EST-CE DÉJÀ JOUÉ ?
SI L’ON EN CROIT L’AVALANCHE DE STATISTIQUES FOURNIES À L’ABORD DE CETTE FINALE DE SUPER RUGBY, LES SUD-AFRICAINS N’ONT QUE PEU DE CHANCE DE S’IMPOSER CHEZ LES ROIS DU SUD.
Si vous voulez faire sauter la banque, misez donc sur les Lions et priez fort, mais alors très très fort, pour que les Sud-Africains – cotés à 8 contre 1 par les bookmakers !- l’emportent samedi soir à Christchurch. Battus deux fois lors des deux dernières finales du Super Rugby (face aux Hurricanes en 2016 et aux Crusaders l’année suivante), les coéquipiers d’Elton Jantjies et Malcolm Marx deviendraient en cas de défaite dans l’île du Sud de la Nouvelle-Zélande les « losers magnifiques de Jo’Burgh », l’équivalent ovale de Venus Williams (quatre défaites face à sa soeur Serena en finale de grand chelem) ou des Buffalo Bills, vaincus lors des quatre apparitions qu’ils firent en finale de NFL… Dans l’hémisphère Sud, même Nick Mallett, pourtant fervent défenseur de la franchise de Johannesbourg, a du mal à croire en l’exploit de ses compatriotes : « Les Lions vont être dans le match pendant soixante minutes mais ne gagneront pas. Je peux me tromper mais pour battre les Crusaders, il faut mettre leur charnière (Bryn Hall et Richie Mo’unga) sous pression. Or, pour mettre une charnière sous pression, il faut dominer devant. Et là… » Se dressent huit All Blacks, tous indiscutables ou presque dans le pack de Steve Hansen en équipe nationale, tous considérés comme les meilleurs joueurs du monde à leur poste : ici, le talonneur Codie Taylor est au sommet de son art, le deuxième ligne Scott Barrett n’est pas loin de la plénitude, son compère Sam Whitelock est fidèle à un CV long comme son bras et Joe Moody, le numéro 1 des Tout Noir, broie tout ce qui ressemble de près ou de loin à un pilier droit. « C’est ce qui m’inquiète, analysait cette semaine Nick Mallett au micro de la télévision sud-africaine. Les Lions ont construit leurs dernières victoires sur la domination de leur paquet d’avants et d’excellents mauls pénétrants. Je ne sais pas s’ils seront aussi à l’aise dans ce secteur de jeu, samedi soir… »
De loin en loin, on voit donc mal comment les Crusaders pourraient bien laisser échapper une compétition qu’ils dominent de la tête et des épaules. Depuis que l’ancien flanker de l’Usap Scott Robertson a remplacé Todd Blackadder à la tête des « Croisés » (janvier 2017), les coéquipiers de Kieran Read sont irrésistibles. L’an passé, ils n’ont par exemple perdu qu’une seule rencontre au cours de la phase régulière et restent, cette saison, sur une incroyable série de quatorze victoires de rang !
38 000 SUPPORTERS KIWIS !
Au rayon des chiffres qui tuent, on n’oubliera pas, non plus, que les tenants du titre sont invaincus à l’Ami Stadium depuis l’arrivée à Christchurch de « Razor » (le rasoir) Robertson. Et si après ça, les formidables attaquants sud-africains (le flanker Kwagga Smith, le talonneur Malcolm Marx ou l’arrière Andries Coetzee sont tous de remarquables joueurs de ballons) avaient encore des espoirs de salut, on finira par leur annoncer qu’en quarts et en demi-finale, les Crusaders affichaient un taux de réussite de 96 % au plaquage. Mission impossible, vous dites ? Mais c’est bien pire que ça, ma bonne dame ! Pour la première fois depuis des lunes, le stade de Christchurch sera ainsi plein comme un oeuf, hébergeant pour l’occasion 38 000 jobards n’ayant d’yeux que pour les « Croisés ». Avaient-ils vraiment besoin de ça ?