Midi Olympique

NADOLO N’A PAS SUFFI

MAINTENUS EN VIE PAR LE COLOSSAL AILIER FIDJIEN, LES MONTPELLIE­RAINS ONT ÉTÉ TROP PAUVRES, PAR AILLEURS, POUR ESPÉRER L’EMPORTER EN IRLANDE. LE POINT DE BONUS DÉFENSIF PARAÎT MÊME BIEN PAYÉ.

- Par Léo FAURE, envoyé spécial leo.faure@midi-olympique

Quand Nadolo vient, lancé dans la zone de son 10, on se demande bien ce qu’il se passe dans la tête de l’ouvreur adverse. « J’ai croisé quelques phénomènes dans ma carrière, mais je n’avais jamais vu ça. Il est comme indestruct­ible. C’est un surhomme, et d’une telle douceur à la fois » contait Vern Cotter, pendant l’été, quelques semaines après avoir croisé les 130 kilos du Fidjien pour la première fois. Avant de s’esclaffer : « Heureuseme­nt d’ailleurs qu’il est si gentil ! Tu imagines s’il était méchant, et que tu croises ce monstre à 3h du mat’dans une rue sombre ? » Cotter a toujours aimé disposer, dans son effectif, d’une arme de destructio­n massive. À Clermont, il avait lancé Nalaga, jusqu’à en faire l’ailier le plus prolifique d’Europe. C’était son jouet, son petit plaisir. C’était aussi la chance du joueur, aussi musculeux que frustre techniquem­ent, et dont la carrière a sombré en même temps que Cotter quittait l’Auvergne.

TOUT SAUF UN BOURRIN

En rejoignant Nadolo à Montpellie­r, le technicien néo-zélandais a frappé deux crans plus haut. Proche des lignes, le gabarit « Lomu » du Fidjien est léthale. « Des ailiers avec un tel gabarit, il ne peut en avoir qu’un. Il est chez nous, tant mieux pour nous » lâchait, admiratif, Yacouba Camara après la rencontre de samedi. Du Plessis relançait : « Ce mec a dévasté la défense tout l’après-midi. Mais il ne faut pas le résumer à ça. » Car Nadolo est aussi un véritable joueur de rugby, adroit dans les airs, capable de lire une défense et de lâcher une passe avant contact, si besoin. Un joueur qui est rapidement devenu l’attraction de la RDS Arena, samedi. Une sorte de match dans le match. À chaque prise de balle, une clameur s’emparait du stade. Chaque plaquage le mettant à terre était acclamé comme un essai. Celui de Robbie Henshaw, à la 57e minute, se jetant dans ses chevilles après avoir une première fois explosé au buste, déclencha une standing-ovation du public dublinois. Il n’y en aura qu’une seule autre : au terme du match, lorsque le Fidjien a fait le trajet vers la grande tribune pour remercier le public. Qui le lui a rendu en se levant pour l’applaudir.

MAIS NADOLO NE PEUT PAS TOUT FAIRE…

Le problème, c’est que Nadolo ne peut pas tout faire. S’il avait pu, les Montpellié­rains auraient sans doute gagné à Dublin. Ses deux essais, dans un registre de toute puissance, auront au moins permis aux Cistes de rentrer d’Irlande avec le point du bonus défensif, quand ils en avaient pris presque 60 l’an dernier sur la même pelouse (57-3). Mais le risque, avec un tel joueur, est de le sur-utiliser. Parfois, samedi, les Montpellié­rains ont donné cette impression. « Que voulez-vous ? Quand vous avez un tel joueur dans vos rangs, plus vous l’utilisez, mieux c’est ! » défendait Yacouba Camara à ce propos. Bismarck Du Plessis en dévoilait un peu plus sur la stratégie. « Sur ce match, les deux équipes ont évolué avec un jeune ouvreur. Les Irlandais, on l’a vu, ont cherché à mettre beaucoup de pression défensive sur Thomas (Darmon, N.D.LR.). En insistant avec Nemani dans la zone du 10, on cherchait à faire la même chose, à mettre de la pression sur leur jeune ouvreur. » Tout de même : si Nadolo monopolise systématiq­uement trois défenseurs sur chacune de ses prises de balle, il en fera de même s’il vient à être utilisé en leur. Ce qui ouvrirait des espaces, plus loin, pour les jambes de Tomane, Fall ou Mogg. Ce schéma, les Montpellié­rains ne l’ont jamais utilisé à Dublin. Un manque de créativité regrettabl­e, que l’absence de dernière minute du maître à jouer Aaron Cruden peut partiellem­ent expliquer. Sans idées et pris de vitesse par la jeune garde du Leinster, au coeur d’une première période franchemen­t pauvre, les Montpellié­rains ont alors versé dans le « tout pour Nadolo », servant le Fidjien dans toutes les positions, même les plus inconforta­bles. Lequel n’a pas pu, seul, masquer les carences énormes de son équipe dans le replacemen­t. Nadolo est peut-être un surhomme, mais il n’est pas un dieu.

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Photo icon Sport Le phénomène Nadolo continue à faire parler sa puissance mais face à la mainmise des Irlandais, ce fut insuffisan­t

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