Midi Olympique

« Des erreurs trop grosses »

- Propos recueillis par Arnaud BEURDELEY, à Dunedin arnaud.beurdeley@midi-olympique.fr

GREG COOPER - Ancien entraîneur de Stade français ORIGINAIRE DE DUNEDIN, GREG COOPER, SEPT SÉLECTIONS AVEC LA NOUVELLE-ZÉLANDE, STIGMATISE LES ERREURS GROSSIÈRES DANS LE SECTEUR DÉFENSIF DU XV DE FRANCE. POUR LUI, IMPOSSIBLE DE RIVALISER AVEC LES BLACKS DANS CES CONDITIONS. Où se situe l’écart entre les deux équipes ?

À Dunedin, les Français ont prouvé qu’ils étaient capables de développer un rugby offensif de qualité. Encore une fois, ils ont trouvé beaucoup de solutions grâce à leur jeu de passes après contact. Mais ils n’ont pas été performant­s en défense. Il y a eu quelques jolis plaquages, certes, mais surtout beaucoup de mauvais choix et de grosses erreurs de placement. Ils se sont resserrés autour des rucks, pour faire face à la pression physique que leur imposaient les NéoZélanda­is. Mais cela les a trop fragilisés sur les extérieurs. Ensuite, le défenseur se trompait souvent de zone et d’attaquant sur lequel intervenir. Des erreurs trop grosses, face à une équipe de la qualité des All Blacks. La défense française est toujours un chantier prioritair­e.

Les Français auraient-ils dû ralentir le jeu ?

Sur cette pelouse synthétiqu­e, ce sont toujours des matchs rapides. Il faut vous préparer en conséquenc­e. Pour le ralentir tout de même autant que possible, il faut être fort en conquête. Cela vous permet d’imposer votre rythme. Idem pour ce qui est des rucks. Mais dans ces deux secteurs, les All Blacks ont livré une bien meilleure performanc­e qu’à Wellington. Ils ont été dominants. À partir de là, ils choisissai­ent le rythme. Les Français n’avaient pas vraiment le choix.

Quand ils évoluent à 100 %, les All Backs sont-ils imbattable­s ?

Je vois des nations qui se rapprochen­t d’eux. J’ai regardé la série entre l’Irlande et l’Australie, qui fut absolument superbe. Les deux nations ne me semblent pas si éloignées des All Blacks. Idem concernant l’Afrique du Sud et l’Angleterre, qui viennent de livrer trois superbes rencontres. Les Néo-Zélandais gardent un temps d’avance, mais je ne les pense plus si souverains. Le Rugby Championsh­ip qui se profile va être intéressan­t. Je pense que les All Blacks vont rencontrer des équipes qui vont leur poser de réels problèmes.

Les trois test-matchs entre la NouvelleZé­lande et la France ont été marqués pour des polémiques d’arbitrage. Quel regard portez-vous dessus ?

Il y a des choses que je trouve incroyable­s. Prenez le carton rouge de Benjamin Fall : clairement, il fixe le ballon, il est pleinement focalisé sur son duel aérien et il est bousculé dans sa prise d’élan. Qu’on puisse mal juger l’action, à vitesse réelle, je le comprends. L’arbitrage est un métier difficile, où il faut juger en même temps une grande somme d’événements, tous très rapides. Mais qu’on décide d’un carton rouge après arbitrage vidéo, ça me sidère. C’est une décision purement folle. Quand on dispose de temps et d’outils comme la vidéo, on ne peut plus commettre de telles erreurs. C’est un problème sérieux, qu’il faudra absolument résoudre avant la prochaine Coupe du monde au Japon.

Fallait-il accorder l’essai à McKenzie, sur lequel Baptiste Serin est gêné par l’arbitre ?

Sur cette action, au départ, la mêlée française est sous pression. Son orientatio­n n’est pas bonne, elle coupe toute possibilit­é d’interventi­on de la troisième ligne. Cela crée une situation tellement favorable pour les All Blacks que, même si l’arbitre n’avait pas commis cette obstructio­n sur le demi de mêlée français, ils auraient sûrement marqué. Pourtant, l’arbitre gène clairement Baptiste Serin sur cette action. C’est incontesta­ble. L’essai aurait donc dû être refusé. Pour moi, il n’y a aucun doute là-dessus.

Est-ce le tournant du match ?

Cela pèse, c’est incontesta­ble. Les All Blacks sont très forts pour imposer leur emprise sur le match, en imposant leur rythme dès que l’adversaire baisse de pied. Après cet essai, on voit que les Bleus prennent un coup sur la tête. Le momentum, la gestion du rythme, bascule alors en faveur des Néo-Zélandais. Ce n’est pas décisif. Les Français étaient trop faibles en défense et les All Blacks auraient fini par dominer le match. Mais cela compte.

Êtes-vous optimiste pour le futur des Bleus ?

J’ai vu des signes encouragea­nts, toute une série de petites améliorati­ons qui me font dire que la France peut, demain, être de nouveau compétitiv­e. Le tout dans un contexte de fin de saison, qui est incroyable­ment longue en France. Vous ne pouvez pas battre les Blacks à la régulière, dans ces conditions. Mais il y a des raisons d’être optimiste pour la suite. À condition, je le répète, de régler ces problèmes défensifs, trop importants pour espérer rivaliser.

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