TOUCHÉ PAR LA GRÂCE
DISCRET, IL EST DEVENU INDISPENSABLE SUR LE PRÉ. AVANT CE GRAND TEST FACE À CLERMONT, L’AUSTRALIEN, QUI EST UN DES DERNIERS CADRES HÉRAULTAIS DISPONIBLES, NOUS LAISSE ENTRER DANS SON INTIMITÉ RELIGIEUSE.
« Le tatouage que j’ai sur le ventre, c’est le premier verset de la Bible que j’ai appris par coeur. » N’ayez pas peur, « Joe »Tomane est l’exact opposé d’un fanatique. Il est le symbole parfait du fervent croyant pacifique, dont l’originalité est d’utiliser sa peau pour graver ses représentations religieuses préférées : « C’est mon verset favori (« Philippiens 4:13, je puis toutes choses en Christ qui me fortifie », N.D.L.R.), car il est en relation directe avec l’état d’esprit qui était le mien quand je suis devenu chrétien. […] Sur la main j’ai aussi un tatouage qui représente Jésus. Et sur ma poitrine, j’en ai un qui symbolise le mélange de ma foi et de mon héritage. » Joseph,le bien nommé homme de foi et « Joe », rugbyman de grande classe, sont donc indissociables.
SIX PRIÈRES MINIMUM PAR JOUR
Né en Nouvelle-Zélande de parents samoans, l’ilien à la coupe afro a grandi en Australie : « J’ai été élevé dans une famille très religieuse. En grandissant, je me suis tout de même un peu éloigné de ma foi et j’ai fait quelques erreurs, que je veux garder pour moi. C’est alors que je me suis appuyé sur ma croyance qui n’a plus fait que grandir. C’est le tournant. À la suite de ces erreurs, j’ai décidé qu’il me fallait changer, retourner à mes fondations. Parfois, on se réveille le matin et on se dit : « mais qu’est-ce que tu fous ? Tu vaux mieux que ça ! ». » La fougue de l’adolescence laisse alors place à l’éveil spirituel et à la sagesse d’un : « chrétien, baptisé chez les presbytériens » , sauvé par sa foi, qui guide depuis ses pas : « Je prie tous les matins et tous les soirs avant chaque repas et aussi, quand je suis un peu abattu. Parfois, c’est une prière, parfois je demande à Dieu ses conseils ou de la confiance. Il y a une ou deux églises où je me rends à Montpellier avec certains camarades sud-africains. »
Dans l’intimité de son foyer, l’intéressé ne passe pas une journée sans ouvrir son Livre sacré : « Je mets un point d’honneur à en lire le plus possible la Bible chaque jour. J’imagine que c’est une source d’apprentissage pour moi, un guide de vie. » Et une croyance protectrice aux yeux de Joe Tomane « Si je devais considérer le rugby comme quelque chose de permanent ou une caractéristique déterminante de ce que je suis, et qu’il m’était enlevé, cela me briserait en tant que personne. J’ai donc placé mon identité dans ma foi. C’est quelque chose de très important, que mon identité ne repose pas sur ce que je fais, mais sur ce en quoi je crois. »
MODÈLE DE TOLÉRANCE
Le Wallaby (27 ans et 17 sélections) voit une interaction entre la religion et le rugby : « La religion me permet de garder la tête sur les épaules. Ça me donne la motivation d’utiliser mes capacités en comprenant qu’elles sont une bénédiction. Ça me permet aussi de ne pas oublier que ma petite personne ne passe pas en premier. Je voudrais être perçu comme quelqu’un qui veut aider, qui aime les gens pour ce qu’ils sont, qui qu’ils soient, même si c’est parfois difficile. » Modèle de tolérance et de dévouement, le souriant Tomane a gagné le respect du vestiaire et s’est affirmé comme pilier du MHR (arrivé en 2016).
Un joueur pétri de talent, élégant et imprévisible, auteur d’un essai à Pau (son 4e cette saison) et de gestes époustouflant avec Nadolo, son compère illusionniste. Un attaquant racé, souvent utilisé au centre cette année, au service du collectif : « Que ce soit à l’aile ou au centre, sur le banc ou dans les tribunes, je donnerai toujours le maximum. Je bosse énormément avec Richie Gray (coach du jeu au sol au MHR, N.D.L.R.) sur mon travail au sol, car que je suis constamment en quête d’apprentissage et de progrès, donc même s’il faut jouer en troisième ligne… (Allusion faîte par Vern Cotter) En plus je suis largement assez lourd (1,90 m et 115 kg) !» Dimanche face à Clermont, l’Australien « qui tient un peu la baraque en ce moment avec Steyn ou Nadolo. Il monte en puissance, est robuste et à des skills. On va donc s’appuyer sur lui » , dixit Cotter ; sera bien aligné sur la ligne de trois-quarts héraultaise, pour son 29e match sous le maillot frappé de la fleure de Ciste : « L’Australie est un bel endroit, mais ma maison est à Montpellier désormais. Et j’aimerais que ça reste ainsi un peu plus longtemps, qui sait (sous contrat jusqu’en 2019)… » Une prière de Joe Tomane, qui pourrait bientôt être exaucée.