Midi Olympique

Rien à perdre ?

- Emmanuel MASSICARD emmanuel.massicard@midi-olympique.fr

Et dire que certains voudraient nous en priver au nom de sacro-saintes vertus d’une ligue fermée à la sauce américaine. Oui, à bien les écouter, le rugby français ferait un pas de géant sur la route du progrès et de la modernité en cloîtrant ses clubs dans une compétitio­n où ils auraient tout à gagner et finalement rien à perdre.

Cette ligue fermée, disputée sur invitation, à la gueule du client et en fonction de l’épaisseur du carnet de chèque serait LA solution idoine pour tous les frileux de notre « mundillo ». Les équipes y gagneraien­t en confort, évidemment. Mais pas sûr qu’elles soient toutes en capacité de profiter de cette absence de pression pour développer créativité, liberté d’action et brio dans l’expression du jeu.

Et puis, permettez-nous d’apprécier un peu l’ambiance du Top 14, qui n’a jamais été aussi acharné et disputé aux premières places, pour la qualificat­ion, comme en queue de peloton, pour le maintien. Alors, qui va descendre ? Agen, Paris, Brive ou Oyonnax ? À cette heure, même si les deux premiers semblent avoir un léger avantage, il est impossible de tirer des plans sur la véritable trajectoir­e de la comète.

Au vrai, tout est encore possible à quatre journées du terme de la saison régulière. Et tout pourrait bien l’être jusqu’aux derniers instants de ce sprint infernal, si le plus fou des scénarios accouchait d’une égalité parfaite au classement. Non, ne riez pas : au petit jeu des bonus, la bande des quatre peut se retrouver à 41 points. Il faudrait alors dénouer les méandres du goal-average pour connaître le nom du relégué et celui du barragiste.

Ces derniers pourront évidemment s’enorgueill­ir d’avoir lutté jusqu’au bout avec les meilleurs malgré la disparité des leurs moyens, humains et financiers. Ce n’est pas la moindre des performanc­es et voilà une forme de gloire, qu’importe au fond qu’elle soit si éphémère, presque vaine au fond. Ce long combat pour l’honneur, porté avec un tel acharnemen­t, force le respect. Mais n’allez pas croire pour autant que la sentence en soit plus douce, bien au contraire.

L’histoire du rugby français prouve que la chute des bastions s’est rarement faite sans fracas. Les chutes programmée­s de Dax et Narbonne, qui sortiront du monde profession­nel d’ici quinze jours, mettent en péril deux monuments de notre sport. Agenais, Brivistes, Parisiens ou Oyonnaxien­s, s’ils ne sont pas rayés de la carte en cas de relégation, devront quand même déployer des trésors d’énergie pour s’inscrire dans un projet de reconquête et ainsi éviter la dégringola­de.

C’est tout l’enjeu pour des formations situées dans le ventre mou du rugby français, sises entre l’exigence extrême d’un Top 14 toujours plus difficile et celle d’un championna­t de Pro D2 qui vogue davantage vers la formation. Pas sûr que le barrage d’accession/maintien soit ici le meilleur moyen de rapprocher ses deux mondes. C’est pourtant tout le défi immensequi attend la Ligue dans les années à venir, pour accompagne­r la progressio­n de ses clubs…

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