THIERRY SALOMON, LA PASSION MALGRÉ TOUT
GRAVEMENT BLESSÉ AU COURS D’UN ENTRAÎNEMENT EN 2013, CET ANCIEN MENUISIER A OUVERT UN GÎTE DÉDIÉ AU RUGBY. IL A CÉLÉBRÉ NOËL AVEC SES ANCIENS COÉQUIPIERS INTERNATIONAUX.
Ils sont venus, ils étaient tous là, répondant à son invitation pour célébrer un Noël d’amis dans son « Gîte de France », qu’il a complètement dédié au rugby. Thierry Salomon avait convié symboliquement ceux des internationaux avec lesquels il avait joué, le Marocain Hassan Harad, le Tchèque Piter Scopal, le militaire Liovio Rossi, et Antoine Armenia, qui ont tous été ses coéquipiers dans les divers clubs dans lesquels il avait évolué. La photo de famille a été prise samedi au cours de cette soirée pour laquelle les représentants de la municipalité de Niederhergheim avaient fait le déplacement, ainsi que ceux des Gîtes de France. Thierry Salomon les a tous rassemblés dans ce lieu que, depuis des années, il modèle selon cette passion qui a chamboulé sa vie. L’actualité morbide de la question de la sécurité des joueurs de rugby l’a fait pleurer, lui, l’ancien talonneur chevronné gravement touché en 2013.
DES BALLONS DE RUGBY DANS LES VEINES
Un entraînement comme un autre, un déblayage comme un autre, et des fourmis dans les bras : ce joueur de Colmar qui avait traîné ses guêtres depuis ses 17 ans dans quelques clubs alsaciens, à Chalampé ou à Sélestat, avec lequel il avait glané quelques titres régionaux en qualité de joueur-entraîneur, avant de revenir à Colmar « se finir en national », était reparti travailler comme si de rien n’était à l’issue de cette séance qui l’avait laissé « bizarre ». Il devait se faire opérer quelques jours après d’une double fracture des cervicales. Dans son cou, il porte trois prothèses et deux plaques de fer enserrées dans une cage. Deux ans plus tard, la médecine a expliqué le déclenchement de sa sclérose en plaque par un effet du choc psychologique. « Maintenant, j’ai des ballons de rugby plein les veines », dit-il. Cet ancien menuisier qui avait dû mettre un terme à son activité à la suite du déclenchement de cette sclérose, avait perçu vingt-neuf mille euros d’indemnisation pour cet accident. « Ce n’est pas beaucoup, hein », glisse-t-il. Mais il est toujours là, entouré de ses rêves et de sa passion envahissante, dans ce gîte qu’il avait construit avec son épouse juste avant son accident, et qui est devenu sa source de revenus.
Pelouse synthétique au sol et ballons de rugby dans les encadrements des portes, il a affiché les vingt-deux cravates que Walter Spanhero avait glanées lors de ses apparitions en équipe de France, que le troisième enfant de la lignée la plus célèbre du rugby français, lui avait offert lors d’une visite des « gastronomes du rugby ». Ses deux enfants, le garçon Tym et la fille Ania, Thierry Salomon les a inscrits au rugby. Les deux gîtes - le deuxième est dédié à l’Alsace - portent leurs prénoms. Le rugby est au centre de tout. « C’est comme ça, toutes mes pensées vont pour ce sport. Je ne ressens aucune aigreur, ni aucune injustice. J’ai des frissons dans le dos parfois quand je vois aujourd’hui les gabarits des joueurs qui se rentrent dedans à toute vitesse, et j’ai pleuré quand j’ai appris le décès de ce jeune du Stade français. Mais voilà, la passion reste intacte », assurait-il samedi soir, assis devant cette crèche à taille humaine qu’il a fait construire, en homme démesuré qu’il est resté.