Midi Olympique

« Il y en a qui commencent comme Zidane... »

POUR LUI, DEVENU COACH FIN SEPTEMBRE, LA RELÉGATION DE SON CLUB DE COEUR, DÉSORMAIS OFFICIELLE, DOIT ÊTRE L’OCCASION D’APPRENDRE ET DE REBONDIR.

- Propos recueillis par Jérémy FADAT jeremy.fadat@midi-olympique.fr

Comment le groupe a-t-il vécu les heures qui ont suivi la défaite à Paris ?

Mathématiq­uement, c’est après ce match que le club a été officielle­ment relégué. C’était donc un moment particuliè­rement dur pour les joueurs, l’ensemble du staff, les dirigeants et les supporters. Franchemen­t, c’est difficile à encaisser, surtout quand ça se passe hors de nos bases. Vous arrivez à la réception après, c’est un peu la fête, et vous avez la tête au fond du seau…

Comment préparer la réception de Bordeaux-Bègles dans ces conditions ?

On vit forcément une semaine particuliè­re. Mais il faut le préparer pour gagner un match à domicile. Le public nous a soutenus toute la saison et, malgré notre échec sportif, on doit donner une victoire à nos supporters. Aussi pour les joueurs qui vont disputer leur dernier match sous le maillot de Brive. Il faut respecter ce moment, donc avoir une envie déterminan­te sur le terrain. Il est essentiel de bien terminer et ce sera peut-être le début d’autre chose.

Sentiez-vous les joueurs fatigués et usés depuis plusieurs semaines ?

C’était un peu le tempo de toute la saison. Mentalemen­t, ce fut difficile pour eux. L’entame a été complèteme­nt loupée avec trois défaites d’affilée à la maison. Derrière, il y a eu le départ de « Carbo » (Philippe Carbonneau, entraîneur des trois-quarts que Péjoine a remplacé, N.D.L.R.) qui a affecté beaucoup de personnes. Nous sommes bien revenus au creux de l’hiver mais le revers à domicile contre Pau (le 17 février) a fait très mal. C’était l’occasion de basculer du bon côté. Derrière, encore chez nous, nous perdons à la dernière minute contre Clermont puis contre Lyon. Honnêtemen­t, c’est délicat de remettre le bleu de chauffe tous les lundis après s’être incliné ainsi. Nous, membres du staff, répétions aux joueurs qu’il fallait y croire malgré tout. Mais le problème, c’est que les autres avancent aussi pendant ce temps. Il est arrivé ce qui devait arriver même si nous sommes tombés les armes à la main à Paris la semaine dernière.

Vous étiez joueur lors de la dernière relégation du club en 2012. Vous la vivez aujourd’hui en tant qu’entraîneur. Est-ce la même sensation ?

On le vit différemme­nt. Quand tu es joueur, tu te bats sur le terrain et tu as l’impression de tout donner. Tu rentres aux vestiaires, tout sale, avec tes crampons encore aux pieds… Tu es vidé d’abord physiqueme­nt. Quand tu es coach, c’est peut-être encore plus frustrant. La souffrance est mentale et morale. Tu as envie d’accompagne­r les mecs, de les aider mais tu n’es plus sur le terrain. Maintenant, j’ai vécu deux montées avec Brive en tant que joueur. J’espère en connaître une troisième, comme entraîneur.

Justement, pour vous qui êtes un jeune entraîneur, cette saison douloureus­e peutelle être enrichissa­nte ?

Pour savoir gagner, il faut aussi savoir perdre. La saison a été dure pour tout le club. Philippe Carbonneau est parti et on m’a demandé de venir épauler le staff en place. Je l’ai fait avec le plus d’envie et d’enthousias­me possible. Il y a des mecs comme Zinédine Zidane qui commencent avec deux Ligues des Champions. D’autres avec une relégation en fin de saison. Tu te construis toujours avec ce que tu es et ce que tu mérites. Mais je ne me pose pas trop de questions. J’apprends dans ce métier et je me sers de toutes les expérience­s pour apporter le maximum aux joueurs et avoir un discours cohérent. Mais, pour l’heure, mon cas personnel passe au second plan.

En 2012, Brive avait su se servir de la descente sportive pour se reconstrui­re et rebondir avec une remontée directe. Faut-il s’appuyer sur cette expérience ?

Le club l’a déjà vécu il n’y a pas si longtemps, c’est vrai. Nous sommes remontés dans ce championna­t devenu si exigeant, il y a cinq ans, et nous avons su nous y maintenir durablemen­t. Maintenant, il faut oser avancer. On voit que même les plus petits clubs de l’élite se structuren­t de plus en plus. En Pro D2 aussi, tout évolue à une vitesse folle. On doit garder les valeurs qui ont fait la réussite de Brive mais, je le répète, il faut se structurer encore plus. Cela passe par la formation, jusqu’à l’étage supérieur.

La reconstruc­tion a déjà démarré au niveau du staff (voir page 26) mais aussi de l’effectif, avec une période durant laquelle de nombreux joueurs brivistes sont forcément convoités par d’autres écuries…

Cela fait partie du monde profession­nel. C’est le jeu. On doit tous être très pragmatiqu­es et profession­nels dans la reconstruc­tion de l’effectif. Il ne faut pas avoir peur car le but est qu’il soit très compétitif dès la saison prochaine. Cela passe par des joueurs qui ont beaucoup joué avec nous ces derniers mois et par des jeunes à fort potentiel qui croit en notre club, en notre projet. Le but, c’est d’avoir un groupe digne du CA Brive. Ce club a plus de cent ans, il existera après la saison à venir, il existera encore dans dix ans et il existera encore quand ceux qui sont aujourd’hui ses acteurs ne seront plus là. À nous tous de respecter cela.

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