Le dieu continent
On va savoir. On va savoir ce que vaut vraiment ce RCT, musculeux au possible, déprimant au probable. On va savoir ce que veut le champion clermontois, laminé dans son jeu bien au-delà de l’excuse, certes légitime mais insuffisante, de la multiplication des blessures. On va savoir si La Rochelle est bien passé, en 18 mois, d’écolier du Top 14 à cador de la Champions Cup, si le Racing 92 peut s’imposer loin de son vaisseau synthétique et si Montpellier, repu de ses stars, pèse sur le terrain autant que chez son expert-comptable. On va aussi savoir si Castres, encore qualifiable et qui envoie, selon son manager, « un bon message à tous ces cons qui disent que le Castres Olympique ne joue pas la Coupe d’Europe », assumera dans les faits en envoyant sa meilleure équipe sur la pelouse du Munster. On va savoir parce que, ce week-end, c’est Coupe d’Europe. Et rien, du point de vue des clubs, ne nous instruit autant sur l’état des forces en présence à l’échelle continentale. Dans cette guirlande d’espoirs lardés de craintes, c’est certainement Toulon qui sera scruté de plus près encore. Le RCT du président Boudjellal, depuis qu’il a découvert ce nouveau continent, n’a jamais échoué en phase de poule. Il serait pour le moins fâcheux que cela intervienne justement l’année où il dispose finalement, dans son groupe, de la fameuse province italienne estampillée « 10 points » longtemps offerte au Biarritz olympique et qui valait, à l’époque, la jalousie des petits camarades français. Mais le club varois est en danger, clairement, sur la pelouse de séduisants Scarlets. Dans l’affaire, beaucoup jouent gros. Et l’éventuelle défaillance collective, celle d’un club, basculerait vite vers une quête de responsabilités individuelles.
Mais le cas de Toulon peut être globalisé. Derrière le sort de nos clubs français, lors de cette journée de Coupe d’Europe, on ne pourra pas s’empêcher d’extrapoler sur le Tournoi des 6 Nations qui se profile. Parmi les trentedeux noms qu’a dévoilés Jacques Brunel, ce mercredi, vingt-cinq seront sur le front de la Champions Cup ce week-end. Aux prises avec les Irlandais, les Gallois ou les Anglais que nos Bleus, franchement malades, retrouveront dans les prochaines semaines. Alors, une vague de qualification française pour les quarts de finale de Coupe d’Europe serait-elle annonciatrice d’un Tournoi réussi ? Comparaison n’est pas raison. Trop de postes clés, dans nos clubs majeurs, sont tenus par des joueurs interdits de notre sélection. Mais il sera surtout question de se rassurer, jusqu’à remplir une jauge de confiance théorique actuellement au plus bas. Après tout, c’est ce qui avait manqué en premier lieu aux Bleus, en novembre. Bien mieux que les discussions réglementaires qui se tiennent actuellement à Marcoussis, si les clubs peuvent rendre un fier service au XV de France, c’est celui-là.