Midi Olympique

LA FRANCE VOUS REGARDE

AU PRINTEMPS 2018, LE RACING EST LE DERNIER CLUB FRANÇAIS ENCORE EN LICE POUR LA VICTOIRE FINALE, EN CHAMPIONS CUP. DE QUOI DÉCRÉTER L’UNION SACRÉE…

- Par Marc DUZAN marc.duzan@midi-olympique.fr

Ce ne sont, après tout, que des symptômes de saison : le pouls qui s’accélère, les mâchoires qui se crispent et les nuits qui raccourcis­sent. « Mes gri-gri ne quittent plus mes poches, sourit Jacky Lorenzetti. J’ai aussi du mal à avaler quoi que ce soit et serai probableme­nt exécrable toute la journée de dimanche… » Sur le vieux continent, le coup de canon a retenti, le sprint final démarré et, pour l’instant, le Racing est dans les temps. En harmonie, tout du moins, avec les objectifs qu’il s’était fixés en début de saison. Peut-il toutefois tordre le cou au Munster, une équipe surfant largement sur le dernier grand chelem irlandais ? C’est une autre histoire. Le président francilien, agacé par la contre-performanc­e des siens en Occitanie la semaine passée, met dès à présent les choses au clair : « À Toulouse (défaite 42-27), les coachs avaient pris la décision de faire tourner l’effectif et je les soutiens. Mais il ne faut pas se mentir : la prestation des concernés n’a pas été aboutie et quelques défaillanc­es individuel­les ont même pesé très lourd dans la balance.Voilà, au Racing, certains joueurs perdent plus souvent que d’autres… J’espère donc que l’équipe, au complet, montrera contre le Munster une tout autre image… »

Dans les Hauts-de-Seine, on hausse le ton, on plante le décor et on fait aussi comprendre à l’adversaire du jour que le commerce agréable qui liait les deux entités depuis cinq ans, date de l’arrivée de Ronan O’Gara dans le bassin parisien, s’est légèrement détérioré ces dernières semaines. Car à l’instant où les dirigeants du Racing, appuyés en cela par les caciques de l’EPCR, demandaien­t à leurs homologues irlandais si la demi-finale de Champions Cup pouvait être disputée ou non à la U Arena, le veto de l’armée rouge fut catégoriqu­e : « Je n’ai pas compris la décision des dirigeants du Munster, poursuit Lorenzetti. Surtout que nous avions été plutôt gentlemen avec eux au jour où ils avaient perdu leur coach (Anthony Foley) en 2016 : je vous rappelle qu’à l’époque, nous avions aussitôt accepté de reporter la rencontre et si c’était à refaire, on ferait évidemment la même chose. Mais cela avait totalement désorganis­é notre saison. » Si le refus des Munstermen, désireux d’évoluer dans le contexte le moins hostile possible, est somme toute compréhens­ible, Jacky Lorenzetti avance aujourd’hui d’autres arguments : « Je pensais naïvement que Paris serait à leurs yeux plus accessible que Bordeaux. Pour leurs supporters, le déplacemen­t en aurait peut-être été facilité. Et puis, les joueurs du Munster connaissen­t l’Arena pour y avoir déjà joué. L’issue est décevante mais on ne va pas tomber dans la pleurniche­rie : je suis en effet convaincu que la ville de Bordeaux et Laurent Marti recevront le Racing de la plus belle des manières. » Oui… Mais bon, quand même… « Si Toulon avait gagné son quart, il aurait joué à Nice. Et si Clermont avait remporté le sien, il aurait évolué à Saint-Etienne… »

FAÇON CRÊPE SUZETTE

Peu avant que ne sonne la rush hour, les bookmakers donnent le Racing favori. De toute évidence, la performanc­e en demi-teinte des Munstermen en quart de finale face à Toulon a quelque peu refroidi les observateu­rs quand,

dans un même temps, le coup de force des Ciel et Blanc au Michelin participai­t au même effort. Éric Blanc, champion de France avec les Ciel et Blanc en 1990, se veut néanmoins plus mesuré : « Le Racing me fait un peu l’effet d’une crêpe Suzette : un coup à l’endroit, un coup à l’envers. Un week-end, je marche sur tout le monde. Le suivant, je prends cinquante points à Toulouse et quarante à Montpellie­r. » De fait, quel visage les Racingmen présentero­nt-ils au stade Chaban-Delmas dimanche après-midi ? Celui, conquérant, du quart de finale clermontoi­s ? Ou l’autre, blafard, des déplacemen­ts les moins aboutis de la saison en cours ? Jusqu’ici, le club des Hauts-de-Seine a su montrer les dents lorsque les circonstan­ces l’exigeaient, au moment même où il était question de vie ou de mort. Il n’y a pas de raison que la donne change, dans le money time. Éric Blanc poursuit : « Je voyais cette équipe vieillissa­nte, en fin de cycle et je me suis trompé. En reposition­nant Virimi Vakatawa au centre, les Racingmen ont donné de la vitesse à leur jeu. Et puis, l’explosion de Leone Nakarawa a clairement changé le visage de cette équipe. Car le Monsieur Plus du Racing, ce n’est pas Lambie, Chat, Lauret ou Machenaud. Le Monsieur Plus du Racing, c’est le deuxième ligne fidjien. Parce qu’à chaque fois où l’équipe s’est retrouvée en difficulté­s, il a toujours su déclencher les actions les plus dangereuse­s en marquant ou en faisant marquer. C’est un Alien… ». Porté par l’immense Leone Nakarawa, boosté par le second souffle de Marc Andreu, probableme­nt soutenu à Bordeaux par le petit peuple du rugby français dans son intégralit­é et globalemen­t assis sur un paquet d’avants conquérant, le Racing opposera surtout aux Munstermen la meilleure défense du Top 14, dont les préceptes ont été importés de Thomond Park par Ronan O’Gara, il y a cinq ans. « Nous avons bien étudié leur système et y avons décelé quelques failles », commentait sobrement le manager du Munster Johan van Graan, en début de semaine. Les « failles » en question n’ont rien de top secrètes et, en usant et abusant du jeu au pied long, en utilisant l’intégralit­é de l’espace ou en choisissan­t de percer les Racingmen là où ils sont le moins nombreux — c’est-à-dire au coeur des rucks — les Munstermen auraient de bonnes raisons de croire que les cartomanci­ennes qui ont toutes juré que 2018 serait l’année de l’Irlande avaient vu juste. Blanc conclut : « Moi, je crois plutôt que le Racing s’appuie sur un mental en titane lors des grands matchs. S’il y avait un billet à mettre, je le mettrais là-dessus… » A vous de jouer.

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