Le coup de Pau, la chute de Clermont...
DANS LE SILLAGE DE SON NUMÉRO 8 EUPHORIQUE, LE MHR S’EST PAYÉ UN QUATRIÈME SUCCÈS DE RANG EN AUVERGNE. IMPRESSIONNANT ET... ASSOMMANT.
Montpellier s’est donc offert son quatrième succès de suite au Stade Michelin en Top 14 , une statistique assez incroyable qui vaudrait presque un trophée en soi. L’exploit fut réhaussé par les sorties sur blessure de Aaron Cruden et de Julien Bardy.Vern Cotter ne pouvait rêver d’un cadeau plus agréable, 24 heures après son cinquante-sixième anniversaire. Son équipe est venue confirmer dans l’antre même du champion blessé sa première place, avec une légion finalement très étrangère : seulement trois Français titulaires au coup d’envoi, la troisième-ligne dans sa totalité (Galletier, Picamoles, Bardy). Et c’est là que nous puiserions si nous devions choisir un héros pour symboliser ce succès arraché in extremis par Nadolo, mais couvé longtemps à l’avance. Le centaure s’appellerait évidemment Louis Picamoles. L’homme aux 68 sélections avait défrayé la chronique depuis la publication de la liste de Jacques Brunel. À la douleur de la première absence s’est ajoutée la brûlure d’un second oubli quand Jellonch a déclaré forfait et que le sélectionneur a préféré appeler Lapandry, ne laissant donc qu’un 8 perforateur dans son groupe (Tauleigne, Gourdon présentant un autre profil). Mais dimanche après-midi, « King Louis » s’est payé un vrai baroud d’honneur avant le Tournoi avec ces deux essais en treize minutes et une première période énorme sur le plan statistique : onze ballons touchés, deux off loads, une prise de la ligne d’avantage et six défenseurs battus. À la septième minute, il a surgi à la conclusion d’une première séquence de pilonnage pimentée d’une chistera pour Mikautadze (le petit truc qui a bonfié la démontration de force). À la 20eme, Picamoles a récidivé, mis sur orbite par Ruaan Pienaar au soutien d’un premier rush de Bismarck Du Plessis, affûté comme jamais.
Dans le contexte du système de jeu montpelliérain, parfaitement huilé, Louis Picamoles n’ a montré aucun des défauts qui expliquerait son oubli international. Il a maintenu son niveau de jeu pendant 80 minutes. Dans le contexte d’un système de jeu parfaitement huilé et qui ne s’excuse pas d’exister, il a été utilisé à cent pour cent de son potentiel. Vern Cotter sera au moins satisfait de ça. L’ancien entraîneur de Clermont n’est décidément pas un psychorigide. Il a mis sur pied une phalange programmée pour s’imposer en puissance, en acceptant parfois d’être dominée en vitesse par son adversaire.
PIENAAR PLUS QUE ROUBLARD
Ce fut le cas par moments, notamment en deuxième mi-temps quand Clermont put compter sur un surplus de munitions.
Mais même chahutés en mêlées, Louis Picamoles et sa bande n’ont jamais perdu leur sang-froid. Cotter fit entrer Paul Willemse à la place de Mikautadze au moment idoine pour apporter une nouvelle force de percussion : moment-clé de la partie à notre avis. Il suffisait de trouver Nadolo dans des conditions acceptables, pas forcément avec beaucoup d’espace mais avec le soupçon de dynamisme qui le transforme en bélier humain. « Tout ceci n’avait rien à voir avec mon anniversaire… L’équipe a bien travaillé cette semaine après sa déception en Champions Cup, et ce sont les joueurs qui sont allés se chercher ce succès, pas moi. Ce qui me satisfait, c’est que l’on sent encore une progression. On se répartit de mieux en mieux sur la largeur du terrain, on tient bien le ballon, les troisquarts le touchent de plus en plus… » Le sorcier néo-zélandais s’est aussi fendu d’un compliment à l’endroit de Ruaan Pienaar, plus que roublard, presque vicieux : « Il a joué un rôle d’autant plus important que nous avons perdu très vite Aaron Cuden. j’ai eu très peur à ce moment-là parce qu’après la blessure de Julien Bardy, cela commençait à faire beaucoup. On termine quand même la rencontre avec un flanker en deuxième ligne et un talonneur en troisième ligne, et on va quand même chercher la victoire en toute fin de match. Cela démontre l’état d’esprit qui animait le groupe aujourd’hui… »