POURQUOI ÇA BLOQUE
SI LE MODÈLE DU FOOT EST TENTANT, LE RUGBY A AUSSI DE BONNES RAISONS DE NE PAS MODIFIER SA LÉGISLATION, EN MATIÈRE DE TRANSFERTS. VOICI POURQUOI.
En préambule, le directeur général de la Ligue Nationale de Rugby Emmannuel Eschalier explique : « Nous avons, de mi-avril à fin juin, une période dédiée aux transferts. Elle est simplement différente de celle régissant le monde du football. La nôtre doit en effet être clôturée avant que les championnats ne commencent, avec les exceptions que l’on connaît : une période supplémentaire pour les joueurs sans club (les chômeurs ont jusqu’au mois de septembre pour intégrer un club sans être considérés comme joueur supplémentaire, N.D.L.R.), les joueurs supplémentaires (deux par club jusqu’à fin janvier, N.D.L.R.) ainsi que pour les jokers médicaux (jusqu’au printemps, N.D.L.R.). La période des mouvements de joueurs existe donc de la même façon au rugby qu’au foot. » Mais dans le ballon rond, un mercato d’hiver (en janvier) permet également de renforcer les effectifs en cours de saison. « Ce n’est pas le souhait de la Ligue, poursuit Eschalier. Nous ne souhaitons pas que les effectifs soient sensiblement modifiés en cours d’exercice. »
ÉVITER LA MARCHANDISATION DU JOUEUR
Malgré tout, on ne peut s’empêcher de penser que l’interdiction formelle faite aux clubs de foot de contacter, hors mercato, des joueurs ou des entraîneurs sous contrat par ailleurs pourrait éviter, si elle était transposée au rugby, de connaître des situations ubuesques comme celles que vivent aujourd’hui Mauricio Reggiardo ou Christophe Laussucq, annoncés dès le début de la saison comme partants dans un club concurrent. Que craint le rugby, dès lors ? Pourquoi ne pas opter dès aujourd’hui pour le modèle footballistique ? En réalité, le système économique du foot est construit sur les transferts, soit sur un modèle qui pousse les joueurs à changer de club avant la fin de leurs contrats, afin de provoquer un maximum de transactions financières entre les différentes entités. De fait, si le joueur quitte son club à la fin de son contrat, aucun mouvement d’argent n’est alors possible. Dans le ballon rond, il est ainsi très rare qu’un joueur n’ait pas muté avant la fin de son contrat.
Du côté de la LNR, on estimerait aujourd’hui que le système propre au rugby, sans être parfait, empêche surtout la marchandisation des joueurs. En effet, qu’a-t-on retenu du transfert de Neymar au PSG, si ce n’est les 220 millions d’euros (!) qu’avait dû débourser le Paris Saint-Germain pour racheter plusieurs années de contrat au club barcelonais ? « Au-delà du fait que cette marchandisation ne soit pas souhaitable, conclut Eschalier, encore faudrait-il qu’il y ait une économie pour la soutenir. » Et sauf erreur de notre part, l’économie du rugby est à des années-lumière de celle de son lointain cousin…