Midi Olympique

« Ici, on travaille de plus en plus le plaquage à deux »

- Propos recueillis par Simon VALZER simon.valzer@midi-olympique.fr

Ressentez-vous en Angleterre une vraie vigilance sur la hauteur des plaquages ?

Oui, cela m’avait même marqué à mon arrivée ici. Lors d’un banal entraîneme­nt de reprise, un pilier pris à contre-pied avait le mauvais réflexe de lever le bras et de plaquer haut l’attaquant qui le débordait. Il n’y avait pas eu de blessure, la scène était passée quasiment inaperçue. Mais le lendemain, au débriefing vidéo, le joueur en question s’est fait sévèrement remonter les bretelles par le manager, Todd Blackadder, qui fit un focus vidéo sur le geste pour dire à tout le monde qu’il était inacceptab­le, à l’entraîneme­nt comme en match. La scène m’avait marqué, car c’était vraiment un plaquage haut non intentionn­el, mais la réponse du staff avait été immédiate.

Comment adaptez-vous les entraîneme­nts ?

En Angleterre, quand on travaille ce qu’ils appellent « la cage », qui regroupe tout le travail d’impact, de zone plaqueurpl­aqué, etc. On demande au défenseur de se mettre à genoux. De cette façon, ils prennent l’habitude de viser plus bas, et l’on n’est sûr qu’il n’y aura pas de plaquage haut.

Comment régler le curseur d’un point de vue individuel ?

Il y a deux types de problèmes : le premier porte sur les joueurs qui délibéréme­nt plaquer haut avec le bras, un peu à la manière des Tonguiens il y a quelques années. Là, il y a un gros travail éducatif à faire pour les inciter à se baisser. Ensuite, il y a le problème du mauvais réflexe de lever le bras quand on est pris à contre-pied. Là, c’est plus difficile à régler car cela tient du réflexe. Les joueurs vont donc devoir prendre conscience qu’ils ne peuvent plus se le permettre.

Quels impacts sur le plan collectif ?

Ici, on demande aux joueurs de monter très vite et de plaquer très bas, surtout pour le premier défenseur. C’est à lui de saisir aux jambes. Les staffs valorisent énormément les plaquages bas dans les débriefing­s d’après-match, en les identifian­t comme « positifs ». À l’inverse, un plaquage plus haut est négatif.

Le plaquage à deux devient donc la panacée ?

Oui, c’est ce que l’on travaille de plus en plus dans les clubs. Ici, on appelle cela le « strip » : avec le premier aux jambes et le deuxième qui va au ballon pour tenter de l’arracher. Les Saracens le font très bien d’ailleurs. Ils le font quasiment à chaque fois. Et si le second voit qu’il ne peut pas arracher rapidement, il se replace défensivem­ent pour ne pas être sanctionné par l’arbitre. Mais les Saracens tentent le coup à chaque fois.

Les Anglais vont bientôt expériment­er le plaquage sous la poitrine, pouvez-vous nous en parler ?

Tout à fait, cela va être testé en Coupe Anglaise, qui aura lieu après la Coupe d’Europe. Ici ils communique­nt même autour de cette opération en l’appelant « K.B.A. », soit « Keep the Ball Alive », « Garder le ballon en vie ». L’idée est d’éviter les plaquages hauts mais pas seulement : les dirigeants veulent aussi encourager le jeu après contact qui n’est pas vraiment dans la culture anglaise. Mes enfants jouent au rugby ici, et je vois qu’on les incite beaucoup au jeu direct, avec des courses droites dans la défense ainsi que le fait de garder le ballon plutôt que de chercher à faire jouer après soi.

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