La France peut-elle gagner ?
LES CAPITAINES DES CLUBS FRANÇAIS ENGAGÉS EN CHAMPIONS CUP SE SONT RETROUVÉS AU STADE JEAN-BOUIN POUR LANCER LA CAMPAGNE EUROPÉENNE. PHOTO DE CLASSE POUR DIMITRI SZARZEWSKI, JASON EATON, LOUIS PICAMOLES, DAMIEN CHOULY, SERGIO PARISSE, DUANE VERMEULEN ET M
Si le Toulon de Bernard Laporte est entré dans la légende en remportant le premier triplé de l’histoire de la Coupe d’Europe, une autre équipe présente aujourd’hui des rêves de grandeur. Successeurs directs du RCT dans la dynastie des rois d’Europe, les Anglais des Saracens ont déjà remporté les deux dernières Coupes d’Europe en jeu (s’adjugeant aussi, pour faire bonne mesure, un doublé avec leur championnat domestique en 2016).. Et rêvent ouvertement d’un troisième succès de rang, qui ferait d’eux l’égal des Varois devant l’histoire… Pour cela ? À l’image du RCT qui avait su bien négocier sa mue avec la retraite de Jonny Wilkinson, les Sarries ont su habilement se renouveler à l’intersaison. Pour faire face aux départs à la retraite de Kelly Brown, Jim Hamilton, Petrus du Plessis ou Neil de Kock ? Les Anglais ont su attirer dans leurs filets le guerrier de Northampton Calum Clark et le colosse australien Will Skelton, tout en promouvant deux jeunes de l’Academy, Kieran Longbottom et Tom Whiteley. Chris Ashton parti à Toulon ? Pas grave, les Saracens ont enregistré l’arrivée du Gallois Liam Williams, un des meilleurs joueurs lors de la tournée des Lions en Nouvelle-Zélande. Alors, ajoutez à cela les valeurs sûres que sont Christopher Tolofua et Dominic Day, lesquels apporteront un surplus de puissance au meilleur pack du Vieux Continent, et vous comprendrez un peu mieux pourquoi l’armada du talisman Maro Itoje fait figure de candidat légitime à sa succession…
GALTHIÉ : « ILS ONT DE L’AVANCE DANS LEUR APPRÉHENSION DU JEU »
Mais au-delà de ce recrutement aussi ciblé que maîtrisé, c’est surtout par leur culture de club et la maîtrise de leur jeu que les Sarries se posent aujourd’hui en référence. Car les deux, évidemment, vont de pair… Il n’y aurait en effet pas de rush defense sans wolfpack (cette culture inspirée de la la meute de loups, inculqué par l’entraîneur de la défense Paul Gustard), tout comme il n’y aurait pas le brio de Farrell ou Goode sans un cadre parfaitement maîtrisé par les moindres individualités. « Ils ont de l’avance dans tout ce qu’ils mettent en place, mais également dans leur appréhension du rugby, appréciait l’entraîneur du RCT Fabien Galthié,
observateur privilégié du jeu des Anglais ces dernières saisons. Ils donnent l’impression d’être pragmatiques et de chercher un rugby moins spectaculaire qu’efficace, alors qu’en réalité ils vont très vite dans le replacement parce qu’ils ont un cadre très formel, dans lequel ils peuvent se promener et surtout sortir. C’est la force de cette équipe et c’est le fruit, pour en avoir parlé avec Chris Ashton, d’années de travail. Chris m’a expliqué que quand tu es Saracens, tu sais par coeur ce que tu dois faire. Ils maîtrisent parfaitement leur cadre, et c’est pour ça qu’ils arrivent à en sortir aussi facilement. »
50 MILLIONS DE PERTES CUMULÉES DEPUIS DIX ANS
Alors, invincibles, ces Sarries ? Fort heureusement non, quand bien même leur dernière finale contre Clermont l’aurait laissé entendre. Reste que l’ASMCA n’a pas dit son dernier mot dans sa recherche du Graal européen, tout comme Toulon désireux de reconquête, sans parler de Montpellier pour qui Vern Cotter nourrit de grosses ambitions… Et l’on n’oublie pas bien sûr les Scarlets de Llanelli qui ont marché sur le Pro 12 la saison dernière, les éternels prétendants que sont les Irlandais du Leinster, du Munster et de l’Ulster, sans négliger les Écossais de Glasgow, ni bien sûr les champions d’Angleterre Exeter, voire les Wasps. Autant de concurrents désireux se payer un beau voyage du côté du stade San Mames de Bilbao le 12 mai prochain etde faire sus aux Saracens. Le coup de semonce ayant été, dans la semaine, lancé par le manager du Leinster Leo Cullen. « Les Saracens, il n’y a qu’à regarder les pertes qu’ils accumulent : cinq millions de livres, cinq millions, cinq millons, six millons, quatre millions... C’est pour cela qu’ils dominent le rugby européen depuis deux saisons. La concurrence est quelque part faussée, car ,ous avons notre manière de faire les choses, avec un modèle économique est viable. On ne peut pas contrôler ce que font les autres clubs, ni accumuler 50 millions de livres
(55 millions d’euros, NDLR) de pertes comme les Saracens. » Une première saillie à l’endroit du club de Nigel Wray, qui n’est pas sans rappeler ce qu’on a l’habitude d’entendre en Top 14 au sujet d’autres équipes. Lutte des classes ? Aigreur ? Jalousie ? Peut-être un peu des trois à a fois. Rien qui ne fait, finalement que renforcer le statut d’équipe à abattre des Saracens...