Midi Olympique

Ne vous trompez pas de combat

- Jacques VERDIER jacques.verdier@midi-olympique.fr

Bernard Laporte ne fut pas le secrétaire d’Etat et l’ami de Nicolas Sarkozy pour rien. Il a pris à son mentor politique le sens du contre-pied, du brusque retour en arrière, du traitement des dossiers à la hussarde. Passe encore qu’il souhaite se rapprocher des clubs après avoir fait la guerre à la Ligue. Outre que c’est la meilleure initiative qu’il puisse prendre à ce jour, son combat d’hier reposait, si j’en crois son entourage, sur une épreuve de force FFR-Ligue qui n’avait jamais eu véritablem­ent lieu sous la présidence de ses prédécesse­urs (lesquels laissèrent la Ligue s’installer sans jamais contrecarr­er ses projets) et que Laporte voulait absolument instaurer pour partir, avec la Ligue, sur de nouvelles bases. « Il a envisagé le rapport comme un match d’autrefois : tu cognes d’abord et tu discutes ensuite. » La stratégie peut se concevoir. Jusque-là, j’arrive à suivre.

J’ai un peu plus de mal, en revanche, lorsqu’on m’explique que le choix de maintenir ou non Guy Novès à la tête du XV de France, va passer par une sorte de référendum effectué auprès des clubs. Quelle est cette démagogie puérile ? En quoi les entraîneur­s et les présidents de clubs sont-ils fondés à juger du bien-fondé ou non de la qualité de Novès et de son staff ? Et même s’ils l’étaient – via le retour des joueurs, par exemple – quel crédit accorder à leur message, au regard des amitiés, inimitiés, intérêts contraires ? Si Bernard Laporte et Serge Simon veulent se passer des services de Guy Novès et de ses adjoints, c’est leur droit. Les derniers résultats ne plaident pas vraiment en faveur des technicien­s en place. Mais que ce renvoi se fasse alors dans la dignité, la clarté et nous épargne mesquineri­es et impostures. Les hommes concernés méritent mieux, il me semble, que ce misérable tour de table réalisé auprès des clubs.

À ce point du propos, la question qui se pose au rugby français est plutôt de savoir quel rang tient l’équipe de France dans la

hiérarchie de notre rugby ? On me rapporte - restez assis ! - que des joueurs en seraient aujourd’hui à interroger leur agent et leur manager pour savoir s’ils doivent ou non continuer de répondre à l’invitation des Bleus. Un joueur aurait même déclaré ne plus vouloir jouer avec les Bleus au prétexte que cette équipe nuirait à son image. Pauvre chou ! Je veux bien que le narcissism­e victimaire ait envahi notre société, mais il y a des limites à la crétinerie et il serait peut-être temps de le leur faire savoir.

Et si nous en sommes là, cher Bernard Laporte, ce n’est pas en licenciant Guy Novès

et ses apôtres, ou en se lançant dans une guerre ouverte avec Serge Blanco, que l’on va solutionne­r les problèmes. J’en reviens, pardonnez-moi, à mon cheval de bataille : c’est tout le système du rugby français qui est gangréné et doit être repensé, reconsidér­é dans son ensemble. Avec les clubs et la Ligue, bien sûr, comme avec toutes les forces vives de notre sport. Vous avez six ans pour bâtir un empire, six ans pour redonner des couleurs à la France. Six ans pour faire du Mondial 2023 une formidable réussite. Six ans pour marquer votre territoire comme personne. Le chantier est immense, bien sûr, qui demandera plus de diplomatie et de discerneme­nt que de coups de menton. Ne vous trompez pas, simplement, de combat.

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