RENVERSANTES
BOUSCULÉES PAR UNE ÉQUIPE ANGLAISE BIEN ORGANISÉE ET LONGTEMPS MENÉES AU SCORE, LES FRANÇAISES ONT SU RENVERSER LEUR DESTIN EN TOUTE FIN DE MATCH, SUR UN ESSAI DE TRÉMOULIÈRE. ELLES JOUERONT AU PAYS DE GALLES VENDREDI POUR RÉALISER LE GRAND CHELEM.
Et le stade des Alpes a pu hurler de plaisir quand la deuxième ligne, Audrey Forlani, a rejeté en touche la dernière tentative d’attaque adverse. Dans une enceinte garnie par 17 440 personnes, record battu pour un match de rugby féminin en France, les Françaises ont eu le bon goût de ménager le suspens, faisant montre d’un art subtil pour faire patienter spectateurs et journalistes. Quelques heures après le soulagement des spectateurs du Stade de France, les supporters alpins ont vu l’arrière, Jessy Trémoulière, attendre la dernière minute, pour résister à plusieurs Anglaises pour aplatir l’essai de la gagne, l’essai de l’espoir d’un grand chelem encore possible pour les Françaises.
C’était tout un symbole de voir l’arrière de l’équipe de France crucifier les Anglaises. Elle a cristallisé les qualités et les défauts du XV de France. On retiendra en positif bien sûr ces deux essais, sa technicité et ses accélérations. En négatif, on lui pardonnera quelques coups de pied ratés, ce mal bien français, criant dans la première demi-heure, handicapant tout au long d’un match, où les Françaises, arc-boutées en défense, eurent parfois du mal à sortir de leur camp et à conserver le ballon. On lui pardonnera aussi quelques facilités. Comme c’est souvent le cas des joueurs et des joueuses de talent, ils et elles ont la tendance à croire pouvoir faire la différence individuellement. Mais elle su garder sa lucidité pour ne pas en faire trop. Et son éclair de la dernière minute lui donne un peu raison, malgré ses dénégations. « Ça
tombe sur moi, tant mieux, souriait la joueuse. Le collectif m’a facilité la tache. Le public nous a poussés. Nous ne nous sommes pas précipités et nous n’avons pas douté.»
SANS ROMPRE
Ce n’est pas le moindre des mérites de cette équipe de France d’y avoir cru jusqu’au bout, quand le staff était plus dubitatif. « Les joueuses n’ont pas douté mais nous avons eu quelques hésitations
de notre côté », reconnaissait sans fard Annick Hayraud. À chaque fois les coéquipières de Gaëlle Hermet avaient laissé les Anglaises tirer les premières pour les voir logiquement dominer et mener après les trente premières minutes de chaque mitemps. Mais les Bleues plièrent, sans rompre. Si quelques coups échouèrent, cette équipe, pourtant si jeune (24 ans de moyenne d’âge) ne s’impatienta pas. Au contraire, elles jouèrent comme des vieilles briscardes, pour annihiler trois mauls en deuxième mi-temps, ou récupérer de précieuses pénalités grâce à des grattages efficaces sur des offensives adverses. « Cette équipe a du
caractère, se réjouissait l’entraîneure. C’est la victoire du courage, contre un adversaire bien organisé, parfois tricheur. Elles ont su garder la tête froide. » Parviendront-elles à le faire jusqu’au bout ? Oui, sans aucun doute. Ce succès contre l’épouvantail anglais ouvre un boulevard au Françaises qu’un voyage au pays de Galles, face à une équipe battue chez elle par l’Italie ce week-end, ne peut effrayer