« SUPPORTER » POUR MIEUX CONTESTER
SAMEDI DERNIER FACE À L’AFRIQUE DU SUD, LES ANGLAIS ONT ADOPTÉ UNE MÉTHODE DE « CONTEST » DES PLUS INTELLIGENTES, QUI VOIT UN PARTENAIRE DU GRATTEUR LE SOUTENIR PAR L’ARRIÈRE POUR LUI ÉVITER D’ÊTRE BASCULÉ AU SOL PAR LES DÉBLAYAGES ADVERSES. UNE TECHNIQUE
Ce n’est plus un scoop : alors que les phases de conquête n’ont probablement jamais été aussi propres, le secteur du jeu au sol n’a proportionnellement jamais été aussi prépondérant qu’aujourd’hui. D’un point de vue offensif, la domination des mêlées spontanée s’avère en effet cruciale pour mettre en place son jeu tandis qu’en défense, ralentir les ballons demeure le meilleur moyen de s’assurer un premier rideau performant. Ajoutez à cela le fait que les ballons de récupération demeurent (et de loin) la meilleure des armes dans un jeu dont l’alpha et l’omega réside dans la rapidité des transitions entre attaque et défense, et vous comprendrez un peu mieux à quel point la moindre innovation en matière de jeu au sol peut s’avérer décisive.
Qu’il s’agisse d’exploiter une faille du règlement (comme en ont été capables en leur temps les Blacks de Richie McCaw en s’engouffrant dans la brèche de la subtile transition entre plaquage et ruck, où les Italiens et leur fameux ruck fantôme, avant que des ajustements du règlement ne viennent mettre un terme à ces petites manoeuvres…) ou tout bonnement d’innover en matière technique. Les phases de ruck constituent un champ de recherches infini ; ce à quoi le XV d’Angleterre a apporté un nouvel exemple d’inventivité dans sa série de tests face à l’Afrique du Sud. Cette nouveauté ? Elle se matérialise dans une nouvelle forme de « contest » au sol. Ou plutôt du soutien au partenaire qui conteste… Le XV de la Rose est parti d’un postulat, selon lequel il est de plus en plus difficile de gratter des ballons dans les rucks. La faute en premier lieu à des techniques de déblayage toujours plus limites qui visent à éliminer le gratteur en le faisant basculer au sol selon la technique de déblayage, dite du « crocodile » (ou de la tortue), mais en raison d’un arbitrage beaucoup plus strict vis-à-vis des joueurs qui ne « supportent pas le poids de leur corps » (selon l’expression consacrée par les arbitres), lesquels « attaquent » non pas le ballon mais le sol, en posant les mains par terre avant de contester le ballon.
LE « DÉBLAYAGE CROCODILE » RENDU INEFFICACE
Voilà pourquoi, lors de leur premier test face à l’Afrique du Sud, on a vu émerger chez les joueurs anglais une nouvelle attitude. Plutôt que de rester statique (et donc inutile) lorsqu’un de ses partenaires tente de contester un ballon, son soutien le plus proche a pour mission de se joindre à ce dernier et de se lier à lui afin d’assurer son équilibre. Cela dans une double optique… En saisissant au-dessus des hanches le partenaire qui conteste, celuici est d’abord beaucoup plus difficile à faire basculer pour les déblayages adverses, rendant la technique du « crocodile » quasiment inefficace. Surtout, en « supportant » son partenaire, on lui permet de ne plus avoir à se soucier de son propre équilibre, lui évitant donc la tentation de poser les mains ou un genou au sol. Et donc un risque d’être sanctionné pour ne pas « maîtriser le poids de son corps ». Simple, mais il fallait y penser !
Cette technique de soutien a d’ailleurs permis au XV de la Rose de récupérer quelques pénalités face aux Springboks, malgré un arbitre sudiste (le néo-zélandais ben O’Keefe) pourtant davantage soucieux de permettre aux attaques de disposer de sorties rapides, et donc peu enclin à favoriser la défense par rapport à l’attaque...
Le plus fort, dans cette trouvaille ? C’est qu’elle est évidemment à 100 % légale, rien n’empêche évidemment un joueur de se lier à un partenaire dans un regroupement. Voilà pourquoi il ne nous étonnerait guère de voir, dès le mois d’août prochain, cette technique de « soutien au contest » se propager largement et rapidement sur bon nombre de terrains du Top 14. Une bonne idée ne résiste en effet jamais bien longtemps au plagiat...