COTTER SUR JAMBE DE BOIS
C’EST À LA DERNIÈRE MINUTE QUE LES AUVERGNATS ONT BAISSÉ PAVILLON DEVANT LEUR ANCIEN ENTRAÎNEUR. CRUEL MAIS TERRIBLEMENT LOGIQUE.
Ce n’est pas que l’on soit de nature débonnaire ou angélique, non. Reste que si on veut bien comprendre la juste colère des supporters du Michelin, déçus de voir pour leur équipe céder pour la deuxième fois de la saison au Michelin (qui plus est dans le contexte hautement symbolique du retour de Vern Cotter), le genre de revers concédé dimanche par l’ASMCA demeure des plus compréhensibles. Certes, il est grave pour un club comme Clermont de pratiquement dire au-revoir à une qualification pour les phases finales du championnat (et peut-être à une qualification en Champions Cup la saison prochaine) avant même le début du Tournoi. Mais le corps et l’esprit humain ont malgré tout leurs limites, que les joueurs Clermontois ont finalement atteint dimanche après-midi, dans la dernière minute d’un combat de titans contre les buffles du MHR, après avoir pour certains disputé 11 matchs éprouvants de rang. « En ce moment, il s’agit de serrer les dents et d’explorer la profondeur de notre puissance mentale, prédisait la semaine dernière le talonneur Benjamin Kayser. Physiquement, quand tu enchaînes beaucoup, tu te dis parfois que tu vas craquer. Mais on ne connaît pas nos limites et de toute façon, on ne se pose pas ces questions. Tout ce qu’on sait, c’est qu’il reste un match à gagner avant les vacances. »
CHOULY : « ON N’EST PAS BIEN »
Seulement voilà, le sorcier de Tu Puke en a décidé autrement, et joué un bien vilain tour à son ancien club. En clair ? Pour son 56e anniversaire, Vern Cotter est venu « crever » l’ASMCA, ainsi que le redoutaient ses ex-joueurs, et pratiquement lui ôter ses derniers espoirs de qualification en Top 14. « Je suis allé les féliciter, Nathan Hines et lui, avouait sportivement le manager clermontois Franck Azéma. Ils sont venus avec une grosse armada et ont parfaitement joué le coup. On passe les vingt premières minutes sur les talons. J’aurais deux mots à dire àM. Garcès d’ailleurs, car je l’ai trouvé ebaucoup plus tourné vers nous alors que leurs attitudes dans les rucks me semblaient limites. Après, s’il faut travailler différemment, on le fera… Mais globalement, nous avons consommé trop d’énergie sur notre entame, et c’est ce que nous avons payé à la fin du match. »
Dans l’entame, et probablement aussi dans ces 11 dernières semaines de compétition non-stop, notamment dans la contre-performance de Northampton, puisqu’un succès en Angleterre aurait probablement permis à Franck Azéma de moins tirer sur la corde face aux Ospreys, et de réserver certains cadres pour la réception du MHR. Mais il est bien sûr trop tard pour réécrire l’histoire, ainsi que pour méditer sur la pertinence de courir deux lièvres à la fois lorsque la profondeur de son effectif permettrait à peine d’en pister un seul. Une fatigue qui s’est évidemment ressentie dans les attitudes en fin de rencontre… « On est déçu, frustré. De notre première mitemps, du résultat. Le match nous échappe dans ce dernier quart d’heure parce qu’on ne voit plus le ballon. On se jette de partout, on se bat comme des chiens mais à ce jeu, quand tu n’as pas le ballon, tu ne peux pas gagner… On n’est pas bien, il ne faut pas se le cacher. On va voir dans quel état d’esprit tout le monde revient après les vacances. » Une interrogation prolongée par Franck Azéma. « Comptablement, il reste encore 50 points à prendre. Mais est-ce qu’on est capable de le faire ? c’est une autre question. On verra au coup par coup. Quand tu n’es pas constant 80 minutes, tu ne peux pas parler de qualification. »
UN MAL POUR UN BIEN ?
Si bien qu’au final, on se demanderait presque si Cotter n’a finalement pas servi les intérêts de l’ASMCA, en l’obligeant à se concentrer contre son gré sur son Graal européen. Une Champions Cup qui demeure désormais l’unique objectif de Clermont, par lequel les Jaunards se voient désormais aussi contraints d’aller chercher leur participation en Coupe d’Europe la saison prochaine. Tout sauf impossible, disons-le clairement, sachant que les hommes de Franck Azéma recevront en quarts et potentiellement en demifinale, tout en pouvant compter après les vacances sur les retours d’Aurélien Rougerie, Judicaël Cancoriet, Patricio Fernandez et David Strettle, sans oublier Camille Lopez, Damian Penaud ou Wesley Fofana qui travaillent comme des fous pour revenir à l’heure du quart de finale face au Racing. Un mal pour un bien, vous dites ? N’en déplaise aux supporters clermontois, il se pourrait bien que oui. Et que ces derniers en viennent finalement à remercier Vern Cotter dans quelques mois…