LE DILEMME DE LESGOURGUES
LA SITUATION DU DEMI DE MÊLÉE BORDELAIS N’EST PAS FACILE. IL N’A PAR ENCORE RÉVÉLÉ DE QUOI SON AVENIR SERA FAIT. MAIS EN L’ABSENCE DE SERIN, IL SERA BIEN AUX COMMANDES DE L’UBB SAMEDI.
Yann Lesgourgues se doutait bien qu’il serait au coeur de l’actualité de cette troisième semaine de septembre. Déjà parce que la commotion de Baptiste Serin à Lyon rend incontournable sa titularisation face à Montpellier, la bête noire de l’UBB depuis 2011. Il sera aux affaires pour ce match crucial car si l’UBB crée l’exploit, le début de saison basculera du côté lumineux.
Le demi de mêlée formé à Ondres (Landes) et à Biarritz savait aussi qu’il était au coeur de toutes les conversations des fans de rugby bordelais. Il n’a pas prolongé son contrat avec le club et plus personne n’ignore qu’il est devenu une cible prioritaire du RCT de Mourad Boudjellal qui en ferait sans doute son demi de mêlée numéro un, avec tout ce que cela comporte.
Lundi, il est venu s’expliquer avec un certain cran devant la presse. L’atmosphère était forcément spéciale et il se doutait bien qu’une certaine question fuserait : « Prolongation ou pas prolongation ? ». La réponse fut lapidaire : « joker ! ».
LES CONTRADICTIONS DU PROFESSIONNALISME
Même le plus intransigeant des supporters bordelais comprenant son dilemme, un concentré de toutes les problématiques du professionnalisme des années 2010.Yann Lesgourgues est sincèrement attaché au club et à la région. Mais il a la « malchance » (relative) de cohabiter sous le maillot girondin avec un autre as du poste de demi de mêlée : son cadet de trois ans Baptiste Serin et ses treize sélections. La situation est particulièrement tortueuse car il ne fait aucun doute que Yann Lesgourgues est lui aussi très près du maillot bleu et ce ne sont pas des suppositions de journalistes. En Afrique du Sud en juin, Guy Novès avait spontanément cité son nom, ce qui n’arrive pas si souvent : « Vous me parlez d’un retour possible de Parra ? Je vous réponds Lesgourgues, je l’ai observé avec les Barbarians, il pourrait nous apporter la vitesse qu’il nous manque. » Une place de numéro un lui ouvrirait forcément des portes. On imagine les sentiments qui ont alors submergé le demi de mêlée de 26 ans. Une joie forcément mêlée d’une inquiétude. Comment gérer une telle situation ? Également du point de vue du staff de l’UBB d’ailleurs. Yann Lesgourgues, c’était la solution parfaite pour combler les absences d’un Serin retenu par la sélection, soit une dizaine de matchs par saison. À l’échelle d’une rencontre moyenne de Top 14, les deux talents sont équivalents. Si Yann Lesgourgues devenait international, la situation serait vraiment inédite, deux demis de mêlée du même club sélectionnés en même temps…
Dans son for intérieur,Yann Lesgougues a sans doute déjà pris sa décision mais lundi, il ne s’est pas épanché sur son cas personnel. Il a tenu à s’exprimer en leader de jeu d’un outsider qui va défier le nouvel épouvantail du championnat. Après tout, c’est ce qui fait le sel de la carrière d’un joueur de premier plan, sortir une grande performance alors qu’on se pose des questions sur son avenir, c’est le signe qu’on est un joueur supérieur. C’était sans doute le sens qu’il fallait donner à son intervention médiatique, finalement émouvante tant elle exprimait les contradictions et les contraintes qui peuvent saisir un joueur professionnel. Au-delà de la teneur de ses propos, on a compris que samedi à 18 heures, il sera clairement aux commandes du navire bordelais. « Montpellier sera un gros défi, il faudra être conscients de nos atouts face à ces gabarits impressionnants. On ne cherchera pas à taper contre un mur, c’est sûr, alors nous utiliserons forcément l’arme de la vitesse. Oui, après la défaite face à Lyon, nous nous sommes parlé entre joueurs. Il fallait évacuer certaines choses, mais ça doit rester entre nous. Mais nous avons connu des moments positifs face à Clermont et face au Racing… »