LE DÉFI DE COTTER
D’UN EMPILEMENT DE STARS, VERN COTTER DOIT FAIRE UNE ÉQUIPE. BONNE NOUVELLE : C’EST CE QUE PRÉFÈRE LE MANAGER NÉO-ZÉLANDAIS.
De son propre aveu,Vern Cotter est un bâtisseur. Du moins, c’est ainsi qu’il se conçoit et qu’il a pensé son parcours, jusqu’à la cité montpelliéraine. À Clermont, d’abord, où il a repris un club certes fortuné, mais empêtré dans ses mauvais choix. Et qu’il a stabilisé, construit et fait grandir. Plus que le titre de 2010, apogée de son passage en Auvergne, c’est la régularité qu’il a apportée à ce club qu’il laissera en héritage : l’ASMCA s’est qualifiée pour les phases finales de Top 14 lors des huit années qu’il passa à sa tête, pour sept demi-finales et quatre finales. Difficile de faire mieux.
LA MÉTHODE, LES STARS EN PLUS
À Montpellier, les moyens humains sont évidemment sans commune mesure avec ce qu’il a connu à son arrivée à Clermont. Cotter a actuellement sous ses ordres une pléiade de joueurs internationaux confirmés (Bismarck et Jannie Du Plessis, Louis Picamoles, Fulgence Ouedraogo, Ruan Pienaar, Aaron Cruden, François Steyn, Nemai Nadolo et bientôt Jan Serfontein, entre autres). Mais la philosophie reste la même. « Quand Monsieur Altrad m’a appelé, j’ai eu une sensation de déjà-vu. Je me suis rappelé ma première conversation avec René Fontès, avant d’arriver à Clermont », nous confiait-il récemment. « Il y a un gros projet, dans un club qui ambitionne d’être champion de France pour la première fois. Cette idée de construction m’a plu ». La construction, toujours. C’est aussi ce qu’il retient de son expérience en Écosse, quand le rôle de sélectionneur laisse pourtant beaucoup moins de temps de vie commune au groupe. «J’ai récupéré un groupe qui était surtout habitué à jouer pour ne pas perdre. Et qui perdait souvent, malgré tout. Il a fallu construire un fonds de jeu mais surtout une culture qui en fasse une équipe ambitieuse, qui aspire à gagner. On a beaucoup bossé sur ce dernier point : la confiance ». Pour souder sa sélection écossaise avant la Coupe du monde, générer du lien et du liant, pour faire lever la pâte, Vern Cotter avait emmené tous ses hommes en stage dans les Pyrénées, à la dure. Il a récidivé, cet été, avec son groupe montpelliérain.
PICAMOLES, LE SYMBOLE D’UNE NOUVELLE POLITIQUE
Des stages de présaison aux rencontres amicales, Cotter a débuté l’été avec une équation insolvable en mathématiques, réalisable quand l’humain est la matière première : 3+1 peut-il être égal à 1 ? À Montpellier avant son arrivée, le vestiaire du MHR se décomposait en trois groupes : les SudAfricains, les « autres » étrangers et les Français. En ajoutant Cotter et son staff, le président Mohed Altrad a espéré faire de cet empilement une masse homogène et dense. Pour réussir ce pari, Cotter a choisi, avec soin, ses leaders de vestiaire, donc de vie. « Il y a plusieurs gardiens du temple, des garants de l’esprit montpelliérain et qui doivent gérer sur le terrain mais aussi en dehors. Il faut des profils transversaux, différents pour incarner tout le groupe. On parle de gens comme Fulgence Ouedraogo, Bismarck du Plessis qui est très respecté par le vestiaire, Benoît Paillaugue, Louis Picamoles ou Kélian Galletier, qui doit amener avec lui toute la jeune génération ». Le capitanat accordé à Picamoles pèse lourd, dans la balance de ses choix symboliques : enfant du club, parti vers d’autres cieux et revenu au club auréolé du statut de joueur confirmé à l’international. On trouve à travers lui l’ambition sportive du club, mais aussi celle de lui redonner une identité française et même montpelliéraine. Les ingrédients d’une cohésion qui prend forme.