LES RAISONS D’UNE IMPUNITÉ
CONTRAIREMENT À SES PRÉDÉCESSEURS, PATRICE COLLAZO ÉCHAPPE À LA CRITIQUE DE SON PRÉSIDENT. VOICI POURQUOI…
L’intronisation de Patrice Collazo au sommet du staff toulonnais aura déjà amené une vertu : Mourad Boudjellal est devenu patient ! Enfin, il apprend à l’être. Et ce n’est pas une posture adoptée par le président du RCT. Week-end après week-end, défaite après défaite, il maintient sa confiance et ne déroge pas à sa ligne de conduite : repousser son amertume pour offrir du temps à son nouveau manager. Surtout, ne pas lui couper la tête prématurément. Surtout, chasser la déception teintée de colère et de honte qui l’a souvent conduit à faire valser ses entraîneurs plus vite que de raison.
Diego Dominguez, Mike Ford, Richard Cockerill ou Fabien Galthié auraient d’ailleurs sûrement apprécié de pouvoir bénéficier d’une telle bienveillance. Même Philippe Saint-André et Bernard Laporte n’ont pas été épargnés par les tempêtes présidentielles. Mais bon, en même temps, Toulon n’a jamais connu une telle première partie de saison… À l’aube de cette huitième journée de Top 14, le RCT version Collazo pointe à la douzième place et se retrouve déjà quasiment éliminé de la Coupe d’Europe.
CAUSE COMMUNE FACE À CHABAL
Alors, comment expliquer l‘impunité présidentielle dont bénéficie Patrice Collazo. Peut-être parce que le manager n’a pas choisi les recrues, qui ne font pas oublier les anciennes gloires toulonnaises… Pour le reste, c’est lui qui a choisi ses adjoints TillousBorde et Fernandez Lobbe (au contraire de tous ses prédécesseurs). C’est lui qui a refusé l’aide d’Éric Dasalmartini, en charge des avants auprès des Bleuets champions du monde. Et c’est toujours lui qui ne veut pas d’un retour de Marc Dal Maso pour l’aider à travailler la mêlée… qui n’est pas le principal problème de Toulon aujourd’hui. « Patrice n’a pas le même effectif à sa disposition », argumente sèchement Boudjellal. Leur union peut paraître contre nature, à tous points de vue. Les deux hommes sont des communicants hors pair, mais de manière diamétralement opposée. Boudjellal est un sniper compulsif : il tire à vue, tout le temps et sur tous les sujets. Sans filtre. Collazo, lui, parle à mots comptés. Le temps des conférences de presse, toujours autour des performances sportives de son équipe. Le reste lui importe peu ; il veille à ne pas s’exposer. À Toulon, il est servi…
Surtout, Collazo veut toujours tout contrôler, à l’extérieur ou au sein de son groupe. Et n’a besoin de personne pour faire passer ses messages. Seule entorse au règlement, Boudjellal l’a aidé à préparer sa réponse aux attaques de Sébastien Chabal, remettant en cause la méthode Collazo, après la défaite concédée face à Clermont. L’expression « Pierre Menès low cost » (pour décrire Chabal) avait été testée par le président avant d’être distillée par son manager.Tous deux sont sur la même longueur d’onde.
CHACUN SON TERRITOIRE
Boudjellal et Collazo ont appris à se connaître. Leurs discussions ont des allures de débats, notamment sur le futur recrutement, mais ils n’affichent jamais leur désaccord. Boudjellal apprécie enfin que Collazo respecte scrupuleusement la hiérarchie et, à l’inverse, le manager affectionne d’avoir les pleins pouvoirs sportifs. Pour le moment, si Boudjellal laisse tranquille Collazo, on le doit également au nouvel actionnaire du RCT, Bernard Lemaître. Ce dernier possède quelques accointances rochelaises ; il est notamment une vieille connaissance de Vincent Merling et porterait un regard très favorable sur l’arrivée de Patrice Collazo ; il serait également en phase avec lui à sur la vision d’avenir du club varois. L’actionnaire minoritaire, qui pourrait prendre un peu plus de place au club dans les prochaines semaines, compte parmi les défenseurs les plus ardents de Collazo. Son avis pèse aujourd’hui et c’est l’autre point d’équilibre capital dans la bonne marche du RCT.