BALLONS PORTÉS : « ENCERCLER » POUR MIEUX BLOQUER
IL S’AGIT DU MODE DE DÉFENSE EN VOGUE DU DÉBUT DE SAISON POUR DÉFENDRE FACE AUX MAULS : PROFITANT D’UNE FAILLE DU RÈGLEMENT, LES DÉFENSEURS CHERCHENT À « ASPIRER » LA STRUCTURE ADVERSE POUR MIEUX L’ENCERCLER ET EMPÊCHER LA SORTIE DU BALLON, TOUT EN RÉCUPÉ
’est l’une des tendances de ce début de saison. On veut parler ici de cette nouvelle stratégie de défense des ballons portés, nouvelle arme apportée dans la guerre permanente qui anime les techniciens du jeu d’avants autour des mauls après touche, notamment très utilisée par les Celtes en Coupe d’Europe. Ainsi, plutôt que de chercher à déstructurer l’édifice par l’axe en « nageant » au travers du maul, les défenseurs ont ainsi de plus en plus tendance à laisser le ballon porté se structurer et avancer, pour mieux profiter du moment où celui-ci se désaxera. Comment ? En plaçant des joueurs qui se « grippent » à l’arrière du ballon porté adverse pour empêcher la sortie du ballon.
JUTGE : « L’OBSERVABLE NUMÉRO UN, C’EST LE POINT D’ENTRÉE DU DÉFENSEUR DANS LE BALLON PORTÉ »
Légal, comme pratique ? Tout à fait, bien que celle-ci fasse parfois hurler public et entraîneurs… « Il s’agit ici de jouer avec la règle, explique le patron des arbitres européens Joël Jutge. La règle n’est pas contre vous, elle est avec vous, à condition de bien savoir l’utiliser. En début de saison, lors de la réunion avec les entraîneurs à Toulouse, j’ai évoqué avec des clips précis ce qu’il était possible ou pas de réaliser dans les ballons portés. Pour les arbitres, l’observable numéro un, c’est le point d’entrée du joueur dans le maul. S’il est entré dans l’axe et que le joueur se retrouve par la suite dans le camp de l’adversaire par le jeu des rotations, voulues ou non, il en a parfaitement le droit. » À condition de ne jamais se délier, bien sûr… Une stratégie qui permet à la défense, une fois le ballon porté arrêté ou passé au sol, à récupérer l’introduction sur la mêlée suivante. Contraire à l’esprit du jeu, argueront certains ? Pas à en croire Joël Jutge. « L’établissement des règles obéit à trois principes : sécurité, équité et continuité. Au sujet de l’équité, on a souvent entendu que les ballons portés après touche étaient très difficiles à défendre. Il était donc à mon sens intéressant de réagir comme ça. La règle permet ainsi des stratégies qui posent de nouveaux problèmes aux entraîneurs, qui doivent trouver des solutions pour s’y adapter. »
LE PROBLÈME DE L’INCOHÉRENCE ENTRE LES ARBITRAGES
Le hic ? Il vient du grand flou autour de cette règle, dont l’application manque parfois de cohérence entre les arbitres eux-mêmes, ce dont convient Jutge. « On demande aux arbitres des décisions et une communication appropriées. Il est vrai que pour des raisons indéterminées, vraies ou fausses, les arbitres demandent parfois aux joueurs qui se retrouvent dans le camp de l’adversaire de sortir, même s’ils sont dans leur droit. Ce qu’on demande aux joueurs, dans ces moments-là, c’est d’obéir aux arbitres, même s’ils se trompent… C’est ensuite à nous, les évaluateurs, de déterminer si certains arbitres sont coutumiers de ce genre d’erreurs et de les « sanctionner » le cas échéant, au nom de la cohérence de l’arbitrage dans cette phase de jeu. » Laquelle se trouvera notamment au coeur de la réunion des arbitres avant les quarts de finale de Coupe d’Europe, histoire d’harmoniser certains violons…