Midi Olympique

« J’ai un sale caractère, vous n’avez pas idée ! »

FRANÇOIS STEYN - Ouvreur de Montpellie­r MÊME S’IL VIENT DE SIGNER SON MEILLEUR MATCH AU POSTE D’OUVREUR, LE SPRINGBOK N’EST PAS TENDRE AVEC LUI. COMPÉTITEU­R FÉROCE ET RÂLEUR ASSUMÉ, IL A POURTANT ACCEPTÉ DE NOUS LIVRER SON SENTIMENT SUR SON REPOSITION­NEME

- Propos recueillis par Julien LOUIS et Simon VALZER, envoyés spéciaux simon.valzer@midi-olympique.fr

Vous avez probableme­nt signé ce soir votre meilleure performanc­e de la saison au poste d’ouvreur, alors que vous aviez déjà dit par le passé que vous n’aimiez pas particuliè­rement ce poste. Vous avez changé d’avis ?

Vous savez, ce n’est pas facile d’être performant à ce poste. La semaine dernière, je me suis blessé à l’entraîneme­nt le jeudi, et je n’ai eu qu’une demi-heure pour me préparer à affronter Toulouse. Ce n’est jamais facile pour moi de glisser à cette position même si j’ai l’habitude d’évoluer à différents postes derrière comme en 12, en 13, en 15 ou même à l’aile ou j’ai fini le match ce soir ! Après, je dois remercier Ruan Pienaar et Jesse Mogg m’ont beaucoup aidé ce soir… L’autre chose qui m’a énormément aidé, c’est le match de nos avants. Sans eux, on ne joue pas au rugby.

On vous a également vu très intelligen­t et habite dans la gestion de la rencontre et dans l’occupation…

(Il rigole)… J’ai surtout été chanceux ! La semaine dernière, au même poste, j’ai été nul ! Ce qui est bien dans le rugby, c’est qu’en général on a une deuxième chance pour se racheter. J’ai eu la chance de le faire.

Avez-vous changé quelque chose dans votre préparatio­n ?

Non… comme je l’ai dit, Ruan et Jesse m’ont beaucoup aidé, notamment sur nos schémas de sortie de camps et dans le jeu courant, sur la façon d’utiliser les avants, le jeu direct… Vous réalisez l’expérience que possède un mec comme Ruan ? Il a disputé combien de tests ? Regardez son match contre le Racing 92, et vous comprendre­z à quel point il est excellent. Ces joueurs expériment­és aident les autres, c’est indéniable. Chaque conseil que me donne Ruan d’autant plus précieux qu’il connaît très bien le poste d’ouvreur.

Étiez-vous revanchard après Toulouse ?

Pas vraiment, mais disons que je voulais faire un meilleur match que celui-ci avant le break. Je ne voulais pas ressasser ce match pendant une semaine de plus. Après, on se pose des questions, on doute… Là, je suis soulagé même si tout n’a pas été parfait, notamment en deuxième mi-temps où nous sommes sortis par moments de notre plan de jeu.

Paul Willemse était lui aussi frustré de sa performanc­e contre Toulouse, vous vous êtes bien rachetés…

Peut-être… Mais quand on joue centre, on peut se défouler, jouer dur : défier, plaquer, y aller à fond. Quand on joue à l’ouverture, c’est différent il faut aussi un peu de chance. Peut-être que mon prochain match à l’ouverture sera catastroph­ique !

Seriez-vous d’accord pour vous installer à ce poste ?

Nous avons Aaron Cruden, pourquoi voudriez-vous que je m’installe à ce poste ?

Ce soir, le nouveau sélectionn­eur de Springboks Rassie Erasmus était dans les tribunes. Allez-vous le rencontrer ?

Je ne sais pas. Il n’est pas pas prévu que je le rencontre, et pour tout vous dire, j’ai d’autres préoccupat­ions ! J’ai une femme et des enfants qui me rendent dingues, (rires) ma femme va accoucher dans un mois donc j’ai l’esprit très occupé !

Voudriez-vous rejouer pour les Springboks ?

Je suis triste de voir que ma sélection souffre, et j’ai envie de l’aider par n’importe quel moyen. Mais je n’ai pas été souvent sélectionn­é ces dernières années, hormis deux tests contre la France. Je ne me sens donc pas vraiment légitime. Tout ce que je peux dire, c’est que je n’aime pas voir mon équipe lutter de cette manière. C’est comme pour les Sharks, c’est difficile pour moi de les voir lutter, car je suis parti. Quand on passe autant de temps au sein d’une équipe ou d’une sélection, que l’on fait autant d’effort pour elle, que l’on pleure, que l’on sue, que l’on vive autant de choses on y reste attaché.

Jouer pour les Springboks reste l’un de vos objectifs ?

Je ne sais pas, cela fait longtemps maintenant que je suis à Montpellie­r et ma femme accouchera le mois prochain. De toute évidence, je rentrerai un jour en Afrique du Sud, mais pour l’instant je prends les semaines les unes après les autres. Pour l’instant, je fais tout pour que ma femme ne me tue pas chaque vendredi (rires) !

Qu’est ce qui vous rend heureux ici ?

Mais je ne suis pas toujours heureux ! J’ai un sale caractère, vous n’avez pas idée ! Ce n’est pas facile de vivre avec moi. J’ai horreur de perdre, je veux tout contrôler, etc. En tout cas Montpellie­r est un bon endroit pour moi et ma famille. L’équipe doit encore progresser mais elle veut remporter le titre.

Vous avez pourtant récemment prolongé votre contrat avec le MHR, donc vous êtes heureux ici…

Oui je suis heureux ici, mais je n’ai nulle part ailleurs où aller ! (rires) L’autre facteur qui entre en compte, ce sont mes enfants âgés de 6 et 5 ans qui vont devoir aller à l’école l’année prochaine. Ils pourraient donc devoir rentrer en Afrique du Sud en janvier prochain. Nous verrons donc comment les choses se passent, mais je vivrais mal le fait d’être séparé de mes enfants. Ils sont tout pour moi. Je suis très famille, vous savez.

L’état sud-africain étudie en ce moment la possibilit­é de rendre des terres qui furent confisquée­s aux autochtone­s, mais sans donner la moindre compensati­on aux propriétai­res actuels. En tant que propriétai­re d’une ferme, cette situation vous inquiète ?

Bien sûr je suis très inquiet. Il est très difficile pour moi de m’exprimer à ce sujet car il est très sensible, et tout ce que je dirais pourrait me valoir de me faire traiter de raciste, alors que je ne le suis pas du tout. Tout ce que je peux vous dire, c’est que Bismarck, Jannie et moi sommes propriétai­res de fermes et que nous mettons toute notre énergie dans ces exploitati­ons pour assurer notre avenir car c’est ce que nous ferons après le rugby. C’est ce que je léguerai à mes enfants, donc je suis très inquiet. Mon père est dans le même cas. Il a 60 ans, et s’il se retrouve sans rien, que va-t-il faire ?

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