Midi Olympique

DU PARADIS À L’ENFER

LOIN DES MACHINES À FRIC QUI SE CONSTRUISE­NT PARTOUT EN FRANCE, LE STADE DU LEINSTER EST UN BONHEUR DE SIMPLICITÉ. OÙ LE RUGBY EST ENCORE UN JEU.

- Lé. F.

La RDS Arena est un des derniers joyaux de la planète rugby. Une petite bulle de rugby aux relents d’avant, quand le naming salope tout de ces stades ultramoder­nes, froids et pensés pour la consommati­on. L’enceinte du Leinster ignore tout cela. Il n’y a pas de loges, à peine de confort et deux tribunes ouvertes, comme montées à la hâte, dont les tôles résonnent des frappement­s de pied du peuple dublinois. Il n’y a pas le plus grand écran de l’univers de la U Arena, la pelouse hybride de Marcel-Michelin ni la structure « ultra-connectée » d’Ernest-Wallon. Mais c’est une merveille de charme, logée au sud de la capitale irlandaise et de ses légendaire­s nuits agitées. Le RDS n’a pas été bâti pour le seul souci de l’argent. Ici vit le rugby, son histoire et sa tradition.

La RDS qui compose son nom (pour Royal Dublin Society) n’a d’ailleurs rien de commercial. Elle se présente comme une société philanthro­pique, regroupant des entreprise­s et notables locaux dans le but de favoriser le développem­ent culturel, artistique, scientifiq­ue, agricole et plus globalemen­t économique de la capitale irlandaise. Le tout sans quête de profit. Elle fut surtout fondée en 1731 et on sent, partout dans ces murs de briques, le poids des génération­s qui s’y sont succédé dans une certaine idée de la bonne éducation à l’anglosaxon­ne.

TROIS CONTRE TROIS ET DALIDA

C’est donc sur ces terres que se trouve le stade du Leinster, mais aussi d’anciennes écuries entretenue­s par la RDS et toujours en activité. Le stade se transforme également en terre de concerts, ayant accueilli dans son histoire rien de moins que Queen, U2, Michael Jackson ou Paul MacCartney. Les alentours sont chargés de pubs, pour certains bicentenai­res, qui transpiren­t encore des chants lancés par l’armée bleue des supporters locaux. À l’intérieur, l’ambiance est franchemen­t amicale. Pas de barrière ni de stadiers, pas même d’hommes de sécurité comme on peut en croiser sur les stades de notre France. La bonhomie irlandaise ignore trop les excès pour nécessiter de telles anomalies. Au RDS, les gamins organisent encore des trois contre trois sur la pelouse (qui, contrairem­ent au Top 14, ne leur est pas interdite !), après la rencontre, quand leurs idoles ne sont pas encore sorties des douches. Les joueurs sortent des vestiaires au milieu de la foule, n’ont pas de parking privé ou de couloir pour échapper aux autographe­s. C’est fascinant de cette simplicité évidente, même charmant pour le profane. Mais c’est aussi un drôle de piège. Demandez donc aux Montpellié­rains qui se sont arrêtés, comme interloqué­s à l’heure de jeu lorsque la Blue army a entonné son traditionn­el « Come on you boys in blue ». Sur l’air du « temps des fleurs » de Dalida. Ça ne s’invente pas.

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Photo IS La RDS Arena, une enceinte entièremen­t dédiée au rugby.

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