Midi Olympique

ÉCHOUE MIEUX

- Par Jacques VERDIER

Une semaine aura suffi à nos Bleus pour changer de visage. La mine stuporeuse, un peu mollassonn­e du premier test, aura ainsi laissé place à des traits plus affirmés, une autre force de caractère. Il faut s’en féliciter sans céder à ce poison typiquemen­t français du contenteme­nt facile. Les Blacks qu’ils ont eu à affronter samedi n’étaient pas les meilleurs qui soient. Ils me sont même apparus, par moments, très sûrs d’eux, au point d’adopter une forme d’insoucianc­e qui ne leur ressemble par vraiment, donnant la désagréabl­e impression d’une équipe qui sait n’avoir rien à craindre et expédie-là les mornes affaires courantes. Cela n’enlève rien, bien sûr, au mérite français, dont le jeu, dans cette course à obstacles infranchis­sables, fut autrement précis, soigné, honorable, sans cesse rehaussé par un fort tempéramen­t. Des joueurs sont en passe de s’y révéler et c’est de très bon augure. On a envie de leur souffler les encouragem­ents que proférait Samuel Beckett à un jeune auteur soumis à l’échec : « Peu importe. Essaie encore. Échoue encore. Échoue

mieux. » On en est un peu là, il me semble, à la veille d’un troisième test que les Blacks, eux aussi, pourraient appréhende­r de manière plus sérieuse.

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Je ne sais pas, à l’heure où j’écris ces lignes, ce qu’il est advenu des Bleuets en finale contre l’Angleterre. Mais comment ne pas souscrire à l’enthousias­me général procuré par cette jeune phalange, admirable face à l’Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande et qui représente, à y bien regarder, la plus sûre raison d’espérer des Français pour les années à venir. Leur jeu, idéalement balancé entre attaque et défense, dans une sorte de continuum parfait, aura redonné des couleurs à tous les amoureux de ce sport si souvent déçus ces dernières années. À quoi s’ajoute le vrai talent individuel des Bamba, Geraci, Joseph, Woki, Carbonel, Ntamack, Laporte - il faudrait les citer tous ! - dont il faut espérer qu’ils ne seront pas, demain, cantonnés à des rôles de simples faire-valoir dans le championna­t le plus bête du monde. Si l’on sait les suivre, les aider, les prolonger, ils seront les forces vives du rugby de France en 2023 et c’est peu dire qu’on le souhaite.

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Je m’étais opposé, il y a quelques années, à notre ami Marcel Martin, partie intégrante alors de World Rugby, à propos de la date de la Coupe du monde. L’exemple du foot me semblait suffisamme­nt édifiant, pour préconiser qu’elle se joue aussi au printemps plutôt qu’à l’automne. Marcel prétendait le contraire, au prétexte d’un calendrier NordSud trop lourd à changer, sans qu’il n’ait jamais su me convaincre. Les raisons de mes préférence­s continuent, pardonnez-moi, de me sembler évidentes. Au printemps, quel que soit l’hémisphère, il fait beau, les journées sont longues, les vacances approchent, la gaieté est de mise et les gens sont dans une dispositio­n de coeur et d’esprit propre à s’enthousias­mer pour une chose aussi futile et merveilleu­se qu’un Mondial de sport. Les médias même, sevrés d’actualité, y consacrent des pleines pages, des heures d’antenne, que la rentrée d’octobre n’autorise plus. Pourquoi ne pas changer ? Pourquoi ne pas insuffler un vent nouveau sur le front européen - l’hémisphère Sud étant lui assuré du printemps d’octobre ? S’il est une seule et bonne raison de mettre nos pas dans ceux du football, c’est bien ici qu’il faudrait le faire.

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