L’INTRANSIGEANCE AU MANAGEMENT
L’ANCIEN JOUEUR PROFESSIONNEL, TÊTE BRÛLÉE À LA RÉPUTATION SULFUREUSE, EST DEVENU UN HOMME À LA RIGUEUR EXIGEANTE. LES SARCELLOIS EN PROFITENT.
En remportant son derby du Val-d’Oise sur le terrain de Domont (12-17), puis en confirmant son invincibilité à domicile contre Evreux (17-12), l’équipe de Sarcelles a augmenté la domination qu’elle exerce sur sa poule de Fédérale 3. Elle était attendue. Son recrutement promettait sa réussite. Elle joue ses matchs avec une amitié d’équipiers promus en Fédérale 3 il y a deux ans et avec une autre moitié venue des divisions supérieures. Le staff technique a réussi à créer cet amalgame qui, malgré des matchs par forcément aboutis, l’a porté au dessus des autres. Deux responsables sont au centre de cette réussite du moment : l’entraîneur Yoan Pinot et le manager Olivier Missoup, qui se connaissent depuis vingt-cinq ans et qui ont tous les deux grandis en banlieue. Ils sont parvenus à mettre ce collectif en ordre de marche. Une méthode : l’intransigeance absolue par laquelle Olivier Missoup, sulfureux troisième aile du rugby professionnel, a construit toute sa carrière. « C’est le premier flic de France, s’amuse Yoann Pinot. Tout ce qu’il s’est imposé, il le demande aux autres, au président, à l’encadrement et aux joueurs. Et si parfois ça coince un peu parce que tout le monde n’est pas capable de s’imposer autant de rigueur, son exigence a permis de tracer une voie. »
DE L’ENTREPRENARIAT À L’ASSOCIATIF
Issu de la ville de Clichy-sous-Bois, là où il avait débuté le rugby, dans le club de Serge Betsen, jeune adolescent turbulent et leader de quartier, dur au mal et à l’esprit libertaire jusqu’à la confrontation violente, Olivier Missoup avait construit l’une des carrières les plus atypiques. Sa montée rapide vers le rugby pro, en passant par Gennevilliers puis le Racing, sa chute de petit golden boy « bling bling », quand il était redescendu sur un coup de tête en Fédérale 2, à Domont, sa reprise en main et son nouveau départ, en recommençant une nouvelle ascension par la Fédérale 1 et le Pro D2 jusqu’au Top 14, ont fait de cette tête brûlée une âme pensante. Son exemple suprême de manager : Christophe Urios. Sa reconnaissance éternelle va aussi à Tana Umaga et à Mourad Boudjellal, qui l’avaient élevé au rang de priorité de leur recrutement quand Toulon était revenu en Top 14. « J’ai vu et j’ai croisé je ne sais combien d’entraîneurs et de joueurs formidables, qui m’ont permis de grandir et de réaliser ma psychanalyse en jouant au rugby, explique t-il. Aujourd’hui, je veux transmettre ce que j’ai appris. Ça me démange. »
Cette appétit de transmission l’a conduit à monter sa propre entreprise d’accompagnement du sportif et de conférencier en entreprise, « OJ Sport Conseil ». Le troisième ligne de Lyon, Patrick Sobela, est l’un de ceux qui l’a sollicité. Il a aussi fondé une association, « Diamond XV Academy », pour aller dans les écoles établir des « rencontres conférences » avec les élèves des quartiers. La mairie de Clichy lui a confié une programme : « Des diamants et des talents, il y en a plein en banlieue mais ce n’est pas facile de développer son potentiel. Je ne leur parle pas de l’école. Pour ça, je ne suis pas qualifié. Je l’ai quittée trop tôt. Mais la transmission de la discipline par l’expérience sportive est une voie pour canaliser les enfants et les concentrer sur des valeurs positives de développement personnel. » Sa salle de sport chez lui, toujours affûté, son épouse et ses trois filles pour viatique, il a trouvé, la quarantaine approchante, un terrain d’expression dont la sagesse se pose aux antipodes de son image d’enfant terrible du rugby pro. Et au club de Sarcelles aujourd’hui d’en tirer tous les bénéfices, susceptibles de le conduire jusqu’en Fédérale 2.