Midi Olympique

« Toulon redeviendr­a vite une équipe dangereuse »

- Propos recueillis par Simon VALZER, envoyé spécial simon.valzer@midi-olympique.fr

Comment avez-vous vécu votre premier match à Mayol ?

C’était… Incroyable ! J’ai eu la chance tout au long de ma carrière de jouer dans des grands stades à travers le monde. Mais très honnêtemen­t, je n’avais jamais vécu un truc pareil. Cela a commencé quand on est descendus du bus… Le fait de traverser cette foule, avec les gens qui hurlent, qui vous supportent, qui vous tapent dans le dos… Cela m’a vraiment remonté. J’ai aussi été impression­né par la ferveur du public quand nous sommes sortis des vestiaires pour nous échauffer.

Les publics sont beaucoup plus discrets en Nouvelle-Zélande…

Tout à fait. On ne fait pas tout cela en Nouvelle-Zélande. Même si le Waikato Stadium est pour moi le meilleur stade au monde car c’est ma maison et qu’il a la chance d’avoir de très bons supporters, cela n’a rien à voir avec ici. J’ai aussi beaucoup aimé la tradition de chants que vous avez en France. À Pau, la semaine dernière, tout le stade avait chanté juste avant la rencontre et cela m’avait foutu des frissons. Ici, à Toulon c’est encore pire ! C’est génial de jouer dans une ambiance pareille. On joue au rugby pour vivre ce genre de moments.

Qu’est-ce que cela vous a fait de marquer votre premier essai avec votre nouvelle équipe après seulement quatre minutes de jeu ?

J’ai surtout eu de la chance d’être au bon endroit au bon moment ! Franchemen­t, je n’ai pas fait grand-chose… Mais cela m’a fait très plaisir car je n’avais pas beaucoup marqué ces deux dernières années. C’est bien de relancer le compteur.

Au vu des nombreuses fautes commises par le RCT et la domination castraise, êtes-vous d’accord pour dire que cette victoire est miraculeus­e ?

Nous savions que nous allions affronter la meilleure équipe de France. Notre coach nous l’a répété toute la semaine. Castres, c’est la référence. Ce sont eux qui ont fixé le curseur de la performanc­e. Ils nous ont posé beaucoup de problèmes sur les zones de rucks et nous avons mis du temps à relever leur défi. Mais nous avons une bonne équipe. Nous avons manqué de chance ces dernières semaines et il est vrai que ces nombreuses fautes ont pollué notre jeu. Mais dès qu’elles seront résolues, tout ira mieux et Toulon redeviendr­a vite une équipe dangereuse, croyezmoi. J’ai vraiment hâte d’avancer dans la saison que chaque joueur de l’effectif donne son plein potentiel.

Vous attendiez-vous à ce qu’une équipe disposant d’un groupe aussi fort que Toulon connaisse un début de saison poussif ?

On ne sait jamais ce qu’il va se passer, mais mes coéquipier­s ne cessent de répéter qu’il ne faut pas s’affoler, que la saison est très longue. Quand j’ai signé ici, je savais où j’allais. Je rejoignais un club animé d’une grande fierté, avec une longue histoire et un grand palmarès. Par conséquent, un club dans lequel on a la pression du résultat. Mais je comprends aussi que le groupe a été profondéme­nt remanié à l’intersaiso­n. Pas moins de 16 départs, je crois ? Il y a aussi un nouveau staff. Cela fait beaucoup. En revanche, je vois comment tout le monde bosse tous les jours, et je me dis qu’on va dans la bonne direction. J’ai toujours été très exigeant avec moi-même et avec les autres concernant l’éthique de travail. Je suis heureux de voir que tout le monde ici la partage. Ce travail s’est vu dans les dernières minutes du match, quand l’équipe a su trouver les ressources pour arracher la victoire.

De quoi Toulon a besoin, aujourd’hui ?

De travail. Et de confiance. Le groupe doit croire en lui. C’est un groupe avec de jeunes joueurs, notamment aux postes à fortes responsabi­lités à l’image d’Anthony Belleau ou Louis Carbonel, qui ont joué dimanche. À mon sens, ils sont encore un peu discrets dans leur communicat­ion. En NouvelleZé­lande, les ouvreurs passent leur temps à parler à leurs coéquipier­s. Ils commandent tout. Anthony et Louis n’en sont pas encore là, mais cela va venir à mesure que les semaines et les mois passeront. Ces jeunes sont très importants pour nous. Ce sont eux qui doivent conduire le jeu.

Le RCT peut-il construire sur cette victoire ?

À 100 %, oui. Vaincre l’actuel champion de France est la meilleure chose qu’il pouvait nous arriver. Le groupe doit en retirer le maximum de confiance. Certes, les quatre points nous donnent un peu d’air au classement, mais je retiens surtout que remporter ce genre de match à couteaux tirés est excellent pour forger le caractère. Ce fut dur, nous avons commis des fautes, joué même à treize contre quatorze. Mais à la fin, cette victoire n’est pas due à la chance. Elle est due au boulot colossal que l’équipe a abattu sur le terrain. Je pense donc qu’elle va aider les joueurs à se resserrer. C‘était d’ailleurs très bon de voir tous ces sourires dans le vestiaire.

À l’issue du match, le manager Patrice Collazo a tenu à retrouver ses joueurs autour d’un verre. C’est une façon de renforcer les liens ?

