LA TECHNIQUE DE « L’ÉTRANGLEMENT »
SEPTIÈME BONUS OFFENSIF DÉCROCHÉ PAR LES HÉRAULTAIS DANS LEUR ANTRE, OÙ ILS SONT TOUJOURS INVAINCUS EN TOP 14 CETTE SAISON. ILS MARQUENT AINSI LES ESPRITS, ACCENTUENT LEUR AVANCE EN TÊTE DU CLASSEMENT ET CONFIRMENT LEUR PRISE DE CONSCIENCE.
La beauté ne saute pas forcément aux yeux et peut se cacher dans des actes invisibles au premier coup d’oeil. Samedi, Montpellier n’a pas offert un spectacle jouissif à ses supporters. Loin de là. Mais il a livré une prestation d’une maîtrise tactique rare, qui est aussi à sa façon, une forme de splendeur. « C’était une partie d’échec », note Vern Cotter. « L’équipe avait mis en place un plan tout au long de la semaine et elle l’a respecté sur l’ensemble du match. […] Ça fait plaisir de voir que quand nous respectons le travail préparatoire, ça peut faire des résultats comme ça », poursuit le capitaine Louis Picamoles.
Un plan parfait, résumé par une des victimes franciliennes, Henry Chavancy : « Les Montpelliérains ont réussi à nous cantonner constamment dans notre camp, grâce à leurs performeurs au pied : Mogg, Steyn, Cruden, Pienaar… Ils ont énormément de « cartouches » et cela nous a fait très mal. À chaque fois qu’on avait un peu d’avancée, on perdait le ballon et ils nous renvoyaient directement chez nous. »
LES PIEDS D’OR
Le jeu au pied sous toutes ses formes représente l’essence du succès héraultais. Avec 40 coups de « pompes » tapés, contre seulement 76 passes réalisées (137 pour le Racing ; stats LNR), les Cistes ont refusé de jouer (32 % de possession), surtout dans leur camp, pour éviter de s’exposer (sauf sur une relance de Mogg, 28e, rappelé à l’ordre par ses coéquipiers). Et ont ainsi piégé les Racingmen à leur propre jeu, grâce à la longueur des coups de pied d’occupation de François Steyn et de Jesse Mogg. Le capitaine du MHR confirme : « En étudiant les matchs du Racing 92 à l’extérieur, on avait vu qu’ils mettaient beaucoup de pression au pied sur l’adversaire et qu’ils attendaient une erreur de sa part pour attaquer, car ils sont très performants sur la contre-attaque. L’idée était donc de ne pas leur donner la moindre munition là-dedans et au contraire, de renverser la pression sur eux. La charnière et les trois-quarts ont très bien géré cette stratégie. » Plus précis dans cette partie de « pingpong », les Cistes ont forcé leurs adversaires à jouer contre-nature, en les poussant à multiplier les touches (26, dont quatre perdus) dans leur moitié de terrain et à se dégager aussi dans l’urgence (plusieurs coups de pied ratés par Lambie et Dupichot). En profitant également de leur mauvaise couverture du terrain, pour les balader de gauche à droite grâce à Ruan Pienaar ou Aaron Cruden et ainsi, les fatiguer pour les faire perdre en lucidité. Illustration parfaite sur le premier essai héraultais…
DÉFENSE DE FER ET RÉALISME OFFENSIF
Les Franciliens tardent à se dégager et c’est Anthony Tuitavake qui se fait arracher le ballon sur ses vingt-deux mètres par l’ouvreur néo-zélandais. Dans la foulée, Jan Serfontein, auteur d’un doublé et de son meilleur match avec le MHR, voit en lecture le deuxième rideau défensif adverse déserté, et tente un coup de pied par-dessus gagnant. Une réalisation révélatrice de la deuxième force décisive des locaux face au Racing 92 : la défense. Très agressifs sur l’homme et parfaitement organisés, ils ont plaqué à tour de bras et n’ont connu que très peu de déchet (156 plaquages, seulement 5 ratés soit 97 % de réussi), pour récupérer des ballons de turnovers. Et résister aussi aux assauts franciliens, notamment en infériorité numérique, période durant laquelle ils n’ont encaissé aucun point (entre la 54e et la 64e). « Ça fait plaisir de voir cette envie de défendre notre ligne. Un peu de hargne, d’agressivité et de discipline aussi (10 pénalités
concédées). […] On parle de caractère mais aussi d’une équipe qui a des objectifs en tête », précise Vern Cotter. Et pour les atteindre, elle a fait preuve d’un froid réalisme offensif, afin de punir
les Ciel et Blanc à la moindre occasion. « Il fallait que nous soyons plus pragmatiques que ce qu’on avait pu l’être ces dernières semaines. […] Et là, l’équipe a marqué des points dès qu’elle est rentrée dans leurs 22 mètres. C’est quelque chose qu’il va falloir conserver », conclut Louis Picamoles.
À l’image d’un plan parfait, modifiable à Toulouse dimanche, mais qui devra encore être respecté. Le prix à payer pour le MHR, toujours en quête de constance dans ses performances.