Midi Olympique

DAN CARTER, LA GUEULE DE BOIS

DANS LES HAUTS-DE-SEINE, LE NIVEAU DE JEU DU DEMI D’OUVERTURE NÉO-ZÉLANDAIS INQUIÈTE. À TEL POINT QUE SON STATUT DE TITULAIRE EST AUJOURD’HUI CLAIREMENT REMIS EN CAUSE...

- Dan Carter, ici blessé après avoir reçu un avant-bras dans la gorge de Zurabi Zhvania, est rattrapé par les affres du temps. Par Marc DUZAN marc.duzan@midi-olympique.fr MARCEL GAYRAUD N’EST PLUS Par Guillaume CYPRIEN

Au-delà de statistiqu­es ébouriffan­tes dans les tirs aux buts et d’une lecture de jeu qui n’appartenai­ent qu’à lui, Dan Carter a construit sa réputation sur un authentiqu­e sens du sacrifice et, surtout, un physique qui lui a longtemps permis de répondre à n’importe quel impact, de prendre de vitesse n’importe quel chasseur d’ouvreur. À quelques mois de la quille, le double champion du monde du Racing 92 est néanmoins rattrapé par les affres du temps, a le physique d’un homme de 36 ans et, comble d’horreur, semble craindre la blessure plus qu’une épidémie de peste noire. Sur le terrain ? Le résultat ne rend pas hommage à l’immense carrière de l’ouvreur des All Blacks : incapable de mettre du rythme au derby francilien, jouant loin de la ligne d’avantage, ne prenant la moindre initiative individuel­le et choisissan­t trop souvent de faire « péter » Vulivuli au milieu du terrain, Carter sombra corps et âme face au Stade français. À tel point que samedi après-midi, les deux Laurent durent sortir leur star à la 44e minute de jeu, une drôle d’occurrence ne s’étant produite que très rarement ces quinze dernières années. Alors quoi ? Pat Lambie a-t-il changé le cours d’un match jusqu’ici bien mal barré pour les Racingmen ? C’est une évidence. Laurent Labit, le patron des trois-quarts francilien­s, analyse : « Au cours de la première période, on a joué sans vitesse, devant la défense et tout était beaucoup trop lisible. La vivacité, la fluidité de Pat (Lambie) nous a clairement donné plus de variété dans les choix en attaque et a posé de gros problèmes aux Parisiens. » D’ici quinze jours, les Racingmen disputeron­t le match le plus important de leur saison à Clermont, pour les quarts de finale de Champion’s Cup. Est-ce à dire que le staff ciel et blanc se privera délibéréme­nt de Dan Carter, arraché à prix d’or à la NouvelleZé­lande voici trois ans ? Plus les jours passent et plus cette option, irréelle en début de saison, semble de plus en plus probable. Labit poursuit : « La règle du jeu est la même pour tout le monde. Il me

VAKATAWA, CETTE ÉNIGME…

Photo Icon Sport reste un déplacemen­t à Lyon (dimanche soir) pour finir de constituer ma ligne de trois-quarts en vue du quart de finale. Contre le Lou, Pat (Lambie) va donc se partager le temps de jeu avec Rémi Talès à l’ouverture. Ailleurs, Juan Imhoff, Henry Chavancy ou Joe Rokocoko entreront aussi dans la danse. […] Après cette revue d’effectif, les meilleurs joueront contre Clermont. Il n’y a aucun passe-droit. Dan (Carter) le sait. » Et qu’on le veuille ou non, l’ancien meneur de jeu des «Tout Noir» amène aujourd’hui moins à cette ligne d’attaque que le Springbok Lambie ou le sous-coté Rémi Talès, rarement décevant depuis le début de saison…

Si la participat­ion de Dan Carter au quart de finale de Coupe d’Europe n’a jamais semblé aussi douteuse, on peut en revanche parier que Virimi Vakatawa prendra place aux côtés de Chavancy, le 1er avril au Michelin. Lui que l’on aurait pu imaginer rongé par le doute après des dernières performanc­es catastroph­iques en équipe de France fut, au moins lors du derby, l’homme de tous les dangers. Puissant, agile, renversant parfois, son entrée en jeu fut déterminan­te dans la résurrecti­on du Racing en deuxième période, à la U Arena. Laurent Labit, encore : « Après avoir été libéré par Jacques Brunel, Virimi est revenu au Plessis-Robinson particuliè­rement motivé. Le Tournoi des 6 Nations a été difficile pour lui, il n’a pas été performant sur les deux matchs qu’il a disputés à l’aile (Irlande et Écosse) et en est d’ailleurs très conscient. Aujourd’hui, son envie est donc décuplée : il a envie de jouer, de renverser des défenseurs, de prendre du plaisir et marquer des essais. » Au sujet de l’internatio­nal français, la question est désormais la suivante : n’est-il pas dix fois meilleur au centre qu’il ne l’est à l’aile ? « Pour moi, si, tranche Labit. C’est en tout cas à ce poste que nous travailler­ons avec lui jusqu’à la fin de la saison. Et c’est aussi son souhait. Sur les extérieurs, je vous rappelle aussi que nous avons beaucoup d’options avec Marc Andreu, énorme contre le Stade français, Juan Imhoff, Teddy Thomas ou encore Joe Rokocoko… »

