DE LA PNL À L’HYPNOSE
C’est Raoul Barrière qui fut le premier, à ma connaissance, à introduire la sophrologie dans le rugby. Le « grand Béziers » était en avance sur son temps et il n’échappait pas à un esprit aussi avisé que Barrière, l’intérêt que ses joueurs pourraient en retirer. Les skieurs, depuis Killy déjà, les nageurs, les athlètes s’y essayaient aussi. Le rugby fut long à admettre le bienfondé de ces avancées. Je me souviens que deux ou trois ans plus tard, l’entraîneur de la modeste équipe dans laquelle je jouais, se piqua de nous initier à son tour à ces techniques de relaxation. L’affaire dura deux minutes. Le temps qu’un pilier, allongé de tout son long comme le reste de l’équipe, ne lâche un pet retentissant et que, humour de potache oblige, vingt bonshommes s’esclaffent de rire. Dans un autre club, un international, stupéfait que l’un de ses partenaires puisse se prêter à ces billevesées, lui décocha un coup de poing sur le sternum et la séance se termina en pugilat… Ne soyons dupes de rien et surtout pas de cette nouvelle mode qui voudrait nous laisser croire, sur fond de psychologie positive et de développement personnel, que le bonheur — « cette
idée pour les cons », disait De Gaulle — se trouve sous les sabots d’un coach spécialisé dans l’épanouissement de soi. Il y a même dans cette quête effrénée du bonheur, dans ces promesses mirifiques de félicité propagées par quelques pseudo-scientifiques en mal de rémunérations, quelque chose d’indécent. Comme si la vie ne se résumait qu’à ça. Comme si le mal-être et la mélancolie n’étaient pas aussi choses naturelles, porteuses de réflexions sur soi. Mais ne soyons pas non plus réfractaires à tout. J’avais été frappé, à la fin des années 1980, que Robert Paparemborde, alors entraîneur du Racing, évoque les bienfaits de la PNL (programmation neuro linguistique) qui était, alors, d’un usage peu répandu. Tous les sportifs de haut niveau, depuis, se sont prêtés à ces techniques venues des USA, qui visent à maîtriser les émotions, les pensées, ce que les spécialistes appellent « le dialogue interne », à nuancer la réalité des choses à l’échelle de ses propres croyances, etc. Les golfeurs, les buteurs en rugby (Wilkinson en tout premier lieu) en firent leur miel.
On voit apparaître aujourd’hui une autre technique à l’usage des sportifs, dont j’aime à penser qu’elle puisse favoriser l’apprentissage des jeunes notamment. C’est l’autohypnose. Les dentistes, les médecins se sont emparés, depuis quelques années, de l’hypnose dite Ericksoniennne avec des résultats que l’on sait remarquables. Il ne s’agit de rien d’autre à la vérité que d’une forme de relaxation très poussée permettant un dialogue avec l’inconscient, de manière à changer les croyances délétères qui sont en nous. Nées de l’enfance, de l’éducation, d’un pessimisme mortifère, elles nous freinent, nous empêchent. L’hypnose à cet égard et même l’autohypnose, en nous suggérant des messages contraires, peuvent aider à déplacer le curseur de ces croyances. Ne rêvons pas, bien sûr. Il ne s’agit de rien d’autre que d’un outil, ainsi que l’exprime très bien, Jonathan Bel Legroux, dans son manuel pratique d’entraînement mental, « Autohypnose et performance sportive », paru aux éditions Amphora. Aucune vie, sauf à s’y consacrer des années entières, ne changera radicalement sous l’effet de quelques séances. Mais que cela permette de mieux maîtriser le stress, les émotions, la concentration, la confiance, de cela je ne doute pas. Et puis, comme disait mon grandpère pour tout autre chose, « si ça ne te fait pas du bien, ça ne te fera pas de mal. »