Tout à fait. C’était une façon de récompense­r l’équipe pour tout le dur travail accompli tout au long de la semaine. Pour moi, c’est important car je suis nouveau ici et que je joue aussi au rugby pour cela : rencontrer des gens, créer de nouvelles amitiés. J’ai été très bien accueilli par mes coéquipier­s toulonnais.

Connaissie­z-vous Patrice Collazo avant de venir à Toulon ?

Non. Je sais qu’il entraînait La Rochelle car j’ai quelques très bons amis là-bas comme Tawera Kerr-Barlow ou Victor Vito. J’aime assez sa conception du rugby, sa façon de nous le faire pratiquer. C’est quelqu’un d’exigeant, qui nous fait bosser dur et qui aime la discipline. C’est excellent pour un groupe. Sur le plan technique, il prône un rugby qui ressemble beaucoup à celui pratiqué en Super Rugby, donc cela me convient tout à fait. Tout est une question de temps : l’équipe doit maintenant assimiler ce plan de jeu pour se sentir plus à l’aise. J’ai aussi apprécié le fait de retrouver Juan dans le staff (Juan Martin FernandezL­obbe, N.D.L.R.). Je le connais depuis 2002 ou 2003, je crois. Je l’ai souvent côtoyé à XV comme à VII et je l’apprécie. Lui aussi est exigeant. Auriez-vous imaginé qu’un jour, il vous entraînera­it ? Jamais ! Et pour tout vous dire, je ne savais même pas qu’il allait devenir l’entraîneur des avants cette saison ! Je savais qu’il était là, mais j’ignorais qu’il m’entraînera­it ! Avez-vous consulté votre ami Tawera Kerr-Barlow avant de signer à Toulon ? Non, j’ai préféré appeler des joueurs qui étaient passés par le RCT et qui connaissai­ent vraiment le club. C’était pour m’assurer que l’environnem­ent serait vraiment bon pour mon épouse et mes deux garçons. Je suis très famille vous savez… Ils sont ma priorité. Avez-vous déjà ressenti la pression inhérente au Top 14, qui est un championna­t avec des relégation­s ? J’ai compris la semaine dernière que quand on joue à Toulon, on a pas mal de pression. Comme je vous l’ai dit, on a de jeunes joueurs ici qui ont besoin d’être soutenus. Moi, je suis là pour aider. Faire profiter mes partenaire­s de l’expérience que j’ai pu amasser au cours des années. Sinon, j’aime votre format de championna­t ! Je le trouve plus stimulant que d’autres… Au moins, les mecs qui jouent en Pro D2 se battent pour quelque chose. Et ceux en Top 14 font tout pour éviter de descendre. À 34 ans, ne craignez-vous pas la longueur des saisons en France ? Non, pas plus que cela. Vous savez, ce sujet revient souvent sur la table mais je vous assure qu’une saison dans l’hémisphère sud peut être longue aussi ! Quand vous ajoutez le Super Rugby, les matchs internatio­naux, le circuit à VII, le championna­t des provinces et celui de votre club local, ça en fait des matchs ! Mais c’est plus fort que moi, j’adore jouer au rugby. Je pourrais jouer tous les jours si je le pouvais. Êtes-vous accro ?

Vous ne croyez pas si bien dire ! Depuis tout jeune, le rugby est une véritable drogue pour moi. Même en devenant internatio­nal, j’ai toujours continué à jouer pour mon club de deuxième division, Rotorua Marist, dès que j’en avais l’occasion. J’ai encore joué avec eux en juin dernier. Tout le monde ne fait pas cela. Je pense sincèremen­t que je continuera­i à jouer jusqu’au jour où je ne pourrai plus marcher.

Vous allez défier le Stade français, qui comprend de nombreux joueurs sud-africains. S’agira-t-il d’un remake d’un match de Rugby Championsh­ip opposant les All Blacks aux Springboks ?

(Rires) Non… Quand même ! Mais il me tarde de jouer à Paris. Le Stade français est un club mondialeme­nt connu, avec d’excellents joueurs, et j’ai un très bon ami à moi qui y joue… Qui donc ?

« Siegie » ! Siegfried Fisi’ihoi, le pilier droit. Nous avons joué ensemble aux Chiefs pendant de longues années. Mais

il est vrai que le Stade français possède plusieurs joueurs sud-africains… Remarquez, il y a des « Sud-afs » partout de nos jours ! (rires) Le Stade français vous impression­ne-t-il ?

Ils ont très bien commencé leur saison, il n’y a aucun doute. Mais très franchemen­t, je ne prête pas grande attention à l’équipe d’en face. Nous avons tellement de travail ici, que je préfère me concentrer sur les choses que l’on peut contrôler, moi ou mes coéquipier­s. Il me tarde vraiment d’être à ce week-end.

« En NouvelleZé­lande, les ouvreurs commandent tout. Anthony et Louis n’en sont pas encore là, mais cela va venir. Ces jeunes sont très importants pour nous. Ce sont eux qui doivent conduire le jeu. » Liam MESSAM

Troisième ligne de Toulon

 ?? Le troisième ligne all black Liam Messam semble déjà conquis par la ferveur populaire qui entoure le Rugby club toulonnais. ?? Photo Midi Olympique - Patrick Derewiany
Le troisième ligne all black Liam Messam semble déjà conquis par la ferveur populaire qui entoure le Rugby club toulonnais. Photo Midi Olympique - Patrick Derewiany

Newspapers in French

Newspapers from France