DEUX POIDS, PAS DE MESURE
LE CAPITAINE DES BLEUS A PASSÉ PRÈS DE SEPT MOIS À NE PLUS CONNAÎTRE LE GOÛT DE LA VICTOIRE EN TANT QUE TITULAIRE. UNE PÉRIODE OÙ IL EST POURTANT RESTÉ LE CADRE INCONTESTÉ DU LE GROUPE FRANCE. POUR LUI PLUS QUE POUR UN AUTRE, LA VICTOIRE FACE AUX PUMAS É
Il n’en revenait pas ! Quand dimanche matin dans un couloir sans charme de l’hôtel Mercure de l’aéroport de Lille, où les Bleus avaient posé leurs valises, on lui a appris la statistique, il a tiqué. « Cela faisait si longtemps ? » Oui. Guilhem Guirado n’avait pas remporté une rencontre avec le maillot numéro deux sur les épaules depuis le 14 avril dernier. Sept mois et un Toulon - Montpellier de Top 14 où il n’était resté sur la pelouse que 19 minutes, en raison d’une légère alerte à un genou. Depuis quelle que soit la compétition, il ne connaissait qu’une chose : la défaite et un nul synonyme d’élimination pour être tout à fait juste. Il y a une semaine, face à l’Afrique du Sud, il semblait même dévasté par le nouveau revers des Bleus. « Je vis très mal chaque défaite. Mais celle face aux Springboks a été fondatrice. Dans le contenu nous étions dans le vrai. Il fallait vite basculer sur l’Argentine », glissait-il un large sourire sur un visage qui paraissait apaisé avec cette victoire. « C’est parce que je vais à la récupération, à la piscine » en plaisantait-il.
« COSTAUD DANS LA TÊTE »
La semaine avait été difficile pour le talonneur, toujours exemplaire au niveau de l’état d’esprit mais qui paraissait ces dernières semaines moins fringant. « Ah oui, je ne fracasse plus personne », avait-il glissé en conférence de presse, taquin, à l’issue de la rencontre. Cette victoire semble quand même lui avoir enlevé un poids qui pesait sur les épaules. Comme s’il se sentait responsable de tous les maux de cette équipe. « Guilhem s’investit énormément pour ce groupe » indique Mathieu Bastareaud un brin admiratif. Guirado est l’un des (trop) rares cadres de ce groupe. Il est aussi un des derniers survivants de cette génération champion du monde moins de 21 ans, en 2006, à qui on avait promis le plus bel avenir international et qui n’a pas encore eu de résultats véritablement probants.
Alors, on l’a aussi vu laisser éclater sa joie au moment où il marquait l’essai du break, décisif au tableau d’affichage. « Ce n’est pas le plus beau de ma carrière mais cet essai a tellement de sens : il nous a permis de nous libérer et j’ai ressenti du soulagement dans le regard de mes partenaires. Après ça, nous étions satisfaits d’avoir bien fini le boulot », explicitait-il. « Quand on parle de lui, il y a trois aspects: le joueur de rugby, le capitaine et l’homme, décrypte Jean-Baptiste Elissalde. Quand on est dans sa situation, c’est difficile devant les mecs. Mais quel caractère, quel meneur d’hommes ! Il est vraiment costaud dans la tête. Quand il a marqué son essai, il n’y a qu’à voir tous les joueurs venus l’embrasser. » Durant cet automne il marque un essai par match. Anecdotique ? Peut-être. Mais une chose est certaine, maintenant qu’il a retrouvé le goût de la victoire, il n’a pas envie de patienter autant de temps pour l’avoir de nouveau en bouche.