ET QUE VIVE LE JEU
DANS UN CONTEXTE MOROSE, LE RUGBY FRANÇAIS S’EST OFFERT UNE BELLE ÉCLAIRCIE, CE WEEK-END EN COUPE D’EUROPE. UNE LEÇON : SEUL LE BEAU JEU TRIOMPHERA.
Qu’elle est douce, cette euphorie générale. « Avec dixsept points après quatre journées, dans cette configuration, on a le droit d’avoir le sourire », plaisante l’entraîneur Ugo Mola. Pas faux, tant son équipe était tombée dans un groupe relevé, avec quatre formations titrées dans la compétition. Au-delà du bilan comptable, la manière interpelle. Samedi, alors que la rencontre était gagnée et le temps réglementaire dépassé, les Toulousains ont tenté de marquer un dernier essai quand le staff leur indiquait la possibilité de taper en touche et mettre fin aux débats. Un symbole. « On voulait leur laisser le choix et ils avaient envie de jouer, de faire plaisir à leur public, aux gens qui nous soutiennent, avoue Mola. C’est peut-être grisant mais il faut profiter de ces moments-là. Même si on prend le risque de blesser un ou deux joueurs, il y a deux manières de faire : ceux qui vivent à fond, ce qui est le cas de ce groupe. Et ceux qui gèrent, ce qui n’est pas notre qualité première. » Et c’est franchement enivrant.
Depuis de longues semaines, le Stade toulousain enchaîne les victoires et les démonstrations offensives. « Depuis la saison dernière, on essaye de faire vivre le ballon », clame Thomas Ramos. Même sous la pluie, comme face à des Wasps également ambitieux. « C’est extraordinaire d’un point vue de spectateur, reconnaît Mola. C’était enthousiasmant mais je ne vous cache pas que j’aurais aimé un peu moins de largesses défensives et un peu plus de précision pour se mettre à l’abri plus tôt. Cela nous a mis en danger, comme nos couvertures sur le jeu au pied adverse. On s’est fait peur jusqu’à la 68e minute. » Un avertissement pour la suite. « Contre ces équipes-là il faut absolument mieux défendre pour éviter de se prendre trente points, note Ramos. C’est peut-être dû à un manque de communication entre nous. » Qu’il faudra régler d’ici mi-janvier, quand les Rouge et Noir iront au Leinster pour protéger leur première place. « On a bien sûr besoin de rivaliser et on ira en Irlande conscient que notre adversaire est champion d’Europe en titre, qu’il caracole en tête de son championnat et roule sur tout le monde, poursuit Mola. On a eu la chance de le battre à domicile grâce à un match plein mais il faudra montrer autre chose défensivement. »
MOLA : « DES CHANGEMENTS DE DISQUETTE FRÉQUENTS »
Grâce à deux derniers mois et demi magnifiques, Toulouse s’est offert une parenthèse enchantée. Et même le droit à l’erreur sur la scène européenne, où la qualification n’est pas loin d’être assurée. « Il faudra peut-être un ou deux points pour une place de meilleur deuxième, explique Ramos. Sans toutefois se mettre à faire des calculs, il nous reste deux matchs dont un à domicile. Si on fait le travail contre Bath, on sera automatiquement qualifié. On essaie de ramener le club à sa place parmi les grands d’Europe. Ça n’est pas encore le cas, nous ne sommes pas qualifiés mais c’est bien parti pour. » Et Mola de préciser : « Être capable d’inscrire 42 points face aux Wasps, c’est tout de même une performance qu’il faut savourer. Nous en sommes à neuf victoires d’affilée et, quand vous voyez le calendrier, sans faire offense à personne, on n’a pas battu le fond de la classe. Mais on aura le temps de se pencher sur la Coupe d’Europe. Il faut faire des changements de disquette assez fréquents et celle du Top 14 sera vite importante. Il y a d’énormes échéances et on verra l’issue de la Coupe d’Europe ensuite. »
Référence aux déplacements à Clermont et Agen entrecoupés d’une réception de Toulon. Or, l’objectif est forcément de s’appuyer sur la dynamique actuelle pour prolonger la belle période et sécuriser la deuxième position à l’échelle hexagonale, derrière une ASMCA que les hommes d’Ugo Mola iront défier dimanche avec un effectif amené à connaître des roulements, entre semaine de vacances obligatoire pour les internationaux et besoin de souffler pour d’autres. « La visite chez le leader n’arrive pas dans le meilleur timing mais ce groupe a prouvé qu’il avait des ressources », espère le coach. Des ressources, des vertus et du talent.