PETITS BRUITS DE COULOIR
PARTICULIÈREMENT SURVEILLÉ PAR LES ARBITRES DEPUIS LE DÉBUT DE LA SAISON, LE RESPECT DU COULOIR ENTRE LES DEUX ALIGNEMENTS A SUBI UN TOUR DE VIS RÉGLEMENTAIRE, AFIN DE RENDRE CADUQUES LES PETITES COMBINES PERMETTANT DE « PRENDRE LE COULOIR ». D’OÙ, PARFOI
L’avez-vous remarqué ? Les alignements en touche ont rarement semblé aussi confus qu’en cette première partie de saison. Piliers qui pinaillent à l’instant de marquer leur alignement, talonneurs obligés de se décaler ou de se redécaler sur ordre d’arbitres tatillons, refus de lancer, et par-là même une foule de coups francs distribués ici et là, à force d’alignements non joués… La raison de ce constat ? Rien moins qu’un tour de vis commandé par World Rugby, soucieux de veiller à l’équité de la lutte pour le gain du ballon. En effet, à l’image de ce que devrait en théorie être l’introduction en mêlée (à savoir un ballon lancé à équidistance des deux première ligne), le lancer doit être effectué droit, et surtout dans le couloir entre les deux alignements. Une règle délibérément contournée par bien des équipes ces dernières années, avec des talonneurs qui se décalaient imperceptiblement en direction de leur équipe pour la favoriser de quelques précieux centimètres…
JOËL JUTGE : « IL Y A EU UN LAISSER-ALLER DES ARBITRES, IL FALLAIT PROCÉDER À UN RECALIBRAGE »
Alors, faut-il voir dans l’assouplissement des règles de l’introduction en mêlée (décidé pour leur permettre de s’écrouler moins souvent) une forme de « compensation » dans ce durcissement au sujet de la touche ? Force est de constater, en tout cas, que plus grand-chose ne passe désormais à l’as, qu’il s’agisse du positionnement du lanceur ou de l’alignement défensif. « Tout ceci a été le fruit de plusieurs facteurs, nous confirmait récemment le patron des arbitres européens Joël Jutge. D’abord un certain laisser-aller des arbitres, qui ont trop longtemps laissé les talonneurs se décaler
librement vers leur propre camp. À ce sujet, il fallait un procédé à un recalibrage. Et surtout, il y a l’importance de la prise du couloir… En tant que sauteur, quand vous prenez le couloir, vous avez un temps d’avance sur l’adversaire, ce qui permet d’être plus réactif en attaque, et plus performant dans le contre. Tout le monde veut prendre ce couloir, c’est pourquoi nous avons parfois des difficultés à le faire respecter. Mais nous avons tout l’arsenal pour y parvenir et il faut y parvenir, au nom de l’équité pour le gain du ballon. » D’où, vous l’aurez compris, cette grande répression opérée par le corps arbitral des petites tricheries ordinaires au niveau du couloir, qui seront au coeur des débats lors de la réunion de préparation des arbitres pour les quarts de finale de Coupe d’Europe.
DIFFICULTÉS ACCRUES POUR LES LIFTEURS
De fait ? Pour « prendre le couloir », les sauteurs des deux camps n’ont d’autre solution que le faire par le saut. D’où un travail d’autant plus compliqué pour les lifteurs, qui doivent maintenir l’équilibre et assurer la descente d’un joueur qui ne saute plus strictement à la verticale, mais en se décalant de quelques centimètres. Un rôle compliqué en outre par le fait que les sauteurs adverses s’élancent avec (s’ils n’ont pas volé le ballon) pour objectif de retomber dans le camp de l’équipe attaquante, au plus près du ballon, pour s’infiltrer au coeur de la structure d’un éventuel ballon porté. Chose évidemment permise par le règlement, à condition que les lifteurs n’aient pas mordu le couloir… Il s’agit donc, pour les lifteurs attaquants, de se montrer vigilant pour empêcher ces tentatives d’infiltration, tout en ne passant pas devant le sauteur au risque d’être sanctionné pour liaison illicite ! Bref, un travail d’horloger, qui nécessite à la fois précision et réactivité. Une nouvelle preuve que c’est bien aux lifteurs que revient le rôle le plus difficile de l’alignement, du moins le plus ingrat…