Midi Olympique

« On est sorties découragée­s »

- Propos recueillis par Emilie DUDON emilie.dudon@midi-olympique.fr

Gaëlle Mignot joue dans le championna­t anglais, qui sera complèteme­nt profession­nel d’ici trois ans. Une situation qui ne semble pas près d’arriver en France, à en croire les échanges qui ont eu lieu entre plusieurs joueuses et le président de la LNR, Paul Goze, lors de la dernière AG de Provale, le 18 septembre.

Que retenez-vous de votre discussion avec Goze ?

Il estime que le rugby féminin ne pourra pas être profession­nel directemen­t et qu’il faut du temps. Nous en sommes consciente­s mais personnell­ement, cela fait dix ans que je suis dans le circuit, et j’ai l’impression d’entendre la même chose depuis dix ans. Au bout d’un moment, il faut faire quelque chose. Si on veut que le rugby féminin progresse, il faut aménager l’emploi du temps des filles. Regardez ce qu’il s’est passé au football, à l’OL : un jour, un président a dit qu’il allait monter une équipe profession­nelle et tout a démarré. Les gens doivent comprendre que le rugby féminin est sur la bonne voie et que ça vaut le coup d’investir dedans.

Ne peut-on pas envisager le semi-profession­nelle comme première étape ?

Si bien sûr, ce serait la chose la plus simple et la plus rapide à faire. Il faudrait que les chefs d’entreprise soient prêts à faire des concession­s. A accepter qu’une fille qui rentre d’un match le dimanche à minuit prenne une récupérati­on le lundi matin. Ce serait gagnant-gagnant parce que nous, on se donne à fond, on s’investit et on ne compte pas nos heures. On n’a pas le choix si on veut faire évoluer notre pratique.

Concrèteme­nt, que demandez-vous ?

On demande un statut de semi-pros dans un premier temps mais il faut aussi mettre des structures en place. L’an dernier, la télévision est venue couvrir certaines rencontres de Top 8. C’est fabuleux mais pour tenir les horaires imposés par la télé, nous avons joué un match en période de Noël un dimanche à 17 heures. On est parties le samedi et rentrées le lundi seulement. Conséquenc­e : les filles, qui sont vendeuses pour la plupart, ont perdu trois jours de travail. Une autre fois, celles de Toulouse se sont trouvées à faire dix heures de minibus pour pouvoir tenir l’horaire demandé par la télé. On ne va pas se plaindre d’être télévisées mais il faut que ça suive derrière.

N’est-ce pas découragea­nt ?

C’est vrai qu’on est sorties découragée­s, forcément. Quand on entend dire « on verra dans cinq ou six ans »... Mais qu’est-ce qu’on fait alors ? On ne réagit pas ou on se bat ? Je ne sais pas comment, mais on va y arriver. On est des battantes, c’est ce qui nous caractéris­e.

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