Midi Olympique

Tournoi, mon beau Tournoi

- Léo FAURE leo.faure@midi-olympique.fr

On se souvient, tous, de notre première rencontre avec le Tournoi. De ce premier amour qui ne nous quittera jamais. C’est personnel, presque intime. La mienne n’est évidemment pas ancestrale, âge oblige, bien qu’assez vieille pour se vivre encore au Parc des Princes. Le dernier match, en fait, de ces Bleus d’or sur cette pelouse de rois. C’était l’Écosse, Olivier Magne manches courtes et tête haute qui sublimait la croyance en un rugby total, et ce stade, merveilleu­x de chaleur et si grand à mes yeux de môme.

Pour un gamin du Cantal, sûr de la gloire de son Stade aurillacoi­s et élevé aux préceptes fondateurs son école de rugby, voir Magne pointer si haut dans le ciel n’avait rien de banal. Mais l’éveil aux émotions d’un Tournoi reste un souvenir plus fort encore.

C’était un cadeau d’anniversai­re de mes parents. Le Tournoi se mérite, surtout pour un mec de province. Mais j’étais donc là en 1998 pour ce France - Écosse, quand le carré des musiciens à képi lança les hymnes.

Je connaissai­s La Marseillai­se, comme tout le stade. Je connaissai­s aussi le Flower of Scotland. Tout du moins, je le croyais. Mon père l’avait sur un CD « Les chants du rugby » qui tournait en boucle, dans la voiture, les jours de départ en vacances. J’en connaissai­s donc l’air et, de manière plus aléatoire, les paroles, en phonétique. Quand les premières notes de cornemuse ont retenti dans la sono grésillant­e du Parc, je me suis lancé. À ma droite, un vieil Écossais à casquette, tout droit sorti d’une planche de Tintin « L’île noire », m’a souri. Puis il a chanté avec moi. Plus que les matchs, je garde ceci du Tournoi. Les hymnes, aujourd’hui encore. Font-ils la première partie d’un spectacle plus grand qu’eux ? J’en doute. Le Tournoi, ce sont d’abord les hymnes et, accessoire­ment, un match qui suit. Il y a tout dans ces moments de chants, patriotiqu­es sans jamais s’imbiber du mauvais nationalis­me. Il y a le respect de l’autre qui ne gâche en rien la fierté de soi. Il y a la communion, toujours, et la joie, surtout, de voir revenir ce premier week-end de février tant attendu.

Il est là, justement. Une fois de plus et depuis 137 ans. À quatre, cinq puis six nations. Qu’importe. L’histoire est là, immense. Elle ne vous contemple pas, elle vous oblige. Le Tournoi ne sera jamais un laboratoir­e de mi-mandat ou une préparatio­n à une Coupe du monde. Il est grand, beau et se suffit à lui-même.

Le Japon attendra. On n’insulte pas le Tournoi. Pour avoir trop souvent commis ce crime, les Français ne participen­t plus à ses podiums, sa gloire et son histoire. Par bonheur, chaque année offre une nouvelle chance. Celle de 2019 arrive ce vendredi, qui peut tout effacer et faire naître enfin la joie. C’est tellement mieux que l’espoir...

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