Le Stade français a manqué un point de bonus défensif précieux en mélangeant à l’envers les cartes de ses ouvreurs sur le tapis de la U-Arena. Morne Steyn a manqué la dernière transforma­tion. Cette tentative excentrée, pourquoi l’a-t-il tapée ? Jules Plisson passant deux jolis coups de pied en bord de touche en première mi-temps, s’était montré irréprocha­ble sur ce domaine de prédilecti­on. Plus tôt dans la partie, au moment de la réorganisa­tion opérée à la sortie de Romain Martial, Jules Plisson avait glissé à l’arrière, le remplaçant Morné Steyn rentrant pour prendre sa place à la conduite du jeu. En dernier rempart, l’ouvreur ainsi reposition­né a alimenté la chronique de son insuffisan­ce défensive, en manquant un placage décisif en travers sur Marc Andreu, ce qui a fait un essai à sept points. À l’ouverture, Morné Steyn a commis une faute profession­nelle envers ses camarades du paquet d’avants, en ne trouvant pas une touche à l’issue d’une séquence étouffante. Plusieurs mêlées à cinq mètres avaient été défendues. Ils avaient remis le couvert sur une pénaltouch­e. À l’issue de ces six minutes de résistance acharnée - le score était de parité cet instant - le ballon avait été récupéré. Et pourquoi tenter de trouver une touche immense en pareille occasion, plutôt que de solder l’affaire et d’offrir un temps de repos mérité en balançant la gonfle en tribune ? Steyn a manqué cette touche, ce qui a produit une relance indéfendab­le après la séquence défensive déjà subie auparavant, et le deuxième essai consécutif de Teddy Thomas. Alors que leur période de bricolage commande aux Parisiens une justesse d’action dans les moments clefs, ils ont gâché par ces imprécisio­ns l’opportunit­é jouissive de dire « good game » à leurs voisins de paliers en produisant par ce derby leur première défaite dans leur gymnase. C’est vraiment dommage. Tout le reste avait si bien fonctionné.

MACALOU EN 8 ?

Entre l’éviction de leurs deux adjoints, la mise à l’écart d’une partie du groupe jugé inapte à la pratique du top 14, et l’informatio­n de la venue la saison prochaine d’Heineke Meyer - « sa venue serait une très bonne nouvelle pour notre projet », a commenté le directeur Robert Mohr dans une litote qui confine à la confirmati­on - Julien Dupuy et Olivier Azam sur un siège éjectable, s’étaient montré habiles dans la tourmente en composant un paquet d’avants très mobile. Avec Sekou Macalou replacé en troisième ligne centre pour la deuxième fois de la saison en Top 14 - la première avait eu lieu contre Toulouse au mois de septembre, et il avait déjà joué au poste deux fois en Challenge Cup - et le génial touche à tout Hugues Pyle de retour aux fourneaux en seconde ligne - il a joué troisième ligne aile le plus souvent cette saison - cette associatio­n a permis de contrer les tentatives de jeu rapide de Nyenga et Nakarawa, et mieux encore, d’ouvrir des brèches dans la défense. Hugues Pyle a manqué de tuer la partie sur la sirène à la fin de la première période, et s’il avait choisi de poursuivre sur son chemin de feintes de passes plutôt que de tenter une transmissi­on acrobatiqu­e impossible pour Steyn, on ne sait quelle dimension aurait pris la colère de Jacky Lorenzetti dans les vestiaires d’en face. Sekou Macalou s’est offert dans son propre camp sur un ballon de relance dans le troisième rideau, un petit coup de pied à suivre pour luimême que n’aurait pas renié Sergio Parisse, et cette fantaisie a créé une dangerosit­é. Oui, le Stade français, dans ce moment de débrouille qui a offert au jeune Baptiste Lafond, le fils de « Jean-Ba », une première apparition en Top 14 ponctué d’un essai en solo - « c’était dingue, je redescends à peine » - avait trouvé des solutions pour faire mieux que cette défaite zéro point. Mais toutes les réorganisa­tions opérées n’ont pas eu le même rendement. Dirigeant historique du Racing Club de France, Maurice Gayraud est décédé la semaine dernière en banlieue parisienne à l’âge de 86 ans. Grand serviteur de ce jeu, bénévole affable, énergique et dévoué, il avait été le manager des Reichel du Racing champions de France en 1978. Maurice Gayraud était aussi l’oncle de Pierre, aujourd’hui flanker de l’Union Bordeaux-Bègles. La rédaction du Midi Olympique présente aujourd’hui à la famille Gayraud ses plus sincères condoléanc­es.

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