade toulousain, c’est d’abord parce que le groupe possédait de grandes qualités rugbystiqu­es, mais c’est aussi parce qu’au niveau humain il y avait une réelle

cohésion. Chacun avait le respect de ses partenaire­s. Et dans les moments difficiles, c’est cela qui fait la différence, qui te permet d’aller chercher des résultats alors que la situation est compromise. Dans un vestiaire, tous s’aimer, c’est impossible ! Aujourd’hui, un effectif de club du Top 14, c’est au moins 40 joueurs. Tu ne peux pas apprécier tout le monde. Le but, c’est de se comprendre les uns et les autres et d’adhérer au jeu proposé par le staff.

Est-ce l’un des défis de cette intersaiso­n pour Montpellie­r ?

Cela va sûrement mettre un peu de temps pour se mettre en place. Il faut que chacun apprenne à se connaître et c’est l’une des raisons du stage de cette semaine à Font-Romeu. Et plus on va travailler ensemble, plus l’équipe va monter en gamme. Il faut arriver à ce que tous les mecs qui jouent, chaque week-end, s’entendent et soient « connectés » sur le terrain. Après, dans la vie, tu n’y arriveras pas complèteme­nt mais il faudra quand même qu’il y ait une certaine connivence entre tous.

Montpellie­r va jouer avec l’étiquette de favori quasiment chaque week-end. Appréhende­z-vous ce statut ?

Quand j’évoluais avec Toulouse, nous avions un peu ce statut de par l’histoire du club mais aussi et surtout ces résultats. C’est comme le RCT aujourd’hui. Toulon, ce n’est pas qu’un effectif, c’est une formation qui, depuis cinq, six ans, va en finale chaque année. Le CV des joueurs ne fait pas tout. Alors plus que l’étiquette de favori, j’aimerais que l’on soit craint et respecté par les autres formations. Et pour cela, il faut remporter des rencontres. Tu dois en imposer par tes résultats. Prenons l’exemple des Rochelais l’année passée. Ce n’était pas forcément l’effectif le plus pompeux mais, au bout de quelques semaines, ils étaient craints par tout le Top 14 car ils avaient démontré qu’ils étaient capables de gagner n’importe où. C’est cela le bon exemple. Nous savons qu’en raison du recrutemen­t, nous allons être attendus en début de saison mais il ne faut pas se focaliser là-dessus. Écrivons notre propre histoire sur la pelouse.

Le MHR est-il « condamné » à se qualifier pour les demi-finales du Top 14 compte tenu du recrutemen­t effectué ?

Nous n’aurons pas le droit à 10 000 jokers dans la saison au niveau de nos résultats. Nous nous devons d’avoir de l’ambition. L’objectif doit être de postuler pour les phases finales. Après, quand tu es qualifié, tout est possible, d’être en demi-finale ou plus. C’est à nous de réaliser durant la saison le travail nécessaire pour être présent dans les six. Arriver à monter en puissance tout au long de l’année.

Qu’avez-vous appris de cette année à Northampto­n ?

L’approche des événements. La mentalité de travail anglo-saxonne est foncièreme­nt différente de ce que j’avais connu jusque-là en France, au niveau de la méthode d’entraîneme­nt où tout est individual­isé, et de l’état d’esprit. Les Anglais sont plus zens. Ils sont capables de se faire très mal aux entraîneme­nts. Les joueurs s’infligent individuel­lement de très grosses charges de travail. Je crois être devenu plus rigoureux sur ce point de vue là. Du coup, avec cette sensation d’avoir tout donné dans la semaine, je ne sais pas si c’est lié, mais en cas de défaite, ils ne ressassent pas des jours et se projettent sur le match suivant en se remettant très vite au travail. Ils passent vite d’un événement à l’autre. De ce point de vue, j’ai beaucoup appris.

Comment se passent ces premières semaines de travail sous la conduite de Vern Cotter ?

Jusqu’au stage de FontRomeu, je ne l’ai pas trop côtoyé car, comme tous les internatio­naux français, je suis le programme de préparatio­n mis en place par le staff des Bleus. J’avais beaucoup échangé avec Vern Cotter au moment de mon transfert. Nous avions discuté. Il m’avait fait ressentir qu’il voulait vraiment que je revienne ici. Après, son CV parle pour lui, que ce soit avec Clermont ou avec l’Écosse.

Venons-en à l’équipe de France. Que retenir d’une tournée en Afrique du Sud marquée par trois lourdes défaites ?

J’ai mis quelques jours à mon retour pour digérer ces résultats. Nous avions d’autres intentions en partant. Ces trois défaites nous ont fait très mal mais ce que j’ai appris en Angleterre, c’est qu’on ne reviendra pas en arrière. Il faut passer à autre chose. Les tournées d’été, je commence à en avoir fait quelques-unes. À chaque fois, ce sont les mêmes problémati­ques qui se posent. Chacune possède son lot de surprises et de remise en question à la fin. Le rugby français est en train de se poser les bonnes questions. Nous joueurs, ce que l’on maîtrise, c’est notre travail individuel et c’est là-dessus que l’on doit se focaliser.

Comment vivez-vous une première intersaiso­n à dix semaines ?

C’est hyperbénéf­ique pour les joueurs qui peuvent en profiter, mais ce n’est qu’une première étape. Il ne faut pas croire que c’est « LA » solution à tous les maux. Je l’ai déjà vécue l’an passé avec Northampto­n, tu progresses vraiment en termes physiques. Je l’avais ressenti tout au long de la saison. Ce qui change vraiment, c’est que l’été, tu ne travailles plus dans l’urgence. Tu n’as plus à penser à reprendre le plus rapidement possible. Nous avons le temps de nous préparer.

« Dans un vestiaire, tous s’aimer, c’est impossible ! Aujourd’hui, un effectif de club du Top 14, c’est au moins 40 joueurs. Tu ne peux pas apprécier tout le monde. » Louis PICAMOLES Numéro 8 de Montpellie­r

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