SIGNÉ JOE SCHMIDT !
LES IRLANDAIS ONT D’ORES ET DÉJÀ GAGNÉ LE TOURNOI APRÈS CETTE VICTOIRE CONTRE L’ÉCOSSE, EMBLÉMATIQUE DU STYLE MILLIMÉTRÉ DE JOE SCHMIDT. MAIS LES VERTS ÉTAIENT SURTOUT MOTIVÉS À BLOC PAR LA PERSPECTIVE DU GRAND CHELEM QU’IL FAUDRA ALLER ARRACHER À TWICKEN
Pour la troisième fois en cinq ans, l’Irlande a empoché le Tournoi des 6 Nations, et quels que soient les résultats de la dernière journée. C’est un bilan extraordinaire pour Joe Schmidt, le sélectionneur néo-zélandais des Verts intronisé à l’été 2013. Plus fort encore, il a conduit samedi l’Irlande à une onzième victoire de rang. Il avait déjà connu une série de dix succès de suite en 2014-2015. Pour ceux qui ont connu les périodes de vaches maigres du rugby irlandais, cette double statistique est… stupéfiante. On ne parle même pas du succès historique contre les All Blacks de l’automne 2016.
UNE ÉQUIPE QUI SE RENOUVELLE
Évidemment, il manque encore une étoile au palmarès de Schmidt, le grand chelem, que son prédécesseur, Declan Kidney, avait décroché dès sa première année, en 2009. Mais ce qui nous frappe le plus dans les performances du sélectionneur actuel, c’est qu’il les a accomplies en surmontant la retraite de Brian O’Driscoll (en 2014) et en menant une équipe en permanent renouvellement. Dans le XV de départ qui a battu l’Écosse, Furlong, Ringrose, Aki, Stockdale, Leavy, CJ Stander, James Ryan n’avaient pas encore commencé leur carrière internationale quand le Tournoi 2015 fut gagné.
Cette période faste des Irlandais ne correspond même pas à l’éclosion d’une génération dorée. Ce rugby est désormais capable de se régénérer par la qualité de sa formation, mais aussi par une politique de naturalisation sans complexe (Stander et Aki ont été formés dans l’hemisphère Sud). Le niveau d’excellence de ses provinces en Ligue celte d’expliquer la réussite d’un rugby au sommet du professionnalisme tout en respectant sa politique protectionniste.
DEUX SURVIVANTS DE 2009
La victoire contre l’Écosse n’a jamais fait de doute. Les Écossais n’ont pas été ridicules mais ils ont été trop inefficaces sur le plan offensif. Ils ont gâché trois situations claires d’essais par des mauvais choix ou des mauvaises passes (Huw Jones, Stuart Hogg, et Peter Horne) et en plus le malheureux centre Peter Horne se fit intercepter par Jacob Stockdale, parti pour une course impitoyable de 55 mètres. Les attaquants du Chardon ont du potentiel, c’est sûr mais leur irrégularité leur coûte trop cher.
Chez les Irlandais, c’est tout l’inverse. Cette équipe joue un rugby sidérant d’efficacité. Une interception, deux mauls et un seul essai construit derrière une mêlée à cinq mètres : redoublée Ringrose, Aki pour décaler Stockdale, nouvel ailier vedette de l’Ulster. Il compte désormais dix essais en huit sélections et reste sur trois doublés consécutifs (contre l’Italie, Galles et l’Écosse). Moins spectaculaire, le deuxième ligne James Ryan, 21 ans, du Leinster, a livré aussi une partie magistrale : quinze ballons portés, treize plaquages et trois ballons pris en touche.
À vrai dire, nous avons vu samedi une sorte de modèle parfait du rugby de Joe Schmidt : peu de passes au contact, peu de prises de risques, beaucoup de jeu direct, des chandelles de Conor Murray (un grand classique). Mais quand les ballons sont de qualité, surtout près des lignes, les Irlandais se mettent à faire à faire des combinaisons aux petits oignons avec Johnny Sexton à la baguette. « Il faut être honnête, le match a été plus serré que ne l’indique le score. Nous aurions dû nous imposer de sept points environ, mais ils ont gâché de grosses occasions… Nous aussi ceci dit, Mais notre victoire au classement est bizarre car nous ne l’avons pas conquis directement. Je n’ai appris la nouvelle que pendant le banquet quand j’ai su que la France avait gagné », a commenté Joe Schmidt.
Mais celui-ci a enchaîné tout de suite sur le prochain obstacle : le grand chelem tout simplement qu’il faudra arracher à Twickenham. Tous les joueurs y pensent tels Rory Best et Rob Kearney, les deux survivants de 2009 et Johnny Sexton qui ne jouait pas mais faisait partie du groupe élargi à l’époque. Il attendait encore sa première cape et fut déçu de pas être vraiment de la fête. Il ne le cache pas.
Ce grand chelem, il faudra le conquérir directement, tout le monde sera maître de son destin : « La semaine ne sera pas facile, il faudra que les joueurs restent dans leur bulle. Il sera difficile de s’isoler totalement, je sais. Car une partie de la pression se crée en aussi interne et puis, ils auront des jours de libre et reviendront en famille… »