Vent de fraîcheur
Voilà qui devrait être obligatoire : après dix années - voire cinq si on veut bien se montrer généreux - à couvrir les duels bodybuildés du Top 14 ou à analyser le jeu toujours plus désolant de notre XV de France, chaque journaliste devrait être envoyé sur une Coupe du monde des moins de 20 ans. Pour s’y refaire une santé. Aussi pour retrouver foi en ce sport dont les dérives sont sans cesse soulignées, dénoncées et regrettées sans que personne ne soit réellement en mesure d’y rémédier. Allez d’ailleurs demander à Rémy Grosso ce qu’il en pense après ce week-end dévastateur pour le rugby français, sacrément douloureux pour lui. Ou attendons que les médecins lui donnent le feu vert pour prendre l’avion et lui soumettre la question une fois sur notre territoire. Alors, le trait est-il volontairement grossi ? Oui, forcément. Mais franchement, quel bonheur d’observer ces gamins si naturels, si enthousiastes, si frais et finalement si spontanés. Peut-être, ou sûrement même, parce qu’ils n’ont pas encore été formatés par ce professionnalisme qui laisse peu de place à l’authenticité. C’est vrai sur le terrain, avec des festivals offensifs, des ambitions de jeu incessantes et donc des mouvements séduisants. Bien sûr, il ne s’agit pas non plus d’être idéaliste, ces garçons sont portés par l’insouciance de leur 18 ou 19 printemps.
Mais qu’importe la naïveté, tant que c’est agréable pour les yeux. Et la maxime est également vraie en-dehors du terrain. Quelle réjouissance de s’adresser à ces mômes heureux d’être là, qu’on s’intéresse à eux et donc franchement avenants à l’heure de vous de adresser la parole après le coup de sifflet final. Ce mardi soir, les Bleuets se feront peut-être renverser, comme leurs aînés, par les Néo-Zélandais (on leur souhaite évidemment le contraire) mais, pendant deux semaines, ils auront au moins eu le mérite de nous charmer. Par leurs qualités et leur accessibilité. Et même s’ils finiront certainement, comme les autres, par s’enfermer dans un cadre parfois désespérant, on aura déjà apprécié. ■