Rip, « Toulonitude »
Mourad Boudjellal n’est jamais à court de néologisme. Après le concept désormais éthéré de « sodomie arbitrale », le président du RCT vient donc de lancer le gimmick de la « toulonitude ». En clair, la « toulonitude » traduit la volonté de s’affranchir de ce qui fit (en partie) la gloire du Toulon contemporain, à savoir des étrangers très chers, souvent très bons et en quête, avant la quille, d’un dernier shoot d’adrénaline, d’un peu de sunshine et d’un gros chèque. De 2010 à 2015, Jonny Wilkinson, Bakkies Botha, Carl Hayman, Bryan Habana, Matt Giteau ou Drew Mitchell ont tous contribué à offrir trois titres de champions d’Europe au RCT, à faire grimper les droits télés du championnat et doper les affluences du Top 14, soit largement de quoi légitimer l’investissement de départ.
Mais voilà. Sur la rade, Boudjellal a décidé de rendre le RCT aux Toulonnais, de donner les pleins pouvoirs à un manager « 100 % Varois » et de mettre sur pied une immense « fabrique à champions », prompte à offrir à la « génération Wilkinson » -celle qui s’est mise au rugby à l’époque de l’ouvreur anglais- l’opportunité de soulever quelques trophées. Et puis ? Toulon a traversé le début de saison que l’on connaît, le RCT a chuté au classement, les travées de Mayol ont connu quelques trous d’air et on a alors jugé, dans le Var, qu’Emerick Setiano, Louis Carbonel, Swan Rebbadj et les quelques autres minots adoubés par Collazo étaient probablement sortis de la « fabrique à champions » un peu trop tôt. Alors, Mourad Boudjellal et son manager ont soudainement arrêté de parler « toulonitude ». Ni une ni deux, ils ont couru en Afrique du Sud puis en Nouvelle-Zélande pour draguer quelques étrangers de milieu de catalogue, ni assez bons pour être retenus par leur fédération, ni trop mauvais pour disputer quelques braves matchs de Super Rugby. Résultat : Nick De Jager et Brian Alainu’uese, jusqu’ici connus de leurs seules mamans, sont arrivés ou arriveront à Toulon dans les jours à venir. Ils pourraient être suivis d’autres Boks sans galon, d’autres Blacks sans médaille. La « toulonitude », elle, pourrait alors faire le chemin inverse, claquer la porte du RCT et se réfugier au bout de la terre, là où elle serait enfin certaine de ne plus être tirée de l’indolence dans laquelle elle s’était réfugiée, ces dix dernières années…