Vous pariez combien ?
Ne nous demandez pas qui va gagner ce week-end. Et surtout pas si La Rochelle, qui reçoit l’Ulster pour le premier match de son histoire à Deflandre dans la très grande Coupe d’Europe, va doubler la mise après son succès de prestige remporté chez les Harlequins. Désolé, mais on ne joue jamais au loto. Même lorsque le jackpot est à 100 millions d’euros et qu’un tel montant pourrait nous permettre d’endosser l’habit du mécène pour relancer un bastion endormi comme Graulhet, Lourdes ou Bagnères pour aller chatouiller les Ferrari du Top 14 que sont devenus Montpellier, Lyon et… La Rochelle, nous y revenons forcément. Le phare charentais de la façade Atlantique pourrait bien être une incongruité dans ce championnat à forte tendance métropolitaine. Sa réussite n’en reste pas moins la preuve parfaite de la diversité des modèles -et des histoiresqui font cohabiter Brive, Oyonnax ou Agen avec Toulon, Bordeaux, Clermont, le Racing et Toulouse. À chacun ses vérités, et son avenir.
Celui du Stade rochelais semble s’inscrire dans une dynamique formidable. Depuis l’an dernier et en dehors de cette demi-finale de Top 14 perdue face au RCT sans qu’il soit possible de reconnaître le club maritime, ce dernier tutoie les sommets avec une rare insolence. Il impressionne par sa capacité à répéter les performances sans coup férir, comme s’il n’était jamais débordé par l’adversaire ou ses propres émotions…
Au vrai, ces Jaune-et-Noir-qui-n’ont-rien-gagné (dixit Collazo) semblent déjà mûrs pour l’exploit, décomplexés par la froide maîtrise des Victor Vito, Kevin Gourdon, Levani Botia ou Brock James autant que par la force d’un recrutement 4 étoiles qui verra bientôt débarquer deux All Blacks supplémentaires, avec Rene Ranger et Tawera Kerr-Barlow.
N’en jetez plus ! Ce devrait être assez -au moins sur le papier- pour que La Rochelle rejoigne les grands d’Europe avant même d’avoir posé une main ferme sur le Bouclier de Brennus. Toulon ne s’est pas réveillé autrement, en débutant sa trilogie infernale (2013, 2014 et 2015) par une conquête du Vieux Continent. Le RCT de Jonny Wilkinson semblait alors porté par la flamme d’une compétition qui réveille les plus féroces instincts de compétiteurs chez les stars de l’hémisphère Sud, eux qui n’ont d’yeux que pour les joutes internationales.
La Rochelle -comme Montpellier, le Racing, Toulon ou Clermont d’ailleurs- répond à ce cahier des charges : capable d’exister sur les deux tableaux (championnat/Coupe d’Europe) et, ainsi, de rivaliser avec les meilleurs. Reste à voir comment les Maritimes sauront gérer la suite de leur découverte d’une Champions Cup qui ne supporte aucun écart de conduite. Si les Ulstermen et leur bilan famélique à l’extérieur (69 % de défaites) ne représentent pas une menace fantôme, les Rochelais n’ont franchement aucune de raison de choper une sainte trouille à l’instant de recevoir les champions de 1999. N’empêche, ils ne devront pas oublier que ces Irlandais du Nord ont souvent coulé les plus fiers espoirs français en même temps qu’ils contribuèrent à mettre entre parenthèses les carrières de certains de leurs adversaires (Brennan, Dupuy, Attoub…) qui se sont perdus dans les affres du combat imposé par les combattants de Belfast.
Puissent-ils, les Maritimes, retenir la première leçon européenne. Comme un cours de bonne conduite…