SECOND SOUFFLE
DISPARU DES RADARS, OUBLIÉ DE LA SÉLECTION TRICOLORE DEPUIS DEUX ANS, MAXIME MÉDARD A POURTANT ÉTÉ DÉCISIF DANS LE CLASICO. LE PREMIER PAS D’UN RETOUR EN GRÂCE ?
Il n’est pas, ou plus, capable d’accomplir ce que réalise tous les week-ends Cheslin Kolbe. Puisqu’on en parle, notez au passage que les Springboks sont indéniablement dotés d’un flair incroyable pour préférer à l’ailier toulousain n’importe quel bougre de moyen calibre, au prétexte que celui-ci puisse abattre un deuxième ligne au bras de fer. Kolbe, à Paris, ce fut un opéra sauvage, un bel canto chamarré de courses, de passes, d’accélérations féroces et de brutaux changements d’appuis, dont l’un d’entre-eux fit carrément bouffer la pelouse de Jean Bouin -ou ce qu’il en reste, comprenne qui pourra- à Willem Alberts…
À 31 ans, Maxime Médard n’est donc plus en mesure de briller dans ce registre-là et, soyons franc, on se surprit même à craindre le pire au moment où Djibril Camara, parti dix longueurs derrière, fut à deux doigts de le priver d’un essai de quatre-vingt dix mètres. Qu’on le veuille ou non, l’arrière aux rouflaquettes est pourtant pourvu d’un sens inné du rugby, un drôle d’instinct primaire lui permettant d’anticiper, de lire ce jeu mieux que la plupart de ses contemporains. Sans être renversant Porte d’Auteuil, ledit Max a été propre sous tous les ballons hauts, est parvenu à slalomer parmi les soldats roses et, plus globalement, a soulagé les siens par la longueur de son pied gauche. Un bon Médard, en somme. Un Médard à 13/20, bien meilleur que l’ombre qui sévissait au fond du terrain toulousain ces derniers mois.
UNE ÉCLIPSE BÉNÉFIQUE
De ce que l’on sait, l’arrière international avait au départ mal vécu le retour au club de Thomas Ramos : Ugo Mola l’avait décalé sur l’aile gauche pour faire une place dans son 15 majeur à un buteur efficace et, bon an mal an, Maxime Médard semblait s’être résigné à terminer ces deux dernières saisons au « Stade » dans un relatif anonymat. Une libération a-t-elle été évoquée, à ce moment-là de son contrat ? Les dirigeants du Castres olympique ontils alors pris des renseignements sur le joueur ? C’est en effet ce qu’il se raconte, en coulisses. Lui ? Décisif à Jean Bouin, il riposte d’un éclat de rire, n’infirme ni ne confirme, savoure juste un évident bien-être : « Le début de saison a été difficile, je ne le cache pas. En Challenge européen, je me suis fracturé le doigt sur la réception d’un ballon haut. Au bout de quelque temps, les toubibs se sont aperçus que le tendon était pété. J’ai donc dû me faire opérer. En tout et pour tout, j’ai raté trois mois de compétition… » L’éclipse a pourtant été bénéfique et, passé le spleen, Médard (47 sélections) a fini par accepter le nouveau défi qui lui était proposé à Toulouse, un club où il était seul au monde depuis la retraite de Poitrenaud : « La venue de Thomas Ramos m’a poussé dans mes retranchements, dit-il aujourd’hui. Elle m’a clairement sorti de ma zone de confort. » Parallèlement à ça, les performances de Ramos ont baissé d’un ton, Zack Holmes a prouvé à son staff qu’il pouvait aussi être un buteur fiable et, dès lors, la présence de Maxime Médard à l’arrière s’est naturellement imposée. « En France, sourit Ugo Mola, on s’emballe puis on brûle ce que l’on a porté aux nues. Depuis le début de saison, Max a une forte concurrence et cela lui fait du bien, je crois. Sincèrement, on va se gratter la tête pour faire les compos d’équipe… » Alors, on ne jurerait pas que les Toulousains termineront la saison dans cette configuration-là. Mais on n’oublie pas, non plus, que la dernière fois que le Wolverine de Wallon a été titularisé à l’arrière du XV de France, les Bleus s’étaient imposés à Tucuman, face aux Pumas (27-0, en juin 2016). « Quoi qu’il se passe, ajoute-t-il, j’ai toujours l’équipe de France en tête et me battrai pour y revenir. » Auteur de sept essais cette saison, moins léger dans sa préparation physique qu’il ne le fut jadis, Maxime Médard a visiblement retrouvé l’envie de se battre : victime d’une entorse aux cervicales contre Montpellier, il aurait dû échapper aux treize heures de bus séparant Toulouse de la capitale, esquiver l’escale dans « cette sympathique ville de Chateauroux », manquer le troisième succès à l’extérieur de l’année. Deux jours plus tard, il était pourtant de retour à l’entraînement, assurant à Mola qu’il pourrait compter sur lui. À défaut d’être révolutionnaire, ce comportement, chez lui, est bel et bien nouveau…