HORS NORMES
APRÈS UNE SORTIE EN DEMI-TEINTE LA SEMAINE PRÉCÉDENTE, LE NUMÉRO 9 INTERNATIONAL A ÉTÉ MAGISTRAL SAMEDI. PREUVE D’UN CARACTÈRE ET D’UN TALENT À TOUTE ÉPREUVE.
Ce fut la comparaison culte d’après-match, signée Ugo Mola à propos d’Antoine Dupont : « Ce garçon arrive à scorer sur des actions que les ailiers targuent d’escroquerie. Sa qualité est d’être présent au bon endroit, au bon moment. C’est le Pippo Inzaghi du Stade toulousain. » Référence à l’ancien avant-centre du Milan AC qui multipliait les buts qualifiés de « raccroc ». « Je connais sa réputation de renard des surfaces qui marque sans n’avoir rien à faire, rigole Dupont. Mais un essai après cinq mètres ou quatre-vingts mètres, c’est cinq points quand même. Et c’est plus facile de marquer comme ça que de tout faire soi-même (sourires). » Samedi, l’international s’est offert un doublé sur deux phases de jeu similaires, derrière des prises d’intervalle de Yoann Huget puis Thomas Ramos. À première vue, il n’avait qu’à finir le travail. Encore faut-il avoir les jambes et le nez pour accompagner ses coéquipiers… « Il anticipe bien, comme tous nos demis de mêlée, explique Ramos. Quand on prend un trou, on sait qu’il y aura quelqu’un derrière. Antoine a cette faculté à coller au ballon et à communiquer quand il nous suit. » Une vertu quasi-instinctive chez cet attaquant né et racé. C’est peut-être là qu’il impressionne le plus, dans sa capacité à sentir les coups. « Le premier rôle du demi de mêlée est de mettre de la vitesse dans le jeu, avoue-t-il. Voilà pourquoi je dois être toujours au soutien. Quand je vois que ça passe, je me dis juste qu’il faudra être présent, soit pour jouer le ballon, soit pour le sortir rapidement derrière. Franchir cette ligne d’avantage, c’est ce qui me fait vibrer sur le terrain, alors je me tiens prêt. Je connais aussi mes partenaires et, sur la ligne de trois-quarts, tous sont capables d’exploits individuels. Je reste un peu en avance sur certains car ils vont plus vite que moi (sourires). Je vais les suivre vingt fois à l’entraînement et ils ne vont la donner que deux fois, mais je leur dis : « N’oublie pas que j’étais à l’intérieur. » Aujourd’hui, ça m’a souri. »
« ÇA COMMENÇAIT À ME RONGER »
S’il est toujours plus surveillé, Dupont ne manque pourtant jamais d’étonner encore. Revenu de huit mois d’absence après sa grave blessure au genou, l’ancien Castrais avait effectué un retour fracassant. Jusqu’à retrouver les Bleus dans la foulée. Mais, il y a dix jours aux Wasps, il a sûrement réalisé sa plus mauvaise sortie depuis sa reprise. Ce que ne cache pas l’intéressé : « On a gagné mais je n’étais pas pleinement satisfait sur le plan personnel. C’était un match avec un faux rythme et je n’étais pas forcément en réussite. » Le staff a néanmoins joué la carte du compétiteur hors normes qu’il demeure en le maintenant dans le XV de départ. La réponse fut cinglante à Ernest-Wallon. Deux essais donc, et une passe décisive magistrale pour Tekori. À vrai, ses potes avaient deviné avant le coup d’envoi qu’il était revanchard. « Dans le vestiaire, il a pris la parole, ce qu’il ne fait pas souvent mais, là, on a senti d’entrée qu’il était déterminé, révèle Ramos. Je crois que ça s‘est vu ! » Dupont poursuit : « Je n’ai pas eu beaucoup de temps de jeu en novembre et, depuis, je n’étais pas content de moi. Ça commençait à me ronger et j’ai voulu m’investir à fond. Il y a parfois des choses que je pense et que je n’ose pas dire. Je dois me faire violence pour m’imposer davantage. » Car le demi de mêlée se sait attendu. Chacune de ses sorties est scrutée à la loupe, rendant les commentaires aussi dithyrambiques que sévères. Lui assume : « Je sais bien que si je ne fais pas trois percées ou si je ne marque pas… Mais ce n’est pas ce qui me préoccupe